« Les compensations de service public reçues depuis le 1er juillet 2007 par la Société nationale Corse-Méditerranée (SNCM) pour un service dit « complémentaire » destiné à couvrir les périodes de pointe de trafic de passagers pendant la saison touristique ne sont pas conformes aux règles de l’Union européenne (UE) en matière d’aides d’État applicables au service public », indique un communiqué de presse de la Commission européenne publié le 2 mai. Les aides perçues pour ce service « complémentaire » ne viennent compenser aucun besoin réel de service public, continue le texte. Pour Bruxelles, les services de transport maritime fournis pendant la saison touristique peuvent être offerts sans compensation particulière par des entreprises présentes sur le marché de la desserte de la Corse. En conséquence, « la qualification de service public du service “complémentaire” n’est pas nécessaire au regard du besoin réel de service public et l’octroi de compensation à la SNCM n’est pas justifié ». La Commission européenne évalue à 220 M€ les compensations reçues indûment par la SNCM au titre du service « complémentaire » pour la période 2007-2013. Une somme qui « doit être restituée aux contribuables car elle a procuré un avantage économique non justifié à la SNCM par rapport à ses concurrents », souligne le communiqué de presse. Celui-ci rappelle d’ailleurs que c’est « à la suite d’une plainte d’un concurrent » (Corsica Ferries, NDLR) que la Commission a ouvert une enquête dont le résultat est dévoilé en ce début mai.
Un avantage économique injustifié
Le même communiqué de presse précise également que les subventions versées par l’État à la SNCM et à la Compagne maritime de navigation (CMN) pour le service dit « de base » assurant les dessertes fret et passagers tout au long de l’année entre la Corse et Marseille sont, elles, conformes aux règles de l’UE en matière d’aides d’État applicables au service public. Pour la Commission européenne, le service « de base » remédie bien à une véritable carence du marché et vise, dans le cadre d’une politique de continuité territoriale, à atténuer les contraintes de l’insularité en assurant des services réguliers de transport entre le continent et la Corse. « En outre, bien que la procédure d’attribution de la délégation de service public (DSP) n’ait pas permis de garantir une concurrence effective, la Commission estime que les compensations au titre de ce service n’ont pas excédé ce qui est nécessaire pour couvrir les coûts nets de la fourniture du service, et que les mécanismes permettant d’éviter une surcompensation sont suffisants. » Le communiqué de presse de Bruxelles note encore que la décision sur les compensations de service public versées entre 2007 et 2013 « n’entraîne aucune conséquence directe sur la nouvelle DSP pour la période 2014-2023 ». Même si les services de la Commission « sont en contact avec les autorités françaises pour s’assurer que la future DSP soit attribuée en conformité avec les règles en matière d’aides d’État ». Enfin, Bruxelles rappelle que la Commission examine toujours un ensemble de mesures de soutien de l’État français, d’un montant total de 230 M€, liées à la restructuration et à la privatisation de la SNCM entre 2002 et 2006.
Le communiqué de presse prend soin de préciser que la décision européenne prise en ce début du mois de mai ne concerne pas ce dossier-là non plus.
Corsica Ferries salue la position de Bruxelles
Du côté de Corsica Ferries, compagnie à l’origine de la plainte auprès de la Commission européenne, la satisfaction est de mise. Pierre Mattei, directeur général de Corsica Ferries, a déclaré: « Nous attendions cette décision car cela fait de nombreuses années que nous contestons cette notion de “service complémentaire” complètement contraire aux règles européennes de concurrence et qui vise uniquement à favoriser une compagnie en difficulté financière. » Corsica Ferries précise être en accord avec la position du commissaire européen chargé de la concurrence. Ce dernier estimant que « le service public maritime est parfaitement défini par les règlements, et il ne peut pas y avoir de subventions hors service public ». Pour Corsica Ferries, les 220 M€ de subventions ont été donnés illégalement à la SNCM pour transporter des touristes en haute saison et ont faussé la concurrence sur les lignes Corse/continent pendant plusieurs années. Cette somme devra donc être remboursée. La compagnie rivale de la SNCM et de la CMN souligne encore que « cette décision résout le problème de déficit que connaît l’Office des transports de la Corse ».