L’association française du gaz (AFG) a organisé sa convention annuelle « Bilan et perspectives gazières » à la fin du mois de mars. Pour Anne-Sophie Corbeau, Senior gas analyst à l’Agence internationale de l’énergie (AIE), le marché du gaz en 2012 a présenté trois caractéristiques. La première concerne la demande de gaz naturel (GN) qui a continué à croître en 2012, « mais avec de grandes disparités géographiques ». L’essor de la demande mondiale de GN est tiré par les pays d’Amérique du Nord et du Sud, d’Asie/Océanie. Les zones Europe et Russie présentent une diminution pour la deuxième année consécutive. Selon l’AIE, jusqu’en 2035, la demande mondiale de GN devrait rester forte, largement portée par les besoins de la Chine « qui devrait recevoir cette matière première pour moitié sous forme de GNL, et pour moitié par oléoduc ». En 2012, la consommation de la Chine a atteint 150 BCM, dont 40 BCM importé, et devrait parvenir à 250 BCM en 2017, dont 113 BCM importé. La deuxième caractéristique du marché du GN en 2012 porte sur la contraction des échanges de gaz naturel liquéfié (GNL) en raison du « peu de nouvelles capacités mises sur le marché et de difficultés de production dans plusieurs pays (Yemen, Algérie) ». Seule l’Australie a mis en service une capacité de production supplémentaire de GNL en 2012.
Peu de GNL disponible jusqu’en 2017
Le recul des échanges de GNL en 2012 constitue un renversement complet par rapport aux années précédentes. Et, selon Anne-Sophie Corbeau, « très peu de GNL devrait être disponible d’ici fin 2014 », voire jusqu’en 2017. La capacité mondiale de liquéfaction de GNL pourrait retrouver un niveau plus proche de la demande à partir de 2018. Cette année-là, elle devrait atteindre 500 BCM au lieu de moins de 400 BCM en 2012. À partir de 2018, les approvisionnements en GNL seront portés par les trains de liquéfaction mis en service en Amérique du Nord (gaz de schiste américain et canadien), en Australie et en Afrique de l’Est. Chacune de ces trois zones géographiques pourrait produire plus de 100 BCM. Concernant les prévisions pour le GNL à partir de 2018, il reste « une incertitude majeure: le gaz de schiste délivrera-t-il toutes ses promesses », s’interroge l’AIE. Après 2018, il devrait aussi y avoir « de nouveaux grands producteurs et de nouvelles régions », a souligné Anne-Sophie Corbeau. Il s’agit de l’Afrique de l’Ouest, de la Méditerranée et de l’Asie centrale. La Russie compte mener à bien ses projets GNL dans la péninsule de Yamal et en Sibérie orientale. Le Qatar, premier producteur et exportateur de GNL actuellement, n’a pas de projet d’augmentation significative de ses capacités de production et pourrait perdre à terme sa place de leader du marché.
Des prix de plus en plus divergents
En conséquence de la relative pénurie de GNL, « la situation pourrait rester tendue sur ce marché au cours des quatre à cinq années à venir ». Aussi, il devrait être difficile pour les pays européens d’attirer davantage de GNL qu’actuellement, car ils entrent en forte concurrence avec l’Asie où les prix sont élevés, donc intéressants et privilégiés par les pays exportateurs. Et là se situe la dernière caractéristique indiquée par Anne-Sophie Corbeau: « des prix de plus en plus divergents » entre les trois zones géographiques Europe, Amérique, Asie. De fin 2012 à début mars 2013, le prix du GNL américain s’est situé entre 3 $/MBTU et 5 $/MBTU, le GNL européen aux alentours de 10 $/MBTU. En Asie, le prix spot du GNL grimpe à 16 $/MBTU, sachant que le Japon achète à 14 $/MBTU. Enfin, il reste une inconnue pour les années à venir: « Les perspectives de l’utilisation du GN dans le transport de marchandises routier, fluvial et maritime. » En juin 2013, l’AIE devrait publier un rapport dédié à ce sujet.