SNCM, Corsica Ferries: « le contribuable aussi peut être gagnant »

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En quatre pages intitulées « SNCM, Corsica Ferries: le contribuable aussi peut être gagnant », l’Ifrap souligne l’intérêt financier que représente le mode d’exploitation de Corsica Ferries et réfute toute accusation de dumping social comme « l’affirment » les marins de la SNCM. L’Ifrap reste vague sur la desserte fret de la Corse et ne fournit aucune information sur les résultats financiers de Corsica Ferries, pas plus que sur ses actionnaires directs et indirects. L’existence de la CMN est évoquée en quelques mots.

Après avoir noté que, depuis quelques années, la SNCM est majoritairement détenue par des intérêts privés (Veolia Transdev à 66 %) avec présence de l’État (25 %) et des salariés (9 %), l’Ifrap souligne que depuis les années 1999-2000 la part de marché de la SNCM s’effondre avec l’arrivée de Corsica Ferries (C F) sur la liaison Toulon/Corse. Grande habituée de la desserte Italie/Corse, CF met en ligne depuis Toulon deux Mega-Express assurant trois rotations par jour. « Avec un positionnement low cost, cette arrivée de la concurrence provoque un changement de la physionomie du trafic et une chute vertigineuse pour la SNCM, même si les résultats de 2011 montrent une légère amélioration ».

Pour les marins « CGT », la raison des difficultés de la SNCM est « clairement » identifiée, rappelle l’Ifrap: ils réclament l’application des lois sociales françaises à bord des navires italiens. À savoir, un équipage composé de ressortissants d’un État membre; l’existence d’un contrat de travail précisant les durées d’engagement, les éléments constitutifs du salaire, les congés payés, etc.; l’existence des couvertures sociales (maladie, accident, vieillesse, chômage) d’un État membre. « D’après nos informations, Corsica Ferries qui cabote depuis 13 ans, n’a jamais été mise en cause ». Il n’y a donc pas de dumping social, estime le think tank.

Le pire est ailleurs

« Mais ce qui pourrait bien déterminer l’avenir de la compagnie c’est la remise en cause de la délégation de service public: la SNCM devrait voir une baisse importante de ses subventions de plus de 30 M€ » rappelle l’Institut qui ne souffle mot sur les conséquences probables sur la CMN de cette remise en cause.

En avril, le président du conseil de surveillance a annoncé l’hypothèse d’un plan social de près de 800 personnes, soit la moitié des effectifs, souligne l’Ifrap qui ajoute « c’est assurément un coup dur pour son modèle économique qui n’est plus adapté. » Et l’Ifrap de rappeler l’existence historique d’une DSP (113 M€) entre Marseille et les ports corses portant sur les marchandises et les passagers qui a été attribuée à la SNCM et à la CMN; et un régime d’aide sociale (17 M€) au départ de Toulon et de Nice dont profitent indirectement toutes les compagnies maritimes (et au sujet duquel la Cour des comptes a explicitement alerté tout le monde en février 2011).

Or, en novembre 2011, la cour d’appel administrative de Marseille a annulé la DSP accordée à la SNCM et à la CMN et a enjoint la collectivité territoriale de Corse d’y mettre fin « à l’amiable » avant le 1er septembre, soit avec 15 mois d’avance sur ce qui était prévu. Ces décisions auront un impact financier sur la SNCM et la CMN, mais « malgré cela Corsica Ferries continue de gagner de l’argent avec pratiquement 10 fois moins de subventions », souligne l’Ifrap.

« La décision récente de la collectivité territoriale de revoir les conditions de la DSP montre qu’elle veut désormais tirer profit du low cost pour les finances publiques: ce modèle peut donc se révéler une bonne nouvelle aussi pour le contribuable », conclut l’Institut.

Pour le contribuable?

Mais lequel précisément? En effet cela fait des années que le montant (187 M€ selon le rapport public de la Cour des comptes publié en février 2011) de la subvention de continuité territoriale (avion et navire) est considéré comme un forfait dû à la Corse. Ce qui pourrait être éventuellement économisé sur le maritime serait conservé.

Par ailleurs, lorsque la SNCM était totalement publique, elle était souvent en déficit. Après apurement des pertes (142,5 M€) et financement d’un plan social portant sur la suppression de 400 postes (38,5 M€), elle a été privatisée en juin 2006 et est restée souvent en déficit. Depuis quelques mois, son actionnaire privé souhaite explicitement se dégager des transports. Il est peu probable qu’elle redevienne publique. D’autant que depuis la liquidation de SeaFrance, compagnie de ferries indirectement publique, l’idée que le contribuable sera toujours là pour absorber les pertes, est devenue très incertaine. Il reste la perspective également incertaine de la compagnie maritime corse. Dans son rapport, soumis à la délibération du 22 mars de l’Assemblée de Corse, le président de ladite Assemblée souligne « qu’au regard des contraintes techniques et financières actuelles, le recours à la compagnie régionale apparaît délicat. Cependant, il peut être envisagé d’étudier cette hypothèse afin de déterminer la ou les solutions permettant de mettre en place une telle compagnie à court ou moyen terme. »

En attendant, l’Assemblée a décidé de porter à douze ans, la délégation de service public pour l’exploitation des services de transport maritime de passagers et de marchandises entre Marseille et les ports de Corse. L’aide publique sera supprimée au 1er septembre. L’Assemblée a également adopté le principe de mise en place d’une commission spéciale composée de membres de l’Assemblée de Corse, du Conseil économique, social et culturel, de personnes « ressources » et dotée de moyens matériels et financiers afin d’étudier la « faisabilité d’une compagnie régionale maritime. »

Du droit de la concurrence appliqué à une DSP chargée de l’exploitation d’une liaison maritime

Les problèmes et autres dérives de la continuité territoriale sur la Corse ont, depuis sa mise en place en 1976, été à l’origine d’une abondante littérature: Commission européenne, Cour des comptes (française), tribunaux, avocats, députés en mission, consultants et journaux ont produit des centaines de pages sur ce sujet politiquement et socialement délicat. Une conclusion (probablement temporaire) pourrait avoir été écrite par Robert Rézenthel, docteur en droit, dans l’édition de mars 2012 du Droit maritime français: « Les pouvoirs publics organisent la régulation des marchés, mais les principes inhérents aux services publics ne sont pas particulièrement adaptés pour concilier la liberté du commerce et de l’industrie et la protection des entreprises au regard de la concurrence. Dans un État libéral, des règles spécifiques relevant du régime de droit privé sont nécessaires pour garantir le jeu normal des relations économiques. L’intervention des personnes de droit public dans leurs rapports avec les entreprises d’une part, et le contrôle du comportement de ces dernières au regard du droit de la concurrence d’autre part, impliquent selon l’objet des litiges, une compétence juridictionnelle distincte. L’arrêt de la Cour de cassation (Ch. com du 21 juin 2011; no 10.15754) que nous commentons illustre cette particularité. La mise en œuvre de prérogatives de puissance publique constitue dans tous les cas un domaine réservé aux juridictions administratives. »

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