Le marché du transport des vracs secs entre les différents centres industriels et agricoles de la Chine a progressé de 88 % de 2006 à 2011 pour atteindre 639 Mt, selon les dernières statistiques publiées par le consultant Jefferies. Clarcksons estime que le chiffre du transport de charbon, acier, minerais de fer, céréales et engrais s’élèverait aux environs de 1 Mdt uniquement en trafic domestique. Un marché qui alimente les petits vraquiers locaux.
L’eldorado chinois du vrac sec tend néanmoins à se réduire. Selon Jefferies, sur les quatre premiers mois de l’année le trafic côtier chinois a perdu 3 %. « Les stocks de minerais de fer et de charbon dans les ports chinois sont à des niveaux très élevés », a indiqué Moses Ma, un analyste maritime de ICBC International, une filiale de l’Industrial and Commercial Bank of China. La conséquence directe de ce ralentissement économique en Chine a incité les armateurs qui opèrent ces navires de petite taille à se tourner vers le marché international. Il est fini le temps où ces navires étaient transparents. La flotte de ces caboteurs est estimée aux environs de 2 000 unités qui ont une capacité de 10 000 tpl à 50 000 tpl. Les deux tiers de cette flotte auraient plus de 20 ans mais pour le dernier tiers, soit entre 700 et 800 navires, il s’agit de navires de type supramax et handymax d’une capacité entre 40 000 tpl et 60 000 tpl. Ils sont la propriété de groupes de renom international à l’image de Cosco, China Shipping, Sinotrans et Fujian Guohang Ocean Group. Récemment, on a vu certains de ces navires charger du charbon indonésien. Et un des principaux armateurs chinois de ces navires a confié à Reuters qu’un « certain nombre de ces navires est mis à l’ancre dans les ports chinois. Il est difficile de gagner de l’argent dans ce secteur. »
L’impact de la logistique du charbon
Pour les analystes, les raisons de ce revirement de position tiennent principalement aux problèmes de la logistique du charbon. Ce matériau, transporté en Chine en grande quantité, depuis le début des années 2000, afin de répondre aux besoins de l’industrie et de la sidérurgie, vit des heures difficiles. Compte tenu du paysage portuaire chinois, les navires avec du charbon préfèrent toucher les ports du nord de la Chine. Les stocks sont ensuite redistribués dans les ports plus au sud par des caboteurs. Quand la Chine voit son économie se ralentir avec une croissance de seulement 7 %, c’est toute une filière qui derrière trinque. Les besoins en acier et en électricité diminuent. Alors, les ports voient leurs stocks de charbon grossir sans que la demande intérieure ne puisse les absorber. Si l’économie chinoise s’enroue, c’est l’angine assurée pour les opérateurs maritimes. Les acheteurs de charbon voyant la demande baisser renégocient les contrats et les armateurs mettent leurs navires à l’ancre.
Quand les Chinois voient leurs marchés s’essouffler, ils cherchent ailleurs ce qu’ils ont eu chez eux. Le premier marché à voir ces navires arriver est celui du charbon indonésien. Mais le marché du charbon indonésien, surtout du charbon de chauffage, a suscité des intérêts de la part d’autres armateurs qui ont vu le secteur du nickel indonésien s’évaporer du fait des nouvelles réglementations nationales qui ont imposé une taxe de 20 % sur toutes les exportations. Les armateurs ont voulu alors se reporter sur le charbon et, avec la concurrence des caboteurs chinois, le marché indonésien a vu ses prix fortement baisser. Pire, selon Reuters, le gouvernement indonésien pourrait répéter sa réglementation du nickel sur le charbon en imposant des taxes à l’exportation. Ce seront tous les navires de ce marché qui iront voguer vers d’autres horizons et faire basculer un nouveau marché.
Et parce qu’un malheur n’arrive jamais seul, les analystes maritimes rappellent que les navires chinois sont de bonne qualité. Ils ont profité de la surcapacité de la cale mondiale pour reprendre des constructions que les autres armateurs ont abandonnées ces derniers mois. L’effet cascade de ces navires pourrait avoir, à terme, des conséquences dramatiques pour le monde maritime, répètent à l’envi les analystes.
Le Baltic Index se ressaisit
Le Baltic Index s’est ressaisi la semaine dernière, grâce à des échanges de marchandises sur le bassin Atlantique. Les navires de type capesize ont vu leur indice revenir aux niveaux de mai, à savoir 1 493 points. Ce regain temporaire ne doit pas cacher l’aspect morose du marché actuel, soulignent des analystes. La Chine aurait importé du charbon récemment, mais cela n’aurait fait que gonfler les stocks dans les ports, indique un analyste de Barclays Bank. La même tendance est constatée sur le marché des panamax qui voit leur indice progresser de 161 points à 1 129 points. Les panamax opèrent surtout sur les marchés des céréales. La nouvelle campagne en Europe et le retard de certaines récoltes ont certainement eu un effet sur ce regain temporaire.