À l’annonce des résultats du premier trimestre, les armateurs de vracs secs ne sont guère rassurants. Leur activité enregistre des baisses généralisées. Baltic Trading affiche une diminution de 34 % de son chiffre d’affaires à 6,2 M$ pour une perte opérationnelle de 3,3 M$, en baisse de 475 %. Et pourtant, l’armateur a réussi à limiter les dépenses opérationnelles pour les stabiliser. Au final, il se retrouve avec une perte nette de 4,4 M$, en diminution de 162 %. Des chiffres impressionnants mais qui n’ont rien d’exceptionnel. Genco Shipping and Trading s’inscrit dans la même tendance avec une diminution de son chiffre d’affaires de 41,3 % à 59 M$. Le résultat opérationnel s’affiche en perte à 12,5 M$ (− 137 %) pour une perte nette globale de 36,3 M$ (− 398 %). Et la liste pourrait durer encore. Parce que la baisse généralisée ne se cantonne pas aux opérateurs de certains navires, la société Jinhui Shipping est dans le même bain. Elle perd 32,7 % de son chiffre d’affaires à 58,2 M$ mais, à la différence des deux autres armateurs, conserve un résultat opérationnel en positif à 24,5 M$, malgré tout en diminution de 50,2 %.
Des chiffres qui s’expliquent au travers des données que fournit le groupe chinois Cosco. Dans son rapport trimestriel, la holding Cosco en charge des différents secteurs du transport maritime affiche des baisses de transport de charbon (14,6 % à 19,5 Mt), des minerais (− 18,4 % à 24,7 Mt) et des autres vracs (− 12,9 % à 4,9 Mt). Des courants de trafic en baisse, tant dans les opérations de cabotage national que dans les opérations internationales. Si les armateurs veulent garder un optimisme pour les prochains mois, les analystes ne partagent pas toujours cette gaieté. Du côté de l’offre, les armateurs ont commandé en masse au début de la décennie. Les navires sont attendus pour les prochains mois. Le carnet de commande des navires vraquiers est estimé aux alentours de 138,9 Mtpl pour 2012, après une année 2011 qui s’est élevée à 137,3 Mtpl. Si les chantiers ont livré de nombreux navires, la déconstruction a joué un rôle de régulateur avec 22,3 Mtpl de détruites en 2011. Sur les premiers mois de 2012, la mise à la ferraille de navires atteint 10,9 Mtpl sans que l’on puisse prédire ce que les prochains mois réservent. Baltic Trading cite l’exemple du Bangladesh dont les chantiers ont détruit 12 navires en avril. De plus, l’entrée sur le marché de la déconstruction du chantier chinois de Dalian pourrait accélérer ce mouvement compte tenu de sa capacité à déconstruire quelque 75 navires par an. L’année 2012 sera difficile du côté des armateurs mais, dès 2013, les choses devraient s’atténuer avec une baisse des livraisons prévues.
Des mois meilleurs?
Pour éviter toute tendance dépressive des investisseurs, les armateurs se veulent rassurant à l’égard de l’avenir. Dans leurs rapports trimestriels, ils annoncent des mois meilleurs, mais après un trimestre difficile. Pour l’armement chinois Juinhui Shipping, « le marché des vracs secs a baissé vertigineusement au premier trimestre ». Une tendance liée à l’arrivée de nouveaux navires sur le marché. En premier lieu, la courbe du Baltic Dry Index n’a jamais réussi à revenir aux niveaux de 2011, ni même de 2010 depuis le début de l’année. Depuis la fin du mois de janvier, une lente reprise se fait sentir sans pour autant revenir à des niveaux honorables. Pour preuve, au début de 2012, le BDI (Baltic Dry Index) a commencé l’année à 1 738 points pour atteindre son plancher à 647 points en février et remonter timidement au 31 mars à 934 points. Et l’armateur constate que les plus grosses pertes se font sur les navires de plus grande taille. Les gains réalisés avec les Supramax n’ont pas permis de compenser les pertes des Capesizes. Pour Genco Shipping and Trading, la situation pendant ces trois premiers mois a été à l’image d’un marché des matières premières atone. Les importations de minerais de fer en Chine continuent de se rétrécir face à une demande en baisse. Les stocks sont tombés à 97 Mt contre 105 Mt en février. Pour le charbon, les bonnes températures de l’hiver et l’état peu développé des énergies renouvelables ont permis de retrouver des importations plus importantes. Un regain qui reste faible puisque les stocks demeurent encore en dessous des niveaux visés de 7 Mt. Genco Shipping et Baltic Trading sont malgré tout optimistes pour les prochains mois. Le plan à cinq ans en Chine mise sur les infrastructures, source de nouvelles importations. Le ferraillage des navires devrait continuer à un rythme plus soutenu qu’auparavant. Enfin, l’Inde devrait voir ses importations de charbon thermique progresser de 20 %. Une tendance que l’armateur Eagle Bulk confirme. Il espère le développement de trafics des minerais et du charbon ainsi que des petits vracs industriels. L’avenir n’est pas tout sombre et les perspectives de redressement du secteur pourraient intervenir dès 2013. Au final, 2012 sera encore difficile.