La compagnie pétrolière BP a dévoilé courant janvier la deuxième édition de son « Energy Outlook 2030 ». Avec ce document d’une centaine de pages, BP a l’ambition de présenter sa vision des évolutions du secteur de l’énergie dans les 20 ans à venir en se fondant sur des données et des estimations économiques, politiques et technologiques. En introduction, BP pose trois hypothèses. D’ici à 2030, la population mondiale enregistrerait un gain de 1,4 Md de personnes et le PIB mondial pourrait croître de 3,7 % par an. L’efficacité énergétique devrait continuer à s’améliorer et freiner, à 1,6 % par an jusqu’en 2030, la part d’énergie primaire consommée au niveau mondial qui a connu une croissance de 2 % par an entre 1990 et 2010. Pour BP, les économies des pays hors OCDE vont largement tirer l’augmentation de la consommation mondiale d’énergie primaire au cours des vingt prochaines années. Toutefois, dans le même temps, avec les évolutions dans les pays de l’OCDE, le mix énergétique devrait lentement évoluer au niveau mondial: le gaz et les combustibles non fossiles devraient gagner des parts de marché au détriment du pétrole et du charbon. Pour la production d’électricité et le secteur industriel, l’utilisation des énergies renouvelables et du gaz devrait progresser, selon BP, dans les pays de l’OCDE tandis que les combustibles fossiles continueront d’être primordiaux pour les contrées émergentes. De son côté, le secteur du transport devrait de moins en moins contribuer à la croissance de la consommation de combustibles fossiles, plus particulièrement dans les pays de l’OCDE où l’amélioration significative de l’efficacité énergétique devrait compenser la hausse continue des ventes de véhicules dans les pays émergents où le développement économique crée un fort besoin d’énergie auquel seuls les combustibles fossiles peuvent répondre. « Le développement économique et la progression d²es besoins énergétiques sont liés, affirme BP. Mais une fois atteint un certain seuil d’expansion économique, les besoins énergétiques diminuent et évoluent ». Aussi, dans les pays émergents (Chine, Inde), les besoins en pétrole et produits pétroliers devraient progresser jusqu’en 2020, puis entrer dans une phase descendante. Il en va de même pour le charbon. Quant à la part du gaz, elle devrait rester stable (voir encadré).
Un besoin de 103 mbpj de pétrole en 2030
La demande globale de combustible fossile devrait s’élever de 16 Mbpj actuellement à 103 Mbj en 2030, estime BP. Ce qui revient à calculer que la Chine aurait besoin de 8 Mbpj de plus qu’aujourd’hui, l’Inde de + 3,5 Mbpj et le Moyen-Orient de + 4 Mbpj. Les pays de l’OCDE ont, eux, atteint leur apogée de consommation en 2005 et devraient tourner à 6 Mbpj au cours des vingt prochaines années. L’élévation de la demande de pétrole et produits pétroliers des pays émergents devrait largement être prise en charge par les pays de l’OPEP et plus particulièrement l’Arabie Saoudite et l’Iran. Selon BP, la production des pays hors de l’OPEP devrait progresser. Les États-Unis et leur pétrole non conventionnel, le Canada et ses sables bitumineux, le Brésil et ses forages onshore et offshore vont gagner du terrain dans un contexte de prix du baril durablement cher. Pour le courtier maritime Gibson Research, cette analyse de BP sur le renforcement de la production de pétrole du côté des Amériques « pourrait entraîner pour le secteur du transport de pétrole et de produits pétroliers une perte sensible de trafics en provenance du Moyen-Orient ».
Un focus sur la Chine, l’Inde et le Moyen-Orient
Dans la dernière partie de l’Energy Outlook 2030, BP présente sa vision de l’évolution de la Chine, de l’Inde et des pays du Moyen-Orient d’ici 2030. À cette date, la Chine sera la première économie mondiale et le premier consommateur d’énergie, l’Inde occupera la troisième place. Au cours des vingt prochaines années, ces deux pays contribueront à hauteur de 100 % à l’augmentation de la demande de charbon, à hauteur de 94 % de celle de pétrole, à 30 % de celle du gaz et à 48 % de celle des combustibles non fossiles. Les besoins énergétiques de ces deux pays devraient toutefois connaître un ralentissement à partir de 2020. Le mix énergétique et les énergies renouvelables pourraient rapidement gagner du terrain entre 2020 et 2030. En ce qui concerne le Moyen-Orient, la tendance à une consommation énergétique élevée devrait rester forte à l’horizon 2030 car ils profitent de leurs ressources à des coûts particulièrement avantageux, souligne BP. La part de la région dans l’offre mondiale devrait grimper à 34 % au lieu de 29 % aujourd’hui pour le pétrole et à 18 % au lieu de 14 % pour le gaz.
Le GNL de plus en plus important
La consommation de gaz naturel devrait croître dans les pays hors OCDE d’ici à 2030 et rester stable dans les autres. Au cours des 20 ans à venir, environ 80 % de la demande de gaz naturel devrait provenir des pays d’Asie et du Moyen-Orient. Cette dernière partie du monde mais aussi l’Australie, la Chine et les États-Unis devraient pouvoir répondre à la demande mondiale de gaz naturel. À l’horizon 2030, le gaz naturel liquéfié (GNL) transporté par les navires méthaniers devrait gagner des parts de marché par rapport au gaz transporté par gazoducs. La part du GNL pourrait s’élever à 25 % de la demande mondiale de gaz naturel en 2030, soit une hausse de + 6 % par rapport à la période 1990-2010. La première utilisation du gaz devrait être la production d’électricité suivie de la production industrielle et, plus secondairement, la satisfaction de besoins domestiques. Enfin, BP assure que le gaz non conventionnel (GNC) devrait gagner du terrain. Les États-Unis devraient jouer un rôle de premier plan tandis qu’une production en Europe n’est pas attendue avant 2020. La Chine devrait aussi prendre une place non négligeable dans la production de GNC.