L’annexe VI de Marpol impose aux armateurs l’utilisation de carburant avec un taux de soufre à 0,1 % lorsqu’ils naviguent dans les Seca (Sulphur Emission Control Area) dès le 1er janvier 2015. Les premières entreprises visées sont celles opérant sur la Manche. « Nous avons maintes fois alerté le gouvernement. Le ministre des Transports, Thierry Mariani, est conscient du problème. Il faut maintenant concrétiser les promesses tenues lors des Assises de la mer à Dunkerque le 29 novembre », a indiqué Fernand Bozzoni, président du comité environnement d’Armateurs de France et de l’armement Socatra. Et il y a urgence puisque le 30 janvier, le vote intervient au conseil environnement de l’UE. Les armateurs espèrent une position de la France et de ses partenaires pour intervenir sur le délai. « Il existe un front regroupé au sein d’Interferry pour défendre cette position », a expliqué Anne-Sophie Avé, délégué général d’Armateurs de France. La demande des armateurs est de voir l’échéance du 1er janvier 2015 reculer à une date plus réaliste. Techniquement, les solutions ne sont pas encore homologuées. Le scrubber, sorte de pot catalytique, n’est pas encore opérationnel chez les motoristes, expliquent les armateurs. « Nous ne sommes pas opposés à la mesure, nous souhaitons avoir le temps d’adapter notre flotte actuelle avec un produit qui sera homologué. Nous acceptons la mesure pour les navires neufs », indiquent les armateurs. Les effets économiques et techniques de ce dossier sont importants. Pour Jean-Marc Roué, président de Brittany Ferries, « c’est tout l’équilibre économique de chaque navire qui est remis en cause par cette mesure. Si le 1er janvier 2015 la mesure passe en l’état, nous risquons de devoir arrêter deux navires et de licencier 400 marins ». Cette mesure de l’annexe VI de Marpol aura un impact sur le prix du passage dans les zones Seca. La différence de prix du carburant entre du fioul lourd et du gasoil est de 40 %, « il est même monté à 70 % au plus fort de la crise pétrolière », a renchéri Antoine Person, président du BP2S. Au-delà des effets directs pour les armateurs, Antoine Person insiste sur la probabilité d’un report modal de la mer vers la route pour des raisons de coûts du transport. En outre, l’utilisation de gazoil signifie que la France devra importer encore plus de ce produit. « Nous transportons notre stratégie énergétique en dehors de notre État », continue le président du BP2S.
Du côté politique, les partis toutes tendances confondues comprennent bien les enjeux,« mais pour des raisons d’image, ils refusent de s’opposer à une mesure en faveur de l’écologie », a souligné Anne-Sophie Avé.