Chaque année, par le détroit d’Ormuz, transite entre un tiers et 40 % du trafic maritime mondial de pétrole et de produits pétroliers. L’essentiel de l’or noir exporté par l’Arabie saoudite, l’Iran, les Émirats arabes unis, le Koweït et l’Irak ainsi que la grande majorité du gaz naturel liquéfié du Qatar empruntent cette voie qui sépare les côtes iraniennes de celles du sultanat d’Oman. Le détroit d’Ormuz constitue ainsi l’un des corridors stratégiques du monde, emprunté chaque jour par plus d’une dizaine de tankers. Aussi, le 27 décembre, les menaces iraniennes de fermer ou de miner ce passage ont fait monter la tension au niveau international. Les cours du brut sont repartis à la hausse. Dès le 28 décembre, le porte-parole du ministère français des Affaires étrangères a indiqué: « Nous appelons les autorités iraniennes au respect du droit international et, en particulier, de la liberté de navigation dans les eaux internationales et les détroits. Le détroit d’Ormuz est un détroit international. En conséquence, tous les navires, quel que soit leur pavillon, bénéficient du droit de passage en transit, conformément à la Convention des Nations unies sur le droit de la mer, adoptée en 1982, et au droit international coutumier de la mer. » Toujours le 28 décembre, les États-Unis ont répliqué à la menace iranienne en affirmant « qu’aucune perturbation du trafic maritime dans le détroit d’Ormuz ne serait tolérée ». Ce pays maintient déjà dans le secteur une importante force navale, avec notamment une flotte basée à Bahrein. En signe d’avertissement concret, les États-Unis ont renforcé cette présence avec l’envoi de deux porte-avions. Le 8 janvier, le secrétaire américain à la Défense a de nouvel évoqué le sujet: « Nous avons été très clairs sur le fait que les États-Unis ne toléreront pas la fermeture du détroit d’Ormuz. C’est une autre ligne rouge pour nous et nous y répondrons. » La tension persiste donc à ce jour. Les cours du brut demeurent à des niveaux élevés, par exemple, plus de 113 dollars à Londres le 10 janvier 2012. La série de manœuvres navales menées par l’armée iranienne entre le 24 décembre 2011 et le 4 janvier 2012, dans le secteur du détroit en mer d’Oman et dans l’océan Indien, a largement contribué à entretenir la tension.
VERS UN EMBARGO DU PETROLE IRANIEN
Les menaces iraniennes constituent une réponse au bras de fer qui oppose la république islamique aux occidentaux sur le sujet du nucléaire. Depuis la publication d’un rapport de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), début décembre, les États-Unis, la Grande-Bretagne, la France et l’Allemagne envisagent un embargo du pétrole iranien, en plus des sanctions déjà prises, afin de forcer l’Iran à stopper son programme nucléaire civil soupçonné de dissimuler la mise au point d’une arme nucléaire. « Si les pays occidentaux imposent des sanctions sur les exportations de pétrole iranien, alors pas une goutte de pétrole ne pourra transiter par le détroit d’Ormuz », a déclaré le président Ahmadinejad. L’Iran produit 3,5 millions de barils de pétrole par jour (bpj) dont 500 000 bpj sont exportés vers les pays de l’Union européenne (UE). Une réunion des ministres des Affaires étrangères de l’UE consacrée à l’embargo pétrolier sur l’Iran est prévue le 23 janvier à Bruxelles. Il reste difficile à déterminer si l’Iran est capable d’empêcher la navigation maritime dans le détroit d’Ormuz. Les avis des experts sont partagés. Plusieurs rappellent les tensions lors de la guerre Iran-Irak (1980-1988) et un accrochage évité de justesse dans le détroit entre des vedettes iraniennes et des navires de guerre américains en 2008. L’incertitude est aussi élevée concernant l’attitude des États-Unis et des pays de l’UE sur le terrain si les dirigeants iraniens mettaient leur menace à exécution.