Dessertes de la Corse: pas de pilote à bord

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Une dotation de continuité territoriale de 187 M€ est allouée chaque année par l’État à la Collectivité territoriale de Corse (CTC) qui la rétrocède à l’Office des transports de la Corse, rappelle la Cour. L’OTC la répartit entre la compagnie aérienne régionale (CCM associée à Air France; 62,2 M€ d’aide en 2009; + 71 % entre 2001 et 2009) et les compagnies maritimes (141,8 M€; + 29 %) afin de financer les obligations faites aux transporteurs d’assurer un service régulier de qualité tout en appliquant des tarifs réduits pour certaines catégories de passagers dont les résidents corses. Peuvent alors exister: la délégation de service public ou l’aide sociale.

L’OTC ne peut plus payer

Entre 2001 et 2009, le nombre de passagers ayant emprunté un mode subventionné pour aller ou venir de Corse a augmenté de 30 %, à 5,3 millions. C’est principalement le maritime (3 Mpax) qui a profité de cette croissance et plus précisément les lignes entre Toulon et la Corse (2,1 Mpax), celles qui bénéficient du régime de l’aide sociale. Ce qui conduit l’OTC à rembourser une somme forfaitaire par passager bénéficiant d’un tarif réduit. Or cette aide a dépassé le montant de la dotation de continuité territoriale versée par l’État. Les réserves de plus de 40 M€ dont a disposé l’OTC en 2001 s’y sont épuisées. Quatre raisons expliquent, selon la Cour, cette situation qui a été aggravée par le gel de la dotation en 2009:

la hausse importante de la compensation au passager aérien en 2003 pour restaurer l’équilibre financier de la compagnie Corse Méditerranée; l’accroissement de l’aide sociale accordée au passager maritime dont le nombre a fortement augmenté; la hausse de la compensation versée aux compagnies délégataires d’obligations de service publique entre Marseille et la Corse alors qu’elles transportaient moins de passagers qui embarquaient ou débarquaient à Toulon; enfin, la baisse des tarifs sociaux n’a pas été mesurée au regard de l’économie globale du dispositif.

La Cour conclut « qu’en définitive, faute de volonté et démunie d’instruments d’évaluation, la Collectivité de Corse n’a pas préparé les décisions stratégiques nécessaires pour faire évoluer un dispositif qui donnait depuis plusieurs années des signes d’essoufflement ».

Recommandations

La Cour et la Chambre régionale des comptes de Corse formulent en conséquence « les recommandations suivantes à la Collectivité territoriale de Corse, mais concernant également l’État, en particulier en tant que financeur: définir clairement le rôle de l’Office des transports dans la conception et la gestion de la continuité territoriale, aussi bien maritime qu’aérienne, et mettre en place une véritable tutelle sur l’établissement; renforcer les contrôles de la mise en œuvre, de l’exécution par les compagnies des OSP; mettre en place les outils d’évaluation nécessaires à un débat global et objectif sur ce sujet; favoriser les conditions de concurrence en anticipant davantage le lancement des procédures d’attribution des délégations de service public. »

« Je partage l’analyse de la Cour ainsi que ses recommandations adressées à la collectivité territoriale de Corse en la matière », explique le ministre du Budget qui précise que « l’État n’a pas compétence pour intervenir sur les modalités d’utilisation par la collectivité de la dotation de continuité territoriale ». « Ce document n’entraîne de ma part aucune observation, analyse ou critique dont je pourrais souhaiter la publication », note le président de l’exécutif de la CTC qui souligne que « l’exécutif de Corse n’a pas toujours disposé des moyens qui lui auraient été nécessaires pour l’exercice de cette tutelle ».

Les longues réponses de l’OTC, de son ancien président, de la SNCM et de Corsica Ferries sont consultables sur le site www.ccomptes.fr rubrique « les derniers rapports ». Pour public averti seulement.

Corsica Ferries, made in CH?

« Corsica Ferries France, dont le chiffre d’affaires s’est élevé à 196 M€ en 2009, est une société par actions simplifiée dont le siège est à Bastia, note la Cour. Elle est contrôlée par une holding intermédiaire siégeant également à Bastia qui appartient elle-même à une holding tête de groupe (Lozali SA) domiciliée à Genève depuis 2006. Son président fait partie du directoire de la holding Lazoli SA. L’armateur des bateaux (Forship SPA) est basé à Gênes. »

Moby Corse arrête faute d’être remboursée

Le 16 février, la compagnie italienne Moby Line a annoncé qu’elle était « obligée de prévoir l’annulation de tous les départs à partir du 25 février sur la ligne Toulon-Bastia. Malheureusement, la hausse du prix du carburant qui ne semble pas ralentir et le non-paiement des subventions prévues par la Région Corse, auxquelles Moby a droit pour avoir, jusqu’à présent, honoré ses engagements en matière de continuité territoriale, l’obligent à prendre, à regret, cette décision […]».

Ancien administrateur de l’OTC, Fabien Paoli, président de Moby France, installée à Bastia et gestionnaire de la desserte Toulon-Bastia, est intarissable sur la non-réponse de l’OTC à sa demande d’aide sociale déposée en décembre 2009. Puis sur le silence de l’OTC à la suite du dépôt de l’ensemble de justificatifs déposés par Moby Line à la demande de l’OTC après que le tribunal administratif l’a sommé de répondre à la demande de décembre 2009. À ce jour, selon ses factures détaillées par catégorie d’ayant-droit à l’aide sociale, Moby Line devrait recevoir 800 000€, estime Fabien Paoli.

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