Dans son rapport annuel, Nicolas Cotzias Shipping Consultants part du constat de la hausse de la flotte mondiale. Avec une capacité de transport de 1,39 Mdtpl, la flotte mondiale a progressé de 10,1 % en 2010. Cette progression s’est surtout matérialisée sur les navires de vracs secs. Elle a augmenté de 15,6 % à 623 Mtpl. En nombre de navires, les vraquiers font aussi office de champion de la progression au cours de l’année passée avec une hausse de 1,4 % à 23 784 unités.
L’analyse par types de vraquiers démontre du poids des navires de grandes tailles et du rôle qu’ils joueront dans les années à venir. Les VLOC’s (Very Large Ore Carriers, transporteur de minerais) ont augmenté de 23 unités à 87 navires, soit 35,9 %, et de 36,2 % à 25,09 Mtpl en capacité. Ce secteur attend quelque 85 navires dans les prochaines années sans que des mises à la ferraille soient prévues. En moyenne, note le consultant grec, deux navires de ce type doivent entrer en flotte dans les prochains mois. « Nous avons le sentiment que ce secteur est largement sur dimensionné avec le nombre de navires en commande », souligne NCSC qui rappelle que 33 navires doivent arriver dès 2011. Ces unités sont relativement neuves puisqu’une seule encore en activité a été construite en 1985 et cinq autres avant 1990, ce qui laisse une marge de manœuvre réduite pour ferrailler des navires.
Pour les Capesize, la progression de la flotte s’est élevée à 14,1 % à 1 046 unités en nombre et 15,4 % à 183,2 Mtpl en capacité. Pire, ce sont 415 navires en attente de construction dans les chantiers de par le monde qui doivent entrer en flotte. « En 2010, un navire est entré en flotte tous les deux jours », souligne NCSC. Et le consultant grec va plus loin en prévoyant un pic de livraisons de ce type de navires en 2011 avec les retards négociés l’an passé au plus fort de la crise.
Les navires de type post-panamax ont suivi la tendance générale avec une hausse de 48,6 % du nombre de navires à 217 unités et de la même proportion en capacité à 21,9 Mtpl. Si 39 commandes de navires de ce type ont été annulées, il n’en demeure pas moins que 226 navires sont attendus sur le marché. Des annulations qui amènent le consultant grec à mesurer la surcapacité aux alentours de 105 %. Un chiffre en légère baisse par rapport à l’an dernier. En janvier 2010, le pic de la surcapacité a atteint 180 %. L’aspect positif, selon NCSC, apparaît dans des livraisons qui devraient connaître un pic en 2011 et se ralentir en 2012 et 2013.
Un ralentissement en 2012 et 2013
Les panamax ne dérogent pas à la situation. L’augmentation de leur nombre a été de 4,6 % à 1 739 unités pour 128,3 Mtpl (+ 5,4 %). Cette progression dans les navires panamax n’est pas encore alarmante. Le consultant a dénombré 709 navires en attente de livraison et 46 annulations de commandes. « Les opérateurs ont poussé la poussière sous le tapis », indique NCSC en rappelant que les commandes en forte progression et le nombre plus limité de ferraillage de navires (11 en 2011 contre 52 en 2010) repousse la surcapacité à plus tard. En 2011, note le consultant, l’augmentation de la flotte devrait s’établir aux alentours de 17 % mais, avec le peu de navires délivrés en 2010, le secteur des panamax devrait conserver sa compétitivité.
Les supramax, navires compris entre 50 000 tpl et 60 000 tpl, ont vu leur capacité augmenter de 32 % à 69 Mtpl et leur nombre de 30,4 % à 1 264 unités. Si le nombre d’annulations de commandes a augmenté et celui de commandes baissé, ce secteur demeure en grande surcapacité pour Nicolas Cotzias Shipping Consultants. Les menaces demeurent puisqu’un navire par jour en moyenne devrait être livré dans les deux prochaines années. Au total, la flotte des supramax devrait croître de 31 % en nombre et de 32 % en capacité 2011, ce qui, ajouté aux chiffres de 2010 est alarmant.
La flotte des Handymax est pour sa part relativement bien équilibrée. Si le nombre de navires entrés en flotte en 2010 atteint 1,3 % à 985 unités pour une augmentation de 1,2 % de la capacité à 44,4 Mtpl, cette catégorie de navires est âgée. 70 % de la flotte a plus de 10 ans. Les navires plus jeunes disposent ainsi d’avantages face à leurs aînés. Les investisseurs ont préféré investir dans des unités de type supramax plus rentables économiquement, et ont quelque peu délaissé ce secteur. Les commandes actuellement en cours ne devraient pas déséquilibrer ce secteur, même si une progression de la flotte de 3,2 Mtpl doit entrer sur le marché.
Les navires Handysize ont progressé de 5 % en nombre à 3 013 unités et de 6,1 % en capacité à 86,1 Mtpl. Le nombre de commandes diminue légèrement, de 10,9 % à 781 unités (25 Mtpl) alors que les annulations d’ordre progressent de 32 % à 177 navires (5,6 Mtpl). C’est du côté du ferraillage qu’il importe de regarder avec 142 unités devant entrer à la démolition (3,8 Mtpl), les Handysize pourraient contenir une surcapacité endémique de ce secteur. « En 2011, quelque 413 navires Handysize doivent entrer en flotte. En ajoutant les entrées de 2010, la progression de cette flotte est importante », note le consultant grec.
Forte progression des Handysize
Enfin, la dernière catégorie de navires, appelée Bulkers, ne souffre pas d’une surcapacité, avec une augmentation de 1,4 % de son nombre de navires et de 0,7 % de sa capacité à 42,8 Mtpl. Le plus inquiétant pour NCSC est l’âge des navires qui dépasse les 30 ans. La proportion de ces navires âgés est importante et alarmante selon le consultant grec. En 2010, pour exemple, un navire construit en 1906 a été ferraillé. Ce n’est pas une exception. Ces navires opèrent principalement en cabotage national dans des endroits où la législation n’est pas trop regardante sur les conditions de navigation.
Les analyses entreprises dans ce rapport du consultant ne prennent aucunement en compte les facteurs essentiels du monde des vracs solides. D’une part, cette analyse repose sur une stabilité du marché des marchandises transportées. Le marché des céréales, des minerais et des charbons évoluent tous les ans, même si les tonnages demeurent dans des limites connues, selon le climat et les effets de la croissance et des récoltes. D’autre part, un élément essentiel du monde des vracs secs repose sur les capacités de la chaîne logistique à répondre à la demande. Un point de croissance économique peut correspondre à plusieurs voyages de vraquiers pour du minerai ou du charbon et, partant, des navires opérant sur des marchés peuvent être transférés sur d’autres. La surcapacité d’un marché diffère donc selon l’état des échanges de marchandises.