Le lancement du France a été peut-être une satisfaction il y a juste 50, ans mais les sujets de préoccupation ne manquaient pas. La « malédiction » qui pèse sur les ports français est une nouvelle fois soulignée sous la plume de Fernand Donnat dans le JMM du 28 janvier 1960.
(…) On voit que les ports des autres pays du Marché commun possèdent une avance considérable sur les ports français et cependant ils améliorent encore leurs installations et leurs liaisons avec l'arrière-pays. (…) Finalement, vis-à-vis des autres ports de la CEE, les ports français sont handicapés sur trois points principaux: 1) leur régime commercial et douanier est moins souple; 2) les grands travaux sont limités; 3) les liaisons avec l'arrière-pays sont insuffisantes. Les ports français paraissent souffrir de la méfiance manifestée au commerce, par une opinion protectionniste en matière agricole comme en matière industrielle. « Il n'y a cependant pas de grands ports sans commerçants », et cet axiome reste aussi vrai aujourd'hui qu'au temps de Colbert. (…) ». Deux pages et demie sont consacrées à ce sujet qui va devenir récurrent; peut-être l'était-il déjà comme le laissent comprendre des ouvrages de la fin du XIXe siècle.
Depuis, on a coulé du béton, beaucoup de béton, à Fos, puis au Havre, notamment. Les analyses les plus fines se sont succédées suivies de loin par des réformes plus ambitieuses les unes que les autres. Mais l'axiome de Colbert a-t-il bien été examiné? Des ports de commerce pour répondre à quels besoins précis? Le 15 juin, dans le cadre du Grenelle de la mer, le comité opérationnel sur le « port marchand moderne » rendra ses conclusions relatives à la mise en œuvre des engagements pris. Il y sera sans doute question de renforcement des liaisons avec l'hinterland. Cinquante ans que cela dure ainsi.