Elle est moins visible que celle du trafic passagers, mais peut-être plus mortelle. Le fret constitue peut-être la ligne de front. Les remorques ou les camions, c’est la spécialité de Marseille avec ses quais et sa manutention. Lorsque la Corsica Ferries s’installe sur Toulon, Pierre Mattéi, son directeur, jure la main sur le cœur qu’il ne veut pas du fret. « Ce n’est pas mon métier ». Dix ans plus tard, il a capté plus de 20 % de ce marché et affirme que la marge de progression se trouve dans ce secteur.
Un véritable hold-up gagné en cassant là aussi les prix. « Les tarifs sont négociés à la tête du client. La Corsica les choisit et n’accepte que les remorques et leur tracteur – c’est autant d’économiser en manutention, en temps et encombrement et gagné avec le conducteur passager », confie un acteur marseillais. Suivant diverses sources, un semi-remorque au départ de Marseille se négocierait entre 1 300-1 400 euros l’aller-retour contre 800-900 € au départ de Toulon. La guerre des prix se montre perverse pour les transporteurs corses habitués à Marseille. Philippe Cherici, secrétaire général du Syndicat professionnel des transporteurs de Corse (SPTC), se plaint que ces prix cassés attirent des donneurs d’ordres continentaux et de Corse qui viennent capter leurs trafics. La situation ne va pas se détendre avec l’arrivée de la Moby Lines sur Toulon. L’armateur italien explique la raison de son choix du port varois par la présence équilibrante de fret. La spirale du dumping risque de s’amplifier.