La mer Noire sous les feux de la rampe

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En 2008, le trafic portuaire conteneurisé de la mer Noire a représenté 3,56 M EVP, dont 75 % sont des importations et le solde des sorties de mer Noire, explique d'entrée l'enquête du consultant néerlandais Dynamar. Un trafic balbutiant pour le moment mais prometteur. Les statistiques des dernières années démontrent de l'intérêt de cette région avec des taux de croissance à deux chiffres, voire trois chiffres pour certaines relations.

L'étude du consultant néerlandais prend en compte les lignes maritimes entre la mer Noire vers l'Asie, celles reliant la mer Noire et la Méditerranée et les lignes domestiques entre les ports de la région. Au total, note Dynamar, 22 services assurent les relations avec l'Asie, la Méditerranée et en intra-mer Noire. À l'identique des autres liaisons maritimes dans le monde, les trois premiers armements mondiaux mènent la danse mais avec un ordre différent. MSC, l'armement italo-suisse, prend la première part de marché avec une capacité annuelle de 277 000 EVP. Suit Mærsk Line avec 265 000 EVP par an de capacité alors que l'armement danois n'est présent que sur deux rotations (les lignes avec l'Asie et avec la Méditerranée). Pour clore ce tiercé, le groupe CMA CGM offre 196 000 EVP de capacité par an.

Le premier service entre l'Asie et la mer Noire a été lancé le 14 septembre 2003 par le groupe CMA CGM. Le Bosphorus Express est né et le groupe français devient pionnier. Jusqu'à présent les boîtes destinées aux ports de la mer Noire sont transbordées en Méditerranée. Le 1er septembre, le groupe démarre avec sept navires de 2 300 EVP un service reliant Ningbo, Shanghaï, Xiamen, Chiwan, Port Klang, Port Saïd, Le Pirée, Istamboul, Constanta, Odessa et Illichivsk.

En inaugurant ce lien, CMA CGM ouvre une nouvelle route maritime directe. Le mois suivant, l'armateur italo-suisse MSC suit dans le sillage du groupe CMA CGM. Et d'autres vont venir avec notamment les principaux armements conteneurisés. Mærsk Line, K Line, China Shipping et Zim passent le Bosphore avec leurs navires mères. Au total ce sont 17 armements parmi les 25 premiers mondiaux qui naviguent régulièrement dans ces eaux. « Au début de 2008, note Dynamar, cette liaison maritime a rassemblé quelques neuf services directs avec une capacité de 1,16 M EVP. La mer Noire est perçue comme une partie des liaisons entre l'Asie et la Méditerranée. Elle a représenté, en 2008, 32 % du trafic entre la Méditerranée et l'Asie. »

La crise économique de la fin de 2008 n'a pas épargné la région. Les liaisons entre la mer Noire et l'Asie ont été les plus durement touchées. Des neufs services assurant les relations entre les deux destinations en 2008, il n'en reste que quatre. Un cinquième service devrait bientôt entrer en opération. L'effet des tumultes économiques a été retardé par rapport au reste des liaisons maritimes. Le consultant néerlandais table malgré tout sur une diminution entre 30 % et 50 % pour les trafics de 2009. Dynamar perçoit cette période comme momentanée. Les trafics conteneurisés avec les principaux pays de la région devraient continuer à croître comme ils l'ont fait depuis 2000. Ouvrant une frontière méridionale pour la Russie, les ports de la mer Noire tentent de s'imposer comme une nouvelle entrée sur le territoire. Dynamar n'exclut pas de voir les ports russes prendre des parts dans les approvisionnements. Certes, Saint-Pétersbourg prend une large part des trafics, notamment pour la région de Moscou, « mais il n'est pas exclut qu'à moyen terme, la part des ports de mer Noire, notamment Novorossiysk et les ports ukrainiens, prennent une importance plus grande pour les régions du sud de la Russie. »

En 2008, selon les statistiques données par la défunte FEFC, MSC a pris la pole position en terme de parts de marché sur les liaisons entre la mer Noire et l'Asie. Avec 80 400 EVP, l'armement italo-suisse assure 19 % de ce marché, suivi par le groupe CMA CGM avec 18 % (78 320 EVP), puis CSAV Norasia avec 16 % (67 720 EVP) et Mærsk vient clore ce quarté avec 14 % de parts de marché pour un volume de 60 750 EVP. Les rapports du groupe français sur la mer Noire sont à l'image de « Je t'aime moi non plus ». Après avoir été un pionnier dans les relations directes avec l'Asie, le groupe décide de quitter cette liaison au début de l'année pour revenir ensuite en coopération avec Mærsk Line en commercialisant un service, le New Bosphorus.

Les liaisons avec la Méditerranée sont plus difficile à comptabiliser. Dynamar alerte le lecteur sur les chiffres pris en compte. Compte tenu de l'absence de service directe depuis l'Europe du nord et l'Amérique du nord, une grande partie de ces trafics sont transbordés en Méditerranée pour être ensuite acheminés vers leur destination finale. Les ports méditerranéens de l'UE ont enregistré, en 2008, un trafic de 186 900 EVP dans les deux sens, en diminution de 7 %. Gioia Tauro, hub italien, prend la majorité de ces trafics avec 165 500 EVP. Il sert de base pour les armements comme Mærsk, Zim et CMA CGM. De 2006 à 2008, le port du Pirée accuse un repli constant. Plusieurs raisons expliquent cette tendance. D'abord utilisé par MSC pour devenir un hub de transbordement vers la mer Noire, Le Pirée a été la proie de nombreux mouvements sociaux au cours des derniers mois pour s'opposer à la privatisation du terminal à conteneurs. Fin 2008, le terminal a été concédé à Cosco Pacific. Depuis lors, MSC s'est tourné vers d'autres ports et d'autres moyens de desserte de la région. Dans ce contexte de changements rapides des dessertes, Dynamar note aussi la présence de trafics d'autres ports méditerranéens à l'image de Valence. Avec 31 300 EVP destinés à la mer Noire, le port espagnol prend une place de choix devant Barcelone et Algésiras. Enfin, la Turquie entre aussi pour une large part dans les trafics vers cette région. Les terminaux d'Istanbul assurent un volume conséquent.

Si les ports de la mer Noire reçoivent une large part de leur trafic depuis l'Extrême Orient, l'Europe du nord n'est pas en reste. N'offrant pas de services directs, les boîtes sont transbordées dans les ports méditerranéens avant d'être acheminées à destination. Une grande partie des liaisons maritimes avec l'Europe se fait depuis la Grande-Bretagne (Felixstowe engrange à lui seul 28 200 EVP) et la Belgique (Anvers expédie 17 600 EVP).

Enfin, en trafic intérieur, la mer Noire enregistre un trafic global de 265 200 EVP pour les trois ports appartenant à l'UE : Varna, Bourgas (Bulgarie) et Constanta (Roumanie). Sur ces relations « domestiques », le groupe CMA CGM aligne un service avec un navire de 340 EVP. Il entre en concurrence avec Sea consortium, armement d'origine singapourienne qui dessert les différents ports avec un navire de 800 EVP, offrant ainsi la plus grande capacité. UFS (United Feeder Service) est présent sur le marché soit en coopération avec d'autres armements, notamment le turc Emes ou le chypriote MCL, soit seul. Il offre deux services dont l'un sur lequel MCL dispose d'espaces. Il dispose aussi d'espaces sur les navires de Sea Consortium. UFS, présent dans de nombreux ports italiens ouvre ses capacités depuis ces ports vers la mer Noire à l'armement Emes.

La structure des trafics conteneurisés selon les lignes maritimes s'explique par les caractéristiques des commerces extérieurs des pays de la mer Noire. Dynamar donne un détail par pays de son commerce. Il apparaît que dans la majorité des cas, l'Union européenne intervient comme le premier fournisseur. Et dans ce groupe de pays, l'Allemagne et l'Italie font office de partenaires privilégiés. La France n'est jamais très loin, notamment en Roumanie et en Turquie. Une autre grande partie des trafics destinés aux pays de la mer Noire viennent d'Asie avec notamment des habits et des produits manufacturés. La Chine demeure un partenaire commercial important pour ces pays ainsi que la partie orientale de la Russie dont les trafics sont assurés par voie maritime. L'Ukraine apparaît dans ce schéma comme particulier. La Chine n'est pas le premier partenaire, elle s'est faite doubler par la Corée du Sud qui prend la pole position. L'Indonésie entre à parts égales avec l'Empire du milieu.

De nouvelles installations dans les ports tendent à faire de cette région une nouvelle porte d'entrée sur l'Europe. Avec Constanta en Roumanie et Odessa en Russie, la mer Noire joue la carte du sud est de l'Europe. Nombre de ces ports sont désormais intégrés dans les projets de développement des corridors terrestres de l'Union européenne. Selon le consultant néerlandais, les conditions douanières ne permettent pas de supplanter les ports traditionnels d'Europe. Actuellement, note Dynamar, des efforts sont entrepris par les pays pour devenir plus compétitifs. De plus, avec le Danube et les grandes artères fluviales du sud est de l'Europe, la mer Noire offre des potentiels de desserte de zones industrielles en Europe. Aujourd'hui le coût du transport terrestre en Europe étant plus élevé que le transport maritime, ce changement de circuits logistiques par la mer Noire est retardé. Il pourrait prendre une autre direction quand il deviendra plus rentable d'entrer par ces ports pour desservir le centre de l'Europe plutôt que de naviguer jusqu'à Anvers ou Rotterdam pour redescendre vers le sud de l'Allemagne, l'Autriche ou le sud de la Pologne. Ensuite, l'ouverture méridionale sur la Russie présente un avantage de marque puisque les ports de cette mer ne sont pas bloqués par les glaces alors que Saint-Pétersbourg souffre du gel de ses eaux plusieurs mois par an. Un atout qui pourrait bien fondre comme neige au soleil avec le réchauffement climatique.

(1) Black Sea Container trade, Ports & Terminals, Hinterland

Dynamar B.V

Juin 2009

Site : www.dynamar.com

Les ports de la mer Noire : une domination roumaine

Deux ports de la mer Noire font partie du top 20 des ports européens. Novorossiysk se place au 6ème rang avec 81,6 Mt, juste devant Le Havre. Odessa occupe la 11ème place avec 61,8 Mt, devant Saint Pétersburg. À prendre en compte uniquement les trafics conteneurisés, la première place revient à Constanta avec 1,38 MEVP. Le port roumain devance tous ses concurrents. Il joue un rôle de hub de transbordement dans la région et profite aussi de son débouché du Danube pour des liaisons avec l'Europe centrale. Ce classement ne prend pas en considération les trafics du port d'Istamboul qui sont certes en partie transbordés vers la mer Noire mais dont une partie sont destinés à son hinterland propre. En 2000, lorsque les premiers armements ont commencé des liaisons directes avec les ports de la mer Noire, seulement deux ports disposaient de portiques spécifiquement adaptés à ce trafic, Constanta et Odessa. La croissance des trafics de la région a été exponentielle au cours de la dernière décennie. Le trafic total des ports de la région a été multiplié par dix passant de 354 000 EVP en 2000 à 3,56 M EVP en 2008, avec des taux de croissance entre 40 % et 55 % sur les années 2003 à 2007. De nombreux terminaux sont alors sortis de terre pour répondre à la demande. Aujourd'hui 30 terminaux sont répartis sur le pourtour de la mer Noire. Des projets de nouveaux terminaux sont actuellement à l'étude. Ainsi, par exemple, les ports bulgares de Bourgas et de Varna prévoient la mise en service de nouveaux terminaux. Le premier table sur une ouverture en 2015 et le second en 2014. En Ukraine, Illyichevsk est devenu le premier port conteneurisé d'Ukraine dépassant Odessa. La première phase de son projet d'expansion a été terminé et le port est entré dans l'ajout de nouvelles capacités. Odessa, dépassé par Illyichevsk est devenu un port dédié aux liaisons intra-mer Noire. De nouveaux projets doivent lui permettre de revenir dans la compétition des ports desservis depuis l'Extrême Orient. D'autres ports ukrainiens comme Yuzhny veulent tirer leur épingle du jeu en jouant un atout particulier comme, pour Yuchny, être une plate-forme de transbordement vers la mer d'Azov ou Sébastopol en Crimée. En Russie, le principal port conteneurisé de mer Noire est celui de Novorossiysk. Le port compte trois terminaux dont deux sont opérés par Novossoriysk Commercial Sea Port, société locale cotée en bourse. Le dernier terminal est géré par National container Company, une filiale manutention de l'armement Fesco. Le développement de nouveaux terminaux sur les côtes de la mer Noire prennent une nouvelle dimension. Les grands opérateurs mondiaux se sont intéressés et regardent toujours les évolutions. Si des sociétés russes ont pris pied dans les ports de leur pays, APM Terminals n'est pas en reste. Présent en Roumanie dans le port de Constanta, « qu'il pourrait quitter », selon Dynamar, le manutentionnaire du groupe AP Moller regarde maintenant vers le port ukrainien d'Illyichevsk. Il pourrait participer à des projets d'expansion de ces terminaux. CMA CGM serait pour sa part près à s'implanter dans le port d'Odessa. L'armement français pourrait participer au développement du Brooklyn-Kiev Terminal et même apporter une nouvelle ligne maritime dans le port avec des navires mères. À leurs côtés, le groupe DP World est aussi présent localement à Constanta. Il a hérité de ce terminal lors de la reprise des actifs de CSX Terminals (ancienne filiale de Sea Land). Enfin, Hambourg Port Consulting, une filiale de l'autorité portuaire hambourgeoise a posé un pied à Odessa.

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