Les bassins Est et la tectonique des plaques

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Les édiles marseillais voulaient-ils rééditer le coup ? Ou cherchaient-ils à adoucir l'amertume des départs de l'Union naval de Marseille et d'Agrexco ? Le festival de Marseille (danse et art) annonçait, il y a quelques mois la localisation de spectacles dans le hangar 15. La réaction de la CGT fut aussi immédiate : il n'était pas question de transformer des installations portuaires dans un contexte de récession en lieux de culture. La municipalité dut faire marche arrière devant les menaces.

L'anecdote est symptomatique. Le domaine portuaire entre la Joliette et l'Estaque prend de plus en plus des allures d'une plaie jamais cicatrisée. Un syndicaliste n'a-t-il pas un jour comparé sa situation à celle d'un Palestinien ? Jean Claude Terrier, le directeur général du GPMM, préfère faire appel à la sismologie pour décrire le territoire des bassins Est. « À Marseille, le domaine portuaire relève de la tectonique des plaques. La rencontre entre la plaque portuaire et la plaque urbaine génère des tensions qu'il faut savoir gérer. » Il décrit « le choc culturel » qui l'a saisi lors de son arrivée à Marseille « en constatant que le génie français avait réussi à créer deux établissements publics sur le même périmètre » (GPMM et Euroméditerranée).

Comme chien et chat

Dès le lancement de l'opération de rénovation urbaine Euroméditerranée en 1995, les deux établissements se sont comportés comme chien et chat sous l'autorité de leur maître, l'État. D'abord feutré, l'antagonisme s'est rigidifié avec le temps. L'établissement portuaire avait pour lui la légitimité historique et une activité générant 10 000 emplois. L'établissement urbain représentait l'avenir à travers une mutation urbaine annoncée.

Verrouiller les accès

Curieusement, alors qu'Euroméditerranée appelait une plus grande ouverture de la ville sur la mer, le port, contraint par les réglementations internationales, n'a eu de cesse de verrouiller les accès. Les pêcheurs à la ligne se voyaient ainsi interdire la Grande Jetée. Et la passerelle piétonne livrée en 2008 pour la circulation des passagers de ferries jetait une balafre de béton entre le domaine portuaire et urbain de la Joliette. Résultat, à peine achevée, on n'hésite pas aujourd'hui à parler de la destruction d'un ouvrage qui a coûté la bagatelle de 3 M¤.

Comme dans toutes les villes-ports, la pression foncière et immobilière s'exerce de formidable manière sur le front de mer. La réussite de la réhabilitation des anciens Docks a servi de témoin. Alimentés par le boum de l'immobilier, d'autres bâtiments de bureaux se sont levés dans son prolongement. Banques, assurances, secteur tertiaire ont suivi les organismes publics et semi-publics qui souvent amorçaient la pompe. Le quartier de la Joliette s'est incontestablement transformé. La Rue de la République qui unit le Vieux Port et la Joliette, se trouve à la moitié de sa mue. Les projets regorgent dans les tiroirs.

L'activité portuaire et maritime s'est-elle trouvée renforcée par cette transformation ? À l'exception de l'extraordinaire réussite de la CMA CGM qui lèvera le plus haut des pavillons d'Euroméditerranée avec sa tour-siège, les professionnels ont du mal à résister aux concentrations et à la mondialisation. Le cercle des effectifs et du pouvoir de décision se rétrécit. Dernière nouvelle, Hapag-Lloyd France veut fermer sa base marseillaise.

Des bassins condamnés

Les bassins Est sont-ils irrémédiablement condamnés ? À part le président de la CCI qui, en provocateur, l'évoque, aucun des professionnels n'ose l'envisager. L'essentiel d'entre eux a le siège de ses activités sur le périmètre historique et n'est pas prêt à le quitter pour s'installer à Fos.

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