Les armateurs espagnols en plein blues

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Lors de sa réception en tant que membre de l’Académie royale de la mer, le président de la compagnie maritime espagnole Balearia, Adolfo Utor, a eu des mots très durs à l'encontre de la politique de l’exécutif espagnol en matière de transport maritime, dénonçant le déclin de la marine marchande espagnole. Les propos sont tenus alors que les compagnies maritimes espagnoles sont malmenées par les Italiennes Grimaldi et GNV sur des liaisons chasses-gardées.

Le président de Balearia est connu pour son franc-parler et, une fois de plus, il n’a pas failli à sa réputation. Dans le discours prononcé à l’occasion de sa réception comme membre de l’Académie royale de la mer, il a évoqué l’« incidence résiduelle en Europe » de la marine marchande espagnole, conséquence selon lui de l’absence de « vision stratégique » de la part de l’État espagnol. « L’Espagne occupe le wagon de queue européen et se situe même derrière des pays sans un kilomètre de littoral, malgré sa situation géographique et sa position en tant que deuxième pays d'Europe en matière d'interconnectivité maritime ».

Adolfo Utor attend de l’État « un engagement ferme et l’adoption des mesures nécessaires pour que les compagnies maritimes espagnoles puissent rivaliser sur un pied d'égalité avec celles du reste de l'Union européenne ». Il a cependant précisé qu’il ne demandait pas de subventions mais un alignement sur les conditions dont bénéficient les marines marchandes d’autres pays européens, mentionnant l’Allemagne, la France et l’Italie.

En juin dernier, Vicente Boluda, président d’Anave, homologue espagnol d’Armateurs de France, s’était exprimé dans le même sens, lors de l’assemblée annuelle de l’organisation, en affirmant que « l'Espagne a besoin d'une politique nationale de la marine marchande ». Il avait plaidé pour la création d’un ministère de la Mer ou au moins d’un secrétariat d’État en charge des Affaires maritimes et rappelé que la part des compagnies espagnoles dans le commerce maritime espagnol était tombée de 70 % à moins de 20 % entre le début des années 80 et aujourd’hui.

Intensification de la concurrence

Les compagnies maritimes espagnoles se sont traditionnellement cantonnées dans le trafic domestique : celui entre la péninsule d’une part et les archipels (Baléares et Canaries) ainsi que les enclaves africaines de Ceuta et Melilla d’autre part. L’activité internationale a été délaissée à quelques rares exceptions près. Or leurs concurrents étrangers viennent se positionner de plus en plus sur le trafic national, chasse-gardée traditionnelle des Espagnols.

Adolfo Utor a notamment évoqué l’arrivée des italiens Grimaldi et GNV sur le créneau péninsule-Baléares qu’il a qualifié d’ « invasion », en ajoutant qu’il s’agit d’un phénomène « imparable qui va s’accentuer ». Cette déclaration intervient alors que Grimaldi est en train de créer un réseau de lignes en Méditerranée occidentale : il a lancé, le 19 septembre, un service régulier entre Palma et deux ports italiens (Cagliari et Salerne) avec deux navires de la toute nouvelle catégorie ECO. De son côté, GNV envisage d’accroître de 30 % la capacité de son service ro-pax entre Almeria et Nador (Maroc).

Reste à savoir quelle sera la réponse du ministère des Transports, de la Mobilité et de l’Agenda urbain (MITMA). Ces derniers moins, les équipes de la branche Transports ont été absorbées par les longues négociations avec les organisations du transport routier de marchandises (TRM) et les mesures de soutien au secteur du transport dans le contexte des conséquences économiques de l’invasion de l’Ukraine par la Russie.

Daniel Solano

 
 
 

 

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