Les révélations des médias allemands sur de possibles tractations entre Hapag-Lloyd et le manutentionnaire portuaire Eurogate au sujet d’une prise de participation dans le capital du terminal à conteneurs de Wilhelmshaven n’ont pas eu le temps de tiédir qu’une autre annonce vient les percuter.
Cette fois, c’est le géant asiatique du transport maritime Cosco qui fait parler de lui sur les quais de la ville hanséatique. Cosco Shipping Ports Limited (CSPL) a « entamé les discussions » avec l’autre grand manutentionnaire allemand Hamburg Hafen und Logistik (HHLA) pour prendre une participation dans un des trois terminaux à conteneurs qu’exploite HHLA à Hambourg.
Vers une réorganisation des terminaux portuaires allemands ?
Cosco à Hambourg ?
L’armateur de porte-conteneurs de Hong Kong est en pourparlers avec HHLA pour prendre une « participation minoritaire » dans le terminal à conteneurs Tollerort.
Le Container Terminal Tollerort, qui est le plus petit des trois terminaux de HHLA, bénéficie d’un linéaire quai de 1 200 m avec quatre postes d'amarrage, à un tirant d'eau maximal de 15,1 m, ce qui lui permet d’accueillir les navires de dernière génération. HHLA exploite à Hambourg trois terminaux : les Container Terminal Altenwerder (CTA), Container Terminal Burchardkai (CTB) et Container Terminal Tollerort (CTT), totalisant 7,6 MEVP (en 2019, année hors pandémie).
HHLA, qui a retrouvé des couleurs à la faveur d’un premier trimestre enthousiasmant sur un plan financier avec un chiffre d’affaires de 21,3 M€ contre 10,1 M€ à la même période en 2020 mais a enregistré une baisse de volume de 7,2 % dans ses trois terminaux, y voit une opportunité de lui assurer du trafic. Hambourg continue d'être affecté par des problèmes de congestion, qui ont poussé les partenaires de 2M, Maersk et MSC, à rediriger une grande partie de leurs flux vers Bremerhaven.
Hapag-Lloyd à Wilhemshaven ?
Il y a à peine quelques jours, les médias allemands révélaient que l’armateur de porte-conteneurs national Hapag-Lloyd, qui ne commente pas « les spéculations du marché », était entré en discussion avec le groupe de manutention portuaire allemand Eurogate Group à propos d’une prise de participation dans le capital du terminal Jade-Weser-Port (JWP) de Wilhelmshaven aujourd’hui détenu par Eurogate avec 70 % des parts (le terminal lui avait été attribué en 2006) et APM Terminals (groupe Maersk). Le transporteur envisagerait d'acquérir la participation de 30 % que détient la filiale portuaire de Maersk dans le terminal à conteneurs.
« Les manœuvres entre Hapag-Lloyd et Eurogate Group pourraient être considérées comme un moyen de faire pression sur HHLA qui gère tout le trafic du transporteur à Hambourg », indiquait Alphaliner à propos de ces possibles tractations. HHLA a en effet eu dans un passé récent des différends sévères avec Hapag-Lloyd en ce qui concerne les prix et les conditions de service.
HHLA et Eurogate « discutent » d'une éventuelle coopération
HHLA et Eurogate, tout puissants à Hambourg
Pourtant, la réorganisation des terminaux portuaires allemands était plutôt attendue entre les deux grands manutentionnaires que sont HHLA et Eurogate, qui opèrent en oligopole. Eurogate ne gère toutefois que le Container Terminal (CTH) à Hambourg mais la filiale d’Eurokai opère également à Bremerhaven et Wilhelmshaven.
En juin 2020, les deux opérateurs portuaires allemands avaient annoncé avoir entamé des discussions afin de coopérer, voire plus, dans les principaux ports à conteneurs allemands. Rien n’est publiquement sorti de ces échanges dont on ne connaît pas aujourd’hui l’issue.
Dossier politique
Cosco et HHLA sont prudents et indiquent que les négociations n'en sont qu'à leurs débuts. Un accord potentiel concernant la copropriété du terminal allemand par Cosco devra être approuvé en interne et par les autorités réglementaires compétentes.
Aucun transporteur maritime n’est impliqué dans les terminaux portuaires de Hambourg, excepté Hapag-Lloyd avec une participation minoritaire de 25,1 % dans le CTA. Si ces négociations aboutissent, un autre opérateur, et qui plus est, non européen, prendra donc pied outre-Rhin.
Si les deux parties obtiennent le feu vert des autorités, Cosco renforcera son ancrage en Europe du nord. Le transporteur asiatique possède déjà des participations dans le port du Pirée, le terminal Vardo Reefer en Italie, Bilbao et Valence, Zeebrugge, Anvers et le terminal Euromax de Rotterdam. « Le CTT restera ouvert à tous les clients », a jugé nécessaire de préciser HHLA.
L’annonce risque de générer de l’humeur alors que Bruxelles a manifesté dernièrement la volonté de restreindre les investissements chinois dans les entreprises européennes tout en reprochant à Pékin son manque de réciprocité dans les affaires.
Adeline Descamps