Le groupe de services maritimes à l'offshore pétrolier et gazier a publié le 7 novembre des résultats trimestriels reflétant l'état de son marché. Le secteur pétrolier manifeste des signes de reprise mais elle est faible et le contrôle des coûts demeure une préoccupation constante. Ses clients pétroliers privilégient toujours les projets à retour sur investissement court. Quant au sort du groupe marseillais en redressement judiciaire depuis août, la date limite de réception des offres est fixée au 20 novembre.
Du récurrent exercice de présentation des résultats trimestriels, il était surtout attendu des informations en lien avec son redressement judiciaire d’autant qu’un article paru sur Challenges.fr quelques jours avant laissait entendre que des manifestations d'intérêts se pressaient pour le groupe de services maritimes à l'offshore pétrolier et gazier, pourtant en difficulté. Le média en ligne indiquait que deux Marseillais, Jean Peyrelevade, ancien PDG du Crédit lyonnais, connu du grand public par l’affaire Tapie liée à la revente d'Adidas, et l'industriel Jean-Pierre Dréau, président de Snef (groupe de génie électrique et climatique), étaient les têtes de proue d'un consortium de banques intéressées.
La société française, qui comprend les entités Bourbon Corp et Bourbon Maritime, est en procédure de redressement judiciaire ouverte depuis le 7 août 2019. L’entreprise cotée sur Euronext Paris, avait annoncé dans un communiqué le 9 octobre qu’elle avait demandé la suspension de sa cotation pour laisser le temps aux administrateurs d’analyser une offre de reprise faite par une société détenue par un groupe de banques françaises. L'on sait désormais que ce pool est composé notamment du Crédit agricole, de BNP Paribas, de Natixis, de la Société générale et du CIC-Crédit mutuel. Toujours selon Challenges, les deux Marseillais n’auraient pas encore à ce jour réussi à présenter une offre commune. À l’occasion de la publication de ses résultats semestriels le 26 septembre, le groupe avait annoncé, sans plus de précisions, que la Deutsche Bank, la plus importante banque allemande, lui avait proposé un apport en « new money ».
Pour rappel, Jacques de Chateauvieux, le fondateur historique du groupe et actionnaire principal, avait repris la direction générale au début de l’été pour contrer une association de créanciers totalisant ensemble 75 % de la dette du groupe, dont l’offre de reprise leur aurait assuré de facto 93 % du capital. Quand le groupe a subi ces assauts, il se remettait difficilement à flot après avoir subi par ricochet la crise aux longues ombres du secteur pétrolier. Le groupe a perdu 458 M€ sur la seule année en 2018 sur un chiffre d'affaires consolidé de 689,5 M€ avec une flotte de 483 navires.
Finalement, à l’occasion de la présentation de ses résultats financiers à l’issue du 3e trimestre a coupé court à ces attentes en donnant rendez-vous le 20 novembre prochain, la limite de réception des offres ayant été reportée à cette date.
Chiffre d'affaires toujours impacté
Quant à son état de santé à l'issue de son 3e trimestre, Bourbon, qui recoupe trois segments (Marine & Logistics, Mobility et Subsea Services), a publié un chiffre d'affaires ajusté de 177,7 M€ (164,3 M€ en consolidé), en baisse de 3,2 % (hors variation à taux de change constants) par rapport au trimestre précédent mais en hausse sur un an. Le groupe fait valoir qu’il a été « particulièrement impacté par les maintenances programmées des navires et par la baisse d'activité du Subsea ». Les maintenances programmées des navires construits en série (choix fait par Bourbon pour optimiser la gestion de sa flotte) impacteront également l’année 2020, a d’ores et déjà prévenu le groupe marseillais.
Son segment Subsea (ingénierie et gestion des opérations jusqu’à 4 000 m de profondeur ; support au développement de champs pétroliers, gaziers et éoliens offshore ; Inspection, maintenance et réparation des structures offshore) accuse en effet un repli de 16,9 % avec un chiffre d’affaires à 36 M€ sur trois mois. En revanche, son activité Marine&Logistics (services à l’offshore pétrolier) est passé en un an de 87 à 94,5 M€, tirée par l’offshore profond, la dynamique de l’Asie (la demande en Malaisie est en hausse depuis plusieurs mois) ainsi que de celle de la zone mer du Nord. A contrario, en Méditerranée et au Moyen Orient (22,5 % de son activité), Bourbon a enregistré la fin de « quelques projets significatifs » mais signale la signature d'un accord de coopération sur 3 ans avec Total en Angola pour le déploiement de 5 navires ravitailleurs de type Bourbon Explorer 500.
Pour ce qui est de son activité « Mobility », qui assure le transport de personnels et de cargos légers pour les acteurs pétroliers, la reprise est faible, indique Bourbon. Ses affaires s’en ressentent, son chiffre d’affaires a perdu près de 2 points pour s’établir à un peu plus de 45 M€.
Taux d'utilisation de la flotte meilleur sur un an
Si la rationalisation de la flotte est enclenchée (cession et/ou démantèlement des navires non stratégiques - 461 navires en opération contre 492 au 3e trimestre de 2018), le taux d'utilisation moyen de la flotte en opération s’est dégradé d’un trimestre à l’autre (53,8 % contre 54,7 % au 2e trimestre 2019) mais s'est amélioré en glissement annuel (51,6 % au 3e trimestre 2018). « Il a été affecté par les maintenances programmées ainsi que les réallocations de navires sur les zones stratégiques », commente le groupe.
Les tarifs journaliers moyens (8 122 $) accusent un repli de 1,7 % par rapport au précédent exercice trimestriel. En cause, selon la direction, la fin de deux contrats d'affrètement long terme en Inde dans les opérations offshore. La division Subsea est passée d’un tarif journalier de 35 952 $ sur le 2e trimestre à 32 408 $. Les variations dans les deux autres segments sont mineures.
Cap sur ses priorités
Le déploiement de son plan stratégique appelé «#BourbonInMotion » et la restructuration de sa dette restent sans surprise ses deux priorités. La demande mondiale de pétrole reste grippée, signifie le groupe, avec une forte volatilité du prix du baril (qui oscille cependant entre 63 et 62 % depuis le début de l'année contre 75 $ en glissement annuel).
« Dans ce contexte, les clients pétroliers sanctionnent de nouveaux projets d'exploration et poursuivent leurs arbitrages en faveur de l'offshore, décode Gaël Bodénès. Les investissements dans l'offshore sont même en croissance en 2019, pour la première fois depuis 2014 suite aux gains de productivité du forage et de la production. Globalement, les ils privilégient toujours les projets à retour sur investissement court. Ils sont par ailleurs très attentifs aux nouveaux modèles et façons de travailler, qui apportent de nouveaux gains de productivité », explique Gaël Bodénès, directeur général délégué de Bourbon Corp., cité dans le communiqué. Un signal pour son programme « Smart Shipping ». En s’appuyant sur des innovations technologiques (positionnement dynamique, maintenance prédictive, équipements surveillés en continu….), Bourbon promet notamment de réduire les coûts d’exploitation de 25 %.
Adeline Descamps