Réalisé par l’association Evolen en collaboration avec le cabinet Accenture et la Caisse des dépôts, le rapport "Comed" évalue les besoins en compétences et en métiers dans sept filières clés des énergies " décarbonées" et les perspectives d’emplois à 2030. Il dresse également une cartographie des formations actuelles et celles à développer, afin de les adapter aux besoins des entreprises et de les rendre attractives pour les "jeunes" et autres "apprenants".
Quel est le contexte ?
Le rapport rappelle que l’évolution du mix énergétique en France repose sur deux objectifs : accélérer la production d’électricité de source renouvelable et diminuer de 40 % la consommation d’énergie en 2050.
Les cinq leviers majeurs pour accélérer la "décarbonation" de la production/consommation d’énergie en France et augmenter la part de l’électricité dans la consommation d’énergie finale sont :
- l’électrification, en particulier pour des secteurs comme l’industrie ou le transport ;
- le développement des énergies renouvelables ;
- la maîtrise de la consommation énergétique et l’efficacité énergétique ;
- la "décarbonation" des énergies fossiles via, en particulier, le captage et le stockage de CO2 ;
- l’identification des talents et le développement des compétences pour "décarboner" les énergies".
Quelles sont les filières identifiées pour la "décarbonation" ?
Pour le rapport, les sept filières des énergie "décarbonées" sont :
- l'éolien onshore et offshore ;
- le solaire ;
- les bio-énergies (biomasse, biogaz, biocarburants) ;
- la géothermie ;
- l'hydrogène "vert " ;
- les captage et stockage de carbone (CCUS) ;
- l'électrification.
La finalité de l’étude est de permettre d’anticiper les besoins en volume d’emplois d’ici à 2030 dans ces 7 filières, de définir les métiers en tension et les compétences nécessaires ainsi que les formations.
Quel est le détail des chiffres selon les 7 filières ?
- l’hydrogène, avec une prévision de 100 000 emplois (dont environ 96 000 créations d’emplois). "Ce nombre de France Hydrogène est en cohérence avec les investissements engagés", dit le rapport, citant ceux en R&D ou en vue de la construction de "gigafactory", de la mise en place d’infrastructures de production, de transport et de distribution, dont des infrastructures (aéro)portuaires, ou, encore, du développement des usages prévus dans le transport ;
- les bioénergies, avec une prévision de 100 000 emplois (dont 40 000 créations). " Il y a déjà 60 000 emplois dans cette filière en 2021, ce qui est déjà élevé, note le document. Celui projeté à 2030 l’est également. Cette projection est, cependant, principalement tirée par l’accroissement des capacités de production de biogaz, avec un passage de 4 000 emplois en 2021 à 25 000 en 2030. Le nombre d’emplois dans le secteur des biocarburants et de la biomasse progresse également, mais plus faiblement, respectivement à 7 000 et 12 000 emplois ." ;
- l’éolien (terrestre et en mer), avec une prévision de 55 000 emplois (dont 32 000 créations, 12 000 à terre, 20 000 en mer). "C’est un secteur en pleine croissance. La filière s’est engagée à créer plus de 20 000 emplois d’ici 2035, dans l’éolien en mer. Ainsi, l’estimation en emploi passe de 5000 à 28 000 pour l’éolien en mer. Cette activité a tardé à s’implanter en France, comparé aux autres pays européens. Mais les premiers projets mis en service en 2022 sont annonciateurs d’une nouvelle dynamique qui va s’amplifier sur les années à venir ", estime le rapport ;
- l’électrification des procédés, avec 40 000 emplois maximum (dont 9 000 créations). "Il s’agit de substituer de l’énergie fortement émettrice de CO2 par de l’électricité bas carbone, renouvelable ou d’origine nucléaire. C’est un moyen économique et rapide pour atteindre la neutralité carbone en 2050. De 31 000 aujourd’hui, les emplois passeraient à 40 000 maximum en 2030, dont 9 000 créations d’emplois." ;
- le CCUS : les emplois évoluent mais plus faiblement, puisqu’ils passent de moins de 2 000 à un maximum de 12 000 en 2030 ;
- le solaire, avec une prévision de 30 000 emplois (dont 12 000 créations) ;
- la géothermie, avec une projection de 10 000 emplois (dont 7 000 créations).
Le total des chiffres est ainsi le suivant :
- un besoin de 350 000 emplois prévus d'ici 2030 dans les 7 filières, dont 200 000 créations ;
- sur les 350 000 emplois, un tiers concerne l’hydrogène, un autre tiers les bioénergies, un sixième l’éolien (terrestre/marin) et la décarbonation des énergies (électrification des procédés, CCUS) ,
- 178 compétences clefs identifiées dans 115 métiers en tensions ;
- 9 500 formations.
Quelles sont les autres données à retenir ?
Une forte tension dans certains métiers (115), mais avec des moyens pour la résorber car :
- 70 % sont des métiers d’ingénieurs et cadres dont les compétences se trouvent dans l’industrie pétrolière et gazière et qui sont, pour la plupart, transposables aux métiers décarbonés. La tension peut être, partiellement résorbée par de la mobilité interne et une adaptation accélérée des formations existantes. Elle passe, aussi, par de nouveaux modules de formation hydrogène et éolien et des options de cursus plus courts (valorisant l’apprentissage) ouverts à un plus grand nombre de candidats ;
- 30 % des métiers en tension visent des techniciens/opérateurs, en nombre très insuffisant pour répondre à l’avancée des projets en phase d’installation et de production. La priorité est ici de développer l’attractivité des formations et des métiers associés via leur promotion dès le collège, à l’instar d’exemples étrangers.
Les formations sur les énergies sont insuffisantes en nombre et peu visibles, mais peuvent être développées dans l’urgence. Avec 5 formations spécifiques initiales pour l'hydrogène, 35 dans l’éolien, l’offre initiale actuelle est insuffisante. Le déploiement national d’offres de formations ciblées s’impose. La centralisation de "l’offre-énergies" sur un site national dédié est, ensuite, la condition sine qua non du développement de son attractivité.
Une opportunité pour attirer des talents, avec trois leviers forts, les enjeux climatiques, la haute technologie/innovation et la régionalisation des carrières, conforme, en particulier, aux priorités de la majorité des jeunes.