Début juin, Sogranlotrans a bouclé son déménagement, transféré ses bureaux et ses camions sur un nouveau site à Saint-Jean-Bonnefonds, près de Saint-Etienne. Une plateforme de 25 000 m2 avec 2 000 m2 de bureaux et d’atelier plus proche des axes de communication, de la rocade stéphanoise et de la future autoroute A45 entre Saint-Etienne et Lyon, à la croisée des chemins avec la route vers le Sud-Ouest et Toulouse via Le Puy.
La conception de cette plateforme, qui représente un investissement de 2,5 millions d’euros, a été particulièrement réfléchie. Un éclairage optimal et peu énergétivore est assuré par des leds. Des équipements de levage permettent aux ouvriers de travailler à la bonne hauteur dans l’atelier où un béton résistant au sel de déneigement a été coulé. Une voûte éclairante qui occupe 10 % de la toiture procure de la lumière naturelle dans l’atelier. Autre astuce mise en œuvre : « tout le site est en alignement roue avant, en particulier à la hauteur des pompes à carburant », indique Jean-Pierre Grangeon, attentif aux conditions de travail et de sécurité de ses employés. Ce transporteur ne se considère pas comme un simple héritier. En 2005, quand son père lui demande s’il souhaite reprendre la société qu’il a fondée en 1984, il est à l’étranger. Il prendra alors rapidement la décision de « rentrer à la maison pour poursuivre l’aventure familiale ». Pour s’aguerrir et acquérir des compétences, le dirigeant passe un master de transport et logistique à l’Institut supérieur du transport et de la logistique internationale (ISTELI) de Villette d’Anthon (38). Son sésame en poche, il fait ses classes et entre « par la petite porte » dans l’entreprise, « fait du quai, de l’atelier », et commence à travailler avec son père. Le binôme fonctionne bien. En six ans, entre 2005 et 2011, le chiffre d’affaires de l’entreprise va doubler, passant de 6 à 12 millions. En juin 2011, Jean-Pierre Grangeon prend les commandes. En 2014, le transporteur stéphanois « sortait du purgatoire » où l’avait plongé un impayé XXL de Sernam. Trois années difficiles mises à profit pour faire évoluer le fonctionnement de la société, d’un management partenarial à un management intermédiaire. Sur de nouvelles bases, il peut alors commencer en septembre 2015 à bâtir les plans d’un nouveau siège social, d’une base arrière moderne. Le permis de construire est déposé en mars 2016, le premier coup de pioche donné en juillet 2016. Le déménagement se déroule, comme prévu, début juin 2017.
Entre-temps, se pose une autre question, celle d’une opération de croissance externe. Pour Jean-Pierre Grangeon, ce projet intervient au bon moment, après trois exercices positifs. Dans son viseur, des sociétés in bonis, de moins de 50 personnes, sur l’axe historique de Sogranlotrans en direction de l’Alsace. Sa cible est vite déterminée : les Transports Ballet, près de Lure (70), bien connus pour la silhouette du sapeur Camember sur leurs véhicules. La seule exigence de son jeune dirigeant, Anthony Ballet, qui fait un autre choix de vie : boucler la cession avant fin mars 2017. Ce qui sera fait. Après les audits et avec le soutien de deux partenaires bancaires supplémentaires qui permettent de financer cette reprise dans de bonnes conditions via la holding du groupe stéphanois. Les deux structures restent juridiquement autonomes. Sogranlotrans apporte à son homologue son expertise administrative et financière et en ressources humaines.
Alors qu’il conduit deux chantiers en parallèle — le déménagement et le rachat de Ballet — Jean-Pierre Grangeon prend une autre décision : muscler son encadrement, recruter quelqu’un pour coordonner les opérations. Un bras droit qui soit un « soutien efficace aux équipes ». Véronique Wattin correspond à ce profil, avec une expérience significative chez Norbert Dentressangle et dans une grosse PME. Elle rejoint Sogranlotrans en janvier 2017. Jean-Pierre Grangeon peut également s’appuyer sur deux autres cadres dans les domaines administratif et financier et dans les ressources humaines. Ainsi que sur la collaboratrice de son agence de Colmar nommée responsable de l’exploitation de Ballet au côté de Nicolas, le frère d’Anthony Ballet resté dans la société.
Avec Ballet, Sogranlotrans s’est ouvert un autre levier de développement. Alors que la PME stéphanoise est positionnée sur un axe nord-sud, le long du sillon rhodanien, en direction de la région parisienne et du centre de la France, et surtout de l’Alsace avec son client historique Transco, l’entreprise de Haute-Saône exploite, elle, la transversale est-ouest, jusqu’aux Pays de la Loire. Les deux sociétés possèdent peu de clients en commun. Elles disposent de savoir-faire différents. Sogranlotrans est spécialisé dans la messagerie et des prestations régulières, avec vingt points d’exploitation entre Marseille et Lille, Rennes et Strasbourg, mais pas dans le Sud-Ouest où sont implantés ses principaux concurrents. Ballet, pour sa part, opère dans l’industrie du bois et de l’automobile autour des usines Peugeot et de leurs fournisseurs. « Nous avons toujours considéré le camion comme une machine-outil. Deux postes se succèdent sur le même ensemble, explique Jean-Pierre Grangeon. Les chauffeurs n’ont pas de véhicule attitré. » Chez Ballet, il en va différemment. Le chauffeur fait tandem avec son véhicule. L’utilisation optimale des camions avec des doubles postes implique un renouvellement plus fréquent chez le transporteur stéphanois, lequel achète une trentaine de moteurs par an depuis cinq ans. « Un investissement nettement plus élevé que celui imposé par le déménagement », remarque le chef d’entreprise. À noter que Mercedes a effectué son retour dans le parc aux côtés de Man. Ballet fait, lui, appel à une palette de marques plus large. À la faveur du renforcement de son organisation interne, Jean-Pierre Grangeon entend s’impliquer davantage dans la représentation de la profession. Administrateur de la FNTR, il est déjà particulièrement actif à la commission technique et à la commission des affaires sociales à Bruxelles. « C’est important d’être présents auprès des instances européennes pour leur faire valoir notre point de vue et desserrer si possible les contraintes qui pourraient peser sur les transporteurs », assure-t-il. Membre d’un club d’une vingtaine de chefs d’entreprise de différents secteurs d’activité de la région stéphanoise, il entend avant tout « ne pas s’apitoyer sur son sort » et profiter de la nouvelle dynamique impulsée par le changement de président de la République. « Les prochaines années vont être passionnantes à vivre parce que le degré d’autonomie des véhicules va s’accroître et que l’intelligence artificielle va révolutionner nos modes d’action », s’enthousiasme ce diplômé de maths-physique, curieux de « vivre cette révolution » et convaincu que « le transport est un métier d’avenir », malgré la multiplication des imprimantes 3D qui va peser inévitablement sur les volumes transportés.
SOGRANLOTRANS
• Siège : Saint-Jean-Bonnefonds (42)
• CA : 16 m€
• Effectif : 130 conducteurs
• Parc : 100 moteurs – 250 remorques.
BALLET
• Siège : frotey-les-Lure (70)
• CA : 6 m€
• Effectif : 49 salariés
• Parc : 45 ensembles – 55 remorques.