Nous sommes un commissionnaire de transport, qui s’appuie sur un effectif de plus de 3 500 collaborateurs et une centaine de sites (entrepôts logistiques, plateformes de cross-dock et bureaux). Nous nous definissons comme créateur de solutions de transport et logistique. Le groupe est principalement présent au niveau européen, en France, au Royaume-Uni, en Belgique, aux Pays-Bas, en Allemagne, en Suisse, en Hongrie et en Espagne. En matière de flotte, en tant que commissionnaire, nous sommes « asset light » et nous capitalisons davantage sur nos partenaires du transport. Nous n’opérons pas les tractions et la distribution est sous-traitée à 80 %. Les métiers de commissions sont par essence 100 % sous-traités. En 2022, nous sommes parvenus à dépasser la barre du milliard d’euros de chiffre d’affaires, atteignant 1,029 Md €. Une performance réalisée à deux tiers par des acquisitions et un tiers par développement organique.
Notre stratégie consiste en un mélange de croissance externe et de consolidation de partenariats avec des champions locaux du transport, notre objectif étant de stabiliser notre performance. Mais nous restons à l’affût d’opportunités de marché en matière de croissance externe. Nous ciblons avant tout des sociétés qui nous ressemblent. L’objectif est différent selon la région. En Europe, nous avons pour objectif d’accentuer notre présence, ayant déjà un socle de développement installé. Nous privilégions donc la consolidation dans plusieurs pays, notamment en Allemagne, en Espagne (dans le nord du pays, et dans la région de Madrid) et au Benelux. Nous explorons d’autres régions pour trouver des relais de croissance, comme l’Afrique. Après avoir envisagé de nous implanter en propre au Maroc, nous avons opté pour consolider notre maillage en région subsaharienne. Nous n’excluons rien sur le moyen d’y parvenir, que ce soit en organique ou par acquisitions, mais il s’avère que la croissance externe s’avère plus complexe en Afrique. C’est ainsi que nous avons récemment renforcé notre présence au Sénégal par consolidation organique.
Nous avons effectivement rencontré des difficultés en ce qui concerne la livraison de matériel roulant, avec des délais supérieurs à un an après la commande. Cette problématique est encore plus marquée chez nos clients et nos partenaires/sous-traitants qui possèdent une flotte en propre plus importante. Pour l’année en cours, nous nous attendons à des difficultés sur le deuxième trimestre, avec des volumes qui ont tendance à diminuer dans le retail et l’industrie. À cela s’ajoutent des taux d’intérêt très élevés et une baisse générale de la consommation des ménages, ce qui ne devrait pas arranger la situation.
Nous avons connu une forte augmentation sur l’ensemble de nos frais généraux. Les prix du transport ont fortement augmenté, notamment à cause du manque de chauffeurs en Europe, même ceux venant des pays de l’Est qui n’aspirent plus à ce métier. La guerre en Ukraine a accentué cette pénurie. S’est ajouté le facteur de la hausse du prix des carburants. Toutefois, en France, un marché qui représente 74 % de notre chiffre d’affaires, la mécanique de surcharge gasoil protège les transporteurs de trop fortes variations de prix de surcharge gasoil. En Allemagne, notre deuxième marché, nous avons dû nous battre en absence d’aides similaires. Nous avons été épargnés pour l’électricité et le gaz, car par chance, nous avons des contrats qui se prolongent jusqu’à fin 2023 en France. En revanche, en Allemagne et en Suisse, les prix de l’énergie ont aussi explosé. Nous avons eu un accompagnement de nos clients qui ont compris la situation et nous ont permis de passer une partie de cette inflation. Nos partenaires transporteurs y sont également bien parvenus. C’est important, notamment en raison de tous les investissements lourds qui seront nécessaires à l’avenir (transition énergétique, digitalisation des process, cybersécurité…). Globalement, nous avons réussi à maintenir nos marges, notamment parce que nous n’avons pas trop subi la surcharge gasoil.
Nous ne sommes pas les premiers touchés, même si cette ristourne représente un peu moins de 1 M€/an. Ce seront davantage nos partenaires qui en pâtiront. Il faudra en parler avec nos clients. Le problème est que le Gouvernement fige une trajectoire, sans fournir en contrepartie les infrastructures nécessaires, mais aussi des moyens de financement aux plus petites entreprises pour opérer la transition environnementale. Certains de nos sous-traitants se fournissent sur le marché de l’occasion et on leur demande aujourd’hui de passer de l’euro 4 à l’euro 6, voire à l’électrique… Et les conditions de financement ne sont pas évidentes pour eux, car les banques leur demandent des garanties. Or, l’essence de notre métier est de ne pas être sur des contrats, ce qui reviendrait dans le cas contraire à internaliser la flotte…
Nous avons opéré un changement de modèle financier. Nous avons en effet mis en place un pacte qui vise à octroyer des contrats de long terme avec les partenaires les plus performants. Ce dispositif leur donne aussi la capacité d’accéder à nos achats selon nos conditions. Mais les aides du Gouvernement sont clairement trop faibles. Un camion électrique coûte 2,5 fois plus cher qu’un camion thermique !
Nous produisons 370 000 t de CO2 par an sur trois scopes que nous avons déterminés. Le premier, notre production directe, représente 2 % de ces émissions ; le deuxième, les bâtiments, émet 1 % du total. Et 97 % proviennent du scope 3, c’est-à-dire de nos partenaires. Sur ce dernier, nous incluons l’aérien (10 % des émissions du scope 3) sur lequel il est difficile d’agir, tout comme sur le maritime où les compagnies doivent encore faire leur mue. En face, nous notons que plusieurs clients sont de plus en plus réceptifs à des délais plus longs pour choisir d’autres modes de transport. Nous avons un report modal très limité aujourd’hui. Nous faisons un peu de fluvial et nous réfléchissons à un projet sur Paris. Mais, entre les coûts d’approche sur Gennevilliers puis la prise de la barge et la livraison, cela reste onéreux et ce n’est en réalité pas réellement une économie d’énergie. Côté ferroviaire, nous regardons aussi avec quelques clients pour mettre quelques lignes sur le Sud-Est et le Sud-Ouest avec des compagnies qui offrent des accès à des conteneurs sur rail. Mais il faudrait des investissements colossaux pour que ce report puisse réellement fonctionner et avoir un impact dans la transition. Chez Heppner, la transition environnementale se fera très largement par la transformation de notre flotte, 15 M€ ont d’ailleurs été investis dans ce sens sur les deux dernières années.
Certains le sont. Nous avons aussi gagné des parts de marché avec des grands noms qui souhaitaient développer la transition environnementale. Mais le verdissement a un coût. Des clients nous demandent parfois d’étudier la mise en place de moyens verts. Mais dès qu’on leur dit le coût que ces livraisons représenteraient avec un camion électrique, ils ne vont généralement pas plus loin. Beaucoup marquent leur préférence selon la carte bleue, c’est une tendance de fond qui devrait s’alourdir par rapport à la baisse d’activité qui apparaît… Ce n’est pas au transporteur de supporter seul le coût de la transition. Chez Heppner, nous le faisons par rapport aux normes des ZFE et nous tâchons de marketer ce verdissement pour gagner des parts de marché, notamment avec le label EcoVadis Gold, et de le monétiser pour compenser les surcoûts, bien que le pricing power ne soit pas énorme dans le transport. Il y a une limite à l’augmentation des coûts, surtout cette année…
Nous sommes investis sur beaucoup d’énergies, nous sommes sur un mix pour répondre aux obligations légales et aux ambitions que nous nous sommes allouées, c’est-à-dire -60 % à 2050. Nous restons très ouverts et évitons d’investir massivement sur une seule technologie. Nous avions fait une feuille de route avec le GNV et le bio GNV en espérant qu’il finisse par émerger, car il réduit un certain nombre d’émissions. Il y a eu un lobby contre le GNV qui est une énergie fossile et décriée par certains. S’est ajoutée l’augmentation du prix du gaz qui a mis à mal notre stratégie. Nos freins par rapport aux véhicules électriques concernaient le manque de charge utile et d’autonomie. Mais la modernisation a atténué ces défauts et les flottes permettent les livraisons en centre-ville. Nous sommes actifs également avec les biocarburants, avec la mise en place de cuves qui ne peuvent malheureusement être utilisées que par des flottes captives… Nous suivons par ailleurs les différentes évolutions de technologies, comme les tests de caténaires autoroutiers, même si nous avons quelques doutes. Nous regardons aussi l’émergence de l’hydrogène, mais de l’aveu d’acteurs de cette énergie, elle ne pourrait être réellement disponible que vers 2030 pour les poids lourds. Ce qui est clair, c’est qu’on ne peut pas se passer des énergies thermiques. Chez Heppner, nous n’avons plus d’euro 3 ni 4, mais c’est très récent. Penser que l’euro 6 s’arrêtera demain, c’est une chimère.
L’hétérogénéité des normes complexifie fortement toute planification et empêche d’investir à grande échelle. Il y a bien sûr un besoin d’échéance, mais il faut de la visibilité. À l’échelle européenne, c’est encore plus complexe à suivre. Sur le dernier kilomètre, nous notons que le vélo cargo gagne de l’ampleur chaque année même si sa part sur l’ensemble de nos envois en zone urbaine reste encore marginale (3 %). Sur le dernier kilomètre, nous ne souhaitons pas déléguer la production à d’autres acteurs afin de conserver notre capacité à mettre en place nos offres vis-à-vis des destinataires finaux qui demandent de plus en plus de prestations sur mesure, qu’ils soient des destinataires particuliers ou professionnels. Les attentes évoluent, influencées par des nouveaux standards de marché imposés par les acteurs de l’économie digitale et du BtoC. La remontée des informations en temps réel et le track and trace prennent une part considérable dans les attentes de nos clients. Nous transportons de plus en plus une information, plutôt qu’une marchandise. Nous souhaitons donc rester à la manœuvre.
La loi zéro artificialisation nette nous crée des freins, car nous enlevons les marchandises d’industriels pour les envoyer en centre-ville. Nous sommes donc dans les zones périurbaines souvent concernées par le dispositif. Cette mesure peut être contreproductive d’un point de vue économique, mais aussi écologique. Par exemple, à Montpellier, lorsque notre bail est arrivé à sa fin, il n’y avait plus de foncier disponible. Avant de trouver finalement une solution, nous avions donc envisagé de nous installer du côté de Nîmes pour desservir Montpellier…
Comme beaucoup, nous nous heurtons à une pénurie de personnel sur plusieurs postes parmi lesquels les conducteurs de camions, les compétences liées au digital et aux systèmes d’information, les agents d’exploitation et même les caristes… Tous les postes sont concernés. Pour gagner en attractivité, nous avons spécialement travaillé sur la promotion de la marque employeur, notamment au travers de l’obtention du label « Great Place to work ». Nous nous engageons dans des projets répondant à des problématiques actuelles comme la transition énergétique ou le digital, qui nous permettent ainsi d’attirer des nouveaux talents.
Nous nous efforçons de garder nos talents, ce que nous parvenons à faire, avec seulement 2 à 3 % des collaborateurs identifiés comme tels qui partent. Au-delà des salaires, nous nous attachons à offrir une bonne qualité de vie au travail. Par exemple, nos collaborateurs disposent d’accords de télétravail. Cependant, nous veillons à garder un équilibre, car il ne faudrait pas qu’il y ait une inégalité entre les manutentionnaires et les employés de bureau. La féminisation fait également partie de nos priorités, avec 32 % de femmes sur notre effectif (contre 19 % en moyenne dans le secteur). Nous avons encore du travail à effectuer dans le domaine pour les postes de direction, mais cela est lié davantage à une question de temps qu’à une question de volonté.
2021 : PDG (Heppner)
2015 : directeur général (Heppner)
2012 : directeur Général Délégué (Heppner)
2011 : directeur régional IDF Nord (Heppner)
2010 : responsable de service international (Heppner)
2009 : responsable de service overseas (Heppner)
2008 : diplôme de l’EDHEC Business School
Création : 1925, par l’arrière-grand-père de Jean-Thomas Schmitt
CA 2022 : 1,029 Md€ (60 % à l’international)
Siège : Rosny-sous-Bois (93)
Marché : 10 000 clients
Effectif : 3 570 collaborateurs
Implantation : 157 pays desservis avec plus de 100 agences dans le monde
Activité : commissionnaire de transport