“Comprendre l’ensemble de la chaîne pour apporter des solutions”

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Avec 13,7 Mds€ de chiffre d’affaires, Geodis est l’un des leaders européens de la logistique et du transport. Détail de la stratégie du groupe.
Comment définiriez-vous l’activité de Geodis ?

Nous nous positionnons comme logisticien-transporteur, c’est-à-dire que nous intervenons sur l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement de nos clients en construisant des solutions logistiques et de transport qui permettent de la rendre résiliente. Cela nous oblige à comprendre tous les flux qui composent cette chaîne : des flux de matières premières et de composants qui entrent dans la fabrication de leurs produits finis. Ainsi, il est important que nous sachions où nos clients positionnent leurs usines de transformation de matières premières, où se trouvent les usines d’assemblage des différents composants qui entrent dans la fabrication de leurs produits finis, à quels marchés de consommation ces produits finis sont-ils destinés et s’il y aura des stocks intermédiaires pour assurer l’approvisionnement des zones de chalandise. À chacune de ces étapes, nos clients ont besoin d’un logisticien qui gère ces flux de façon optimale afin qu’ils arrivent à destination dans les délais négociés avec eux et que cette chaîne se termine par la satisfaction de leurs propres clients.

Comment se répartissent les activités du groupe ?

Nous avons cinq grandes activités : le freight forwarding (Commission de transport international), la logistique contractuelle (gestion de stocks, commandes, e-fullfilment…), la distribution express du dernier kilomètre, le transport routier de lots complets et une activité de conseil en optimisation de la supply chain. Le freight forwarding fait appel à différents modes de transports (maritime, aérien, ferroviaire, routier) et intègre plusieurs services incontournables, tels que le dédouanement du fret et/ou le contrôle des exportations. Cette activité a fortement crû en 2021-2022, en particulier avec des taux de fret maritime et aérien qui ont fortement progressé, même si sur le dernier semestre 2022, ces taux avaient commencé à se normaliser. Le freight forwarding représente plus de 40 % de notre chiffre d’affaires, notre activité « logistique contractuelle » et celles du transport terrestre (transport de lots et du dernier kilomètre combinés) représentent chacune 30 %.

La route reste incontournable pour Geodis. Comment s’organise-t-elle à travers l’ensemble des activités ?

Geodis est historiquement une société de messagerie, c’est-à-dire de transport de marchandises par route. L’organisation de transport routier pour nos clients est donc un de nos métiers cœur. Ce métier s’exerce différemment en fonction des flux à gérer, des géographies et des clients à servir. Les flux routiers en lots complets sont gérés par notre activité European Road Network présente en France et en Europe. Cette activité réalise plus de 1 Md€ de chiffre d’affaires et utilise une flotte en propre de camions ainsi que des sous-traitants réguliers. Pour les flux dits « du dernier kilomètre », il s’agit en général d’envois de plusieurs colis qui sont distribués grâce à un réseau d’agences de proximité localisées de façon optimale pour desservir un territoire donné. Cette activité est exercée par le métier Distribution &Express et représente environ 1,7 Md€, là aussi avec un mix de moyens en propre et sous-traités. Notre activité de Freight Forwarding fait aussi intervenir une partie de transport routier pour offrir une prestation de bout-en-bout à nos clients. Quand les flux de fret arrivent à un port ou un aéroport, ils ont été pré/post-acheminés par voie terrestre. Cette partie de la prestation représente au moins 30 % de la celle de freight forwarding. On voit ainsi que le mode routier est incontournable dans les services logistiques que nous offrons à nos clients.

Vous parliez d’un cinquième métier, la Supply Chain Optimization. En quoi consiste-t-elle ?

Nous modélisons les chaînes d’approvisionnement de nos clients et les conseillons, sur l’endroit où ils devraient placer leurs centres de distribution, voire leurs usines. Il y a différents niveaux de collaboration possibles. Nos clients peuvent, par exemple, choisir d’externaliser la gestion opérationnelle de leur supply chain et de garder seulement l’aspect stratégique. Nous faisons alors office d’intermédiaire entre eux et tous les acteurs qui interviennent dans cette supply chain.

La crise du Covid a-t-elle eu des répercussions sur votre stratégie ?

Elle nous a obligés à modifier certains aspects de nos opérations. Dans le freight forwarding, nous achetions auparavant des capacités de transport (maritimes, aériennes…) en partie à court terme. Pendant les années 2021-2022 où il y avait un manque de capacité, nous nous sommes engagés sur des contrats d’achats moyen terme. Nous avons aussi renforcé le contrôle sur certains actifs clés comme l’immobilier logistique. Du contrôle de cet actif dépend notre productivité opérationnelle et la compétitivité de notre logistique. Nous avons accéléré notre stratégie digitale pour permettre à nos clients/fournisseurs d’être plus facilement connectés à nos services car quand le présentiel n’était plus possible pendant cette crise Covid, la robustesse de notre infrastructure digitale a fait la différence et continuera à l’avenir. Enfin, après la crise du Covid, nous assistons à une volonté croissante de nos clients de diversifier leurs fournisseurs et leurs sites de production. Ce n’est pas toujours possible de le faire rapidement mais beaucoup nous interrogent sur les alternatives à leur modèle actuel, c’est-à-dire dans quels pays installer leurs usines ou des centres de distribution pour diminuer leur dépendance à la Chine.

Ces demandes concernent quels pays en particulier ? Comment le groupe entend-il y répondre ?

Notre stratégie est de renforcer nos capacités régionales de transport routier et de hub logistique, afin de pouvoir proposer des solutions de bout-en-bout dans ces géographies. L’Europe reste une région clé où nous sommes déjà bien positionnés. Mais nous continuons d’y renforcer nos actifs pour nos métiers d’European Road Network et de Distribution &Express. Nous avons en particulier des demandes concernant l’Espagne et le Portugal, et l’Europe de l’Est. C’est en ce sens que nous avons fait l’acquisition de Pekaes en Pologne, de Trans-o-flex en Allemagne et de quelques sociétés en France pour renforcer notre offre de distribution de palettes et de produits pharmaceutiques sous température dirigée. Il faut également mentionner l’acquisition stratégique de Need It Now Delivers aux États-Unis. Plus globalement, nous regardons vers l’Asie du Sud-Est, l’Inde, le Maghreb et le Mexique.

En ce qui concerne la transition énergétique, quelles sont les actions menées par Geodis au bénéfice de ses clients ?

Geodis est moteur sur le sujet. Nous travaillons de manière étroite avec des entreprises et des grands comptes fortement engagés dans la RSE, en calculant leur impact environnemental et en leur proposant des solutions innovantes. Cela consiste, par exemple, à relocaliser leurs activités de production près des zones de chalandise, à optimiser leur transport ou à recourir à davantage de multimodalité (route-rail), même si les réseaux ferroviaires ne permettent pas d’atteindre toutes les régions.

Qu’a initié Geodis pour le verdissement de son parc roulant ?

Pour ses actifs roulants, le groupe s’est engagé dans l’expérimentation, puis l’utilisation de véhicules à motorisations plus propres mais nous restons fortement dépendants des capacités des constructeurs. Pour les véhicules de moins de quatre tonnes, utilisés en livraison express, nous avons adopté des véhicules électriques pour tenir compte des ZFE. Nous testons également les véhicules roulant au biogaz et aux biocarburants. En ce qui concerne les camions de moins de 16 tonnes, nous explorons les technologies électriques pour lesquelles nous devons toutefois évaluer l’autonomie et la perte de charge utile à cause des batteries. Le déploiement de ces véhicules dépend aussi des infrastructures et de l’avancement des technologies. Nous travaillons également sur les biocarburants, mais ils représentent un surcoût pour nos clients. Enfin, pour les camions de 40 tonnes, nous envisageons de nous orienter vers un prototype hydrogène, mais l’offre industrielle ne suit pas encore.

En matière de digitalisation, quelle est la vision du groupe ?

Geodis dépense chaque année 4 % de son chiffre d’affaires dans l’IT (ndlr : technologies de l’information). Notre volonté est de digitaliser toujours plus nos métiers pour les rendre plus efficaces. Dans le domaine technico-commercial par exemple, nous avons récemment déployé un outil de gestion de la relation client (CRM) pour faciliter le travail de nos collaborateurs. Nous investissons également massivement sur la robotisation de nos sites logistiques, nous avons par exemple engagé 50 M€ pour mécaniser un bâtiment logistique de 100 000 m2. Notre ambition est de proposer à nos clients toute une gamme de nouveaux services, plus directement accessibles, grâce au digital.

Geodis a lancé il y a quelques années sur le marché la plateforme Upply. En quoi peut-elle aider les transporteurs à optimiser leur activité ?

Grâce à sa fonction Connect, Upply met en relation les transporteurs et les expéditeurs, ce qui leur permet d’entrer en relation commerciale de façon simple puisque tout le travail administratif lié à la transaction a été fait en amont par Upply. Par ailleurs, reconnaissant que la rapidité de paiement est clé pour les sociétés de transport, Upply leur garantit un paiement à J+7. Upply propose aussi grâce à sa fonctionnalité Smart, un benchmark des prix du transport pour les chargeurs et les transporteurs. Ce service permet à chaque partie de mieux connaître son marché et de gagner en compétitivité.

Comment définissez-vous la politique RH du groupe ?

Notre politique RH vise à recruter, développer et garder des talents qui se sentent bien chez Geodis et qui sont engagés pour sa réussite. Cette politique vise à être un employeur responsable engagé dans une démarche d’inclusion et de diversité. Si je prends l’axe de la féminisation comme un exemple de cette démarche, voici quelques éléments : les femmes représentent 40 % des salariés de l’entreprise, notre ambition est que ce pourcentage se retrouve à tous les niveaux de responsabilité. Évidemment, cela se fait par étape. En 2013, elles représentaient 13 % des managers. En 2022, elles représentent 23 %. Pour 2023, nous ambitionnons un taux à 25 %. Nous avons un comité de direction à 33 % féminin avec pour dernière nommée Stéphanie Hervé, chez Geodis depuis 25 ans, qui dirige le métier Global Contract Logistics. C’est un bel exemple de réussite au féminin.

Comment Geodis organise-t-il la montée en compétence de ses collaborateurs ?

Concrètement, cela implique une politique de formation continue pour chacune et chacun de plus de 15 h/an afin d’assurer à tous les salariés la réussite de leurs missions dans l’entreprise. Il y a plusieurs offres de formation, celles en lien avec le terrain, déployées sur un site ou autour d’une activité, sur la sécurité, les postures, les métiers de caristes, de chauffeurs… Il y a aussi de nombreuses formations selon les spécialités. Tous les salariés de Geodis suivent au moins une formation par an. Pour les 5 000 managers du groupe, il y a également des formations spécifiques, déployées par Geodis université, à travers le programme « Manage ! », ou les formations au leadership, en lien avec l’université de Harvard.

Comment Geodis essaie-t-il d’attirer les candidats ?

Nos activités logistiques restent très largement méconnues malgré nos efforts. Mais la crise du Covid a mis en lumière l’importance de nos métiers. Geodis a d’ailleurs été récompensé l’année dernière par l’Institut Choiseul, comme entreprise stratégique. Nous étions ravis de cette reconnaissance qui est plus largement celle de tous les acteurs du secteur. Nous poursuivons nos actions pour faire connaître nos métiers. Pour recruter, notre DRH utilise tous les outils digitaux et la cooptation positive.

Parcours

2013 : présidente du directoire de Geodis

2012 : directrice générale de Geodis

2010 : PDG du groupe TNT

2004 : directrice générale du groupe TNT Express et membre du Conseil d’administration TNT N.V.

1998 : présidente et directrice générale de TNT

1997 : directrice générale de Jet Services Group

1993 : directrice financière de Jet Services Group

Repères

Création : 1904 (Calberson)

Siège : Levallois-Perret (92)

Chiffre d’affaires 2022 : 13,7 Mds €

Effectif : 49 500 collaborateurs, dont 15 000 en France

Flotte : 3 604 véhicules

5 métiers : Global Freight Forwarding, Supply Chain Optimization, Distribution & Express, Global Contract Logistics, European Road Network

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