Si la réalité augmentée (RA) et la réalité virtuelle (RV) mettront encore du temps à se répandre dans le monde des PME, les grands groupes sont pour la plupart d’ores et déjà entrés dans des phases de tests plus ou moins avancées. Il en va notamment ainsi chez Dachser, DB Schenker, FM Logistic ou encore XPO Logistics. « Chez Dachser, la technologie de réalité augmentée est testée dans certains entrepôts allemands pour la préparation de commandes [« Pick-by-Vision »], explique Andreas Froschmayer, directeur du développement de l’entreprise, de la stratégie et des relations publiques de Dachser. Pour cela, nous utilisons des lunettes de données Google Glass, ainsi que des applications de réalité virtuelle dans notre organisation de vente. Avec la RV, les projets d’entrepôts sont visualisés et présentés au client de manière vivante et tangible. »
La RA et la RV présentent un caractère ludique, particulièrement adapté au domaine de la formation. Chez Dachser, c’est un terrain particulièrement propice au défrichement. Andreas Froschmayer avance : « En réalité virtuelle, nous étudions actuellement si la technologie peut être utilisée pour la formation des employés ». Claudia Roux, responsable relations presse pour XPO Logistics, pointe d’emblée un avantage déterminant de la RA et de la RV : « Ces technologies rendent l’information disponible immédiatement ou très rapidement, par rapport à des instructions à transmission vocale, qui doivent parfois être répétées. Qui plus est, l’information augmentée ou virtuelle reste en permanence accessible. » Adèle Lartigue, innovation project manager de FM Logistic, l’assure, « la réalité augmentée et la réalité virtuelle offrent de nombreuses solutions en matière de formation ». Le groupe teste un concept plaçant un apprenant en situation virtuelle de conduite de chariot, cela avec des commandes réelles. « L’objectif est double : aider à apprendre à conduire et sensibiliser aux risques inhérents, par exemple autour des passages piétons en entrepôt, aux palettes trop lourdes par rapport aux capacités d’un chariot, aux vitesses excessives », indique la responsable de FM Logistic. Ce projet entre cette année en phase de développement pilote. Son concept devra être validé avant de voir le test mis en œuvre auprès de caristes du groupe.
« Les avantages de la réalité augmentée sont principalement d’ordre pratique, détaille Andreas Froschmayer. Avec des lunettes de données, les deux mains restent libres pendant la préparation des commandes. De plus, les données et informations pertinentes sont toujours à portée de vue. Ce type de lunettes peut également apporter des avantages en matière de qualité et augmente la fiabilité des préparations de commandes. La technologie de réalité virtuelle, quant à elle, soutient notre équipe de vente en permettant à un client d’accéder virtuellement aux entrepôts qui n’existent pas encore. Cela facilite de manière très vivante la compréhension des processus en vigueur dans un entrepôt. En même temps, la communication et l’échange avec le client sont améliorés, surtout lorsqu’il s’agit de projets d’entrepôts complexes. » De son côté, Erik Wirsing, vice-président Global Innovation de DB Schenker met en avant l’optimisation du travail : « Nous mettons fortement l’accent sur des systèmes basés sur la réalité virtuelle dans les domaines de la formation et du picking intelligent. Nous avons développé et piloté les premières formations dans notre DB Schenker Enterprise Lab et nous sommes sur le point de les mettre en place. Nous avons reçu des retours très positifs tant d’un point de vue opérationnel que de la part de nos employés. Ces derniers apprécient la manière interactive dont les formations sont dispensées. En outre, l’entreprise est convaincue par le niveau élevé et standardisé de l’enseignement qui garantit un retour rapide sur investissement dans le domaine des formations numériques. En matière de picking, les itinéraires de prélèvement sont optimisés dans l’entrepôt et l’accès aux informations nécessaires est facilité dans le magasin. Nous attendons avec impatience de nouvelles lunettes intelligentes de réalité augmentée, qui seront plus légères et disposeront d’une plus grande capacité de batterie. Ces caractéristiques sont importantes pour une utilisation sur la durée d’une journée entière de travail. » La préparation de commande est également à l’honneur du côté de XPO Logistics. Testé en France en collaboration avec Zebra Technologies, l’afficheur tête haute HD4000, combiné avec la solution vocale de l’entreprise Voiteq, permet de communiquer l’emplacement des produits à stocker ou à récupérer, les quantités à prélever ainsi que d’autres informations essentielles. Informés en temps réel, les employés traitent les opérations « plus rapidement et plus précisément en se concentrant sur les tâches à effectuer en toute sécurité. La technologie est facile à reprogrammer en cas de changement dans les opérations », explique Richard Cawston, directeur général, supply chain Europe de XPO Logistics. Pour FM Logistic, les entrepôts sont aussi un terrain de jeu idéal afin d’expérimenter les technologies de réalité virtuelle. Le secteur du copacking est privilégié par le groupe installé à Phalsbourg. « Le dispositif que nous testons actuellement permet de se mettre dans la position d’un piéton qui va observer toutes les situations anormales et pouvoir corriger celles-ci », précise Adèle Larti0gue. Le déploiement de ce dispositif qui, à l’instar de celui concernant la formation, use de lunettes, s’effectuera en début d’année 2020.
Qualifié « d’immersive factory » (immersion en entrepôt, en usine), il sera proposé à différents sites du groupe et à leurs collaborateurs, ne revêtant ainsi pas de caractère obligatoire. Une communication spécifique sera toutefois mise en place afin d’assurer sa promotion en interne étant entendu que, selon Adèle Lartigue, « son potentiel d’utilisation est important ». Si le bien-fondé de la réalité augmentée et de la réalité virtuelle est évident, il est loin d’être complètement exploité, ouvrant dès lors à de nouveaux usages possibles. « Les avantages associés à la réalité augmentée concernant la productivité et les coûts doivent être approfondis. Les applications de réalité virtuelle sont à la disposition de l’organisation commerciale et sont principalement utilisées pour les grands projets d’entrepôts », relate Andreas Frosch-mayer. Pour sa part, Erik Wirsing insiste sur le fort potentiel de ces technologies : « Nos activités à forte valeur ajoutée et la maintenance sont des domaines où la réalité augmentée peut contribuer à l’amélioration du service. Nous évaluons constamment les technologies disponibles et définissons les cas d’utilisation les plus pertinents. Depuis la première évaluation de la réalité augmentée et de la réalité virtuelle il y a plus de quatre ans de cela, nous avons testé en permanence de nouveaux équipements pour des cas d’utilisation spécifiques et nous prévoyons de continuer à l’avenir. » L’ensemble des salariés d’un groupe tel que DB Schenker pourrait être impacté dans les années à venir : « Des formations pour différents emplois de cols blancs pourraient également être pertinentes pour notre entreprise », ajoute Erik Wirsing sans vouloir pour le moment entrer dans les détails. Concernant les développements à venir, FM Logistic estime disposer d’un avantage concurrentiel grâce à sa filiale immobilière, NG Concept, qui construit notamment ses entrepôts : « NG Concept nous transmet toutes les données nécessaires à la modélisation de l’environnement. Ces dernières sont fondamentales pour l’utilisation de ces technologies. Nous pouvons, grâce à elles, récupérer directement des fichiers intégrant des modélisation 3D qui nous font à la fois gagner du temps et de la précision », observe Adèle Lartigue. Indéniablement, RA et RV ne manqueront pas de participer à la transformation du monde de la logistique et auront des impacts sur celui du TRM, notamment en matière d’image, la rajeunissant certainement.
* Les citations d’Erik Wirsing, vice-président Global Innovation de DB Schenker, sont traduites par l’auteur.