Un jour il ouvre. Le jour suivant, il n'ouvre plus. Le jour d'après, il rouvre, mais aux seuls véhicules porteurs de moins de 19 tonnes. Sur le dossier de la réouverture du tunnel du Mont-Blanc aux poids lourds, le moins que l'on puisse dire, c'est que notre ministre des transports donne un spectacle affligeant de la manière dont il assume sa tâche. Ecartelé entre la réalité économique qui impose une ouverture rapide, la pression insistante de son homologue italien qui demande le réglement de ce dossier avant le 25 mars et bien évidemment la hargne des populations de la vallée de Chamonix qui ne veulent plus entendre parler de camions, notre ministre en perd son latin.
Il prend les acteurs économiques, transporteurs et chargeurs, en otage d'une décision de droit divin. Une décision claire et simple qu'il se refuse à prendre pour des raisons bassement électoralistes. En attendant, il préfère parler de Lyon-Turin, de l'aire d'Aiton ou de mise au gabarit B +. Mais son numéro de pirouette qui consiste à passer une journée dans les vallées alpines pour vanter les mérites du combiné, sans se préoccuper des décisions urgentes à prendre, ne trompe personne. Il finit par se décrédibiliser à force de nous asséner cette contre vérité : « le combiné marche, le combiné marche ».
L'interview qu'il nous a accordée est certes un plaidoyer intéressant pour le combiné. Mais celui de demain, pas celui d'aujourd'hui. Elle manque de courage dans la façon dont il faudrait aborder avec clairvoyance le sujet. Car Jean-Claude Gayssot le sait bien. Le transport combiné est en limite de capacités et de moyens. La SNCF est incapable d'assurer un service performant et régulier (sans qu'il soit nécessaire de lui imputer l'entière responsabilité de cet état de fait). Le courage serait de le dire. De dire qu'il faudra beaucoup de temps et de patience avant de rééquilibrer les parts modales. Qu'il faudra beaucoup d'argent et de volonté politique. Qu'il faudra surtout accepter l'idée selon laquelle le transport routier est incontournable. Dévoyer ce débat de fond en le focalisant sur le tunnel du Mont Blanc n'est pas digne, même si c'est politiquement malin.