TVA allégée contre réduction du temps de travail

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Un allégement de la TVA à 5,5 % ou un crédit d'impôt de 2 500 francs, c'est ce que réclament les professionnels du déménagement. Objectif : rendre leurs services plus accessibles aux ménages. D'autant que la profession est fragilisée par l'instauration des 35 heures et le paiement à 100 % des heures de l'accompagnateur en double équipage.

Le taux de TVA actuel incite les ménages à faire appel à des sociétés clandestines qui les font payer en espèces. Tout le monde est perdant, y compris les finances publiques, qui ne perçoivent aucun impôt de ces structures, et les particuliers, qui devrait avoir le droit au services de vrais professionnels ! ». Dans cette logique, la Chambre syndicale du déménagement (CSD) fait campagne, depuis deux ans, pour figurer sur la liste des secteurs bénéficiaires des baisses ciblées de TVA, de 20,6 % à 5,5 %. Une demande d'allégement qui concerne uniquement les services aux particuliers, et qui répond, selon la CSD, aux critères fixés par la proposition de directive de la Commission européenne en février 1999, en vue d'autoriser les États membres à appliquer à titre expérimental un taux réduit de TVA.

Selon l'organisation, une telle mesure, dont la perte fiscale est évaluée à moins de 100 MF, générerait un gain de chiffre d'affaires qui créerait 3 000 emplois. « La part de main-d'oeuvre dans un déménagement est, selon la distance parcourue, de 60 à 70 %, estime Fabien Limoges, président de la CSD. De plus, nos prestations sont fournies directement aux consommateurs finaux. Ces deux conditions nous placent dans le cadre des dérogatives appliquées au secteur du bâtiment et des services à domicile ». Cependant la Commission européenne, devant valider la liste des domaines pouvant bénéficier de cet avantage fiscal, n'a pas encore prévu d'y inclure les déménageurs. « Le dossier n'est pas clos, assure toutefois Fabien Limoges. Le ministre des Transports Jean-Claude Gayssot a marqué son appui pour un allégement fiscal à l'horizon 2003 ». En attendant, la CSD réclame avec insistance la création d'un crédit d'impôt, qui permettrait de déduire de la taxe sur le revenu les dépenses de déménagement jusqu'au seuil de 2 500 F. « Cette mesure, dont le coût, encore une fois, ne dépasse pas 100 MF, a été adoptée par le Sénat lors du vote du budget 2000, avant d'être rejetée par le gouvernement en deuxième lecture, constate Fabien Limoges. Confrontée à la concurrence européenne et engagée dans un vaste effort de modernisation sociale, notre profession considère que ses 15 000 emplois sont actuellement menacés ».

Oui au quatrimestre, non au double équipage

L'allégement en question pourrait non seulement inciter les particuliers à faire appel à des entreprises ayant « pignon sur rue », mais aussi faciliter le passage aux 35 heures hebdomadaires. Conclu le 23 août 2001, l'accord-cadre sur l'aménagement et la réduction du temps de travail (ARTT) a été étendu aux entreprises de déménagement par le ministère du Travail. Un an jour pour jour après la signature de l'accord branche paraphé par la CFDT et la CSD. « Ce texte traduit la volonté de modernisation sociale et de revalorisation du métier de déménageur entamée par la profession, souligne Yann Viguié, responsable des questions sociales à la CSD. Un bon point : l'accord cadre dissocie le temps de travail et la rémunération en instaurant le système du quadrimestre. Celui s'adapte au contraintes d'une activité très saisonnière - les déménageurs réalisent la moitié de leur activité entre juin et septembre - en autorisant le décompte des heures de travail sur quatre mois. Les périodes de décembre à mars, avril à juillet et août à novembre permettent de couper l'été en deux. Toutefois, les professionnels craignent que le surcroît de temps libre engendré par les 35 heures n'incite des salariés à travailler pour leur propre compte en marge de la loi. Pour le reste, les modalités de l'accord ARTT ont déçu les déménageurs. « Nous avons besoin de temps afin de changer notre mode de travail. Lors des négociations, l'accord branche prévoyait un dispositif dérogatoire pour les entreprises qui ont recours au double équipage. Le paiement des heures des personnes ne conduisant pas quand le véhicule roule devait être compté à 50 % jusqu'en décembre 2001, puis à 75 % en 2002, et à 100 % à partir de 2003 ». Une dérogation rejetée par le ministère du Travail. Une catastrophe, de l'avis des entreprises qui ont recours à cette organisation de travail - la majorité - pour la raison simple qu'elles ont besoin de bras à l'arrivée afin d'effectuer les opérations de déchargement et de manutention des pièces.

La qualité d'abord ?

Depuis la publication du décret Gayssot en février 2000, les temps de l'accompagnateur sont en effet décomptés à 100 %. « Un équipage se rendant de Paris à Marseille est contraint de coucher à Lyon s'il veut respecter les temps de conduite autorisés, observe Fabien Limoges. Une perte de productivité que les entreprises souhaitent limiter en ne plaçant qu'un conducteur par véhicule. Les premiers touchés sont les déménageurs actifs sur l'ensemble du territoire national. C'est le cas de Michel Heiss, P-dg de l'entreprise Heiss de Metz : « Nous réalisons 70 % de notre chiffre d'affaires (22 MF) en longue distance. Sur l'exercice 2001, nous estimons à 500 000 francs la perte due à la suppression du double équipage ». Le calcul est simple. Un déplacement d'une équipe de trois personnes, pour une durée de 12 heures, coûte 36 heures actuellement contre 24 heures lorsque le temps des équipiers étaient comptés à 50 %. Jusqu'à présent, Michel Heiss a privilégié la qualité du service : envoyer pour chaque opération deux ou trois déménageurs qui effectuent la prestation de A à Z. La meilleure solution, d'une part pour le client, rassuré de rencontrer les mêmes personnes lors du chargement et de la livraison. D'autre part pour les conducteurs, satisfaits de réaliser un métier de bout en bout. « Nos employés peuvent ainsi recevoir la reconnaissance d'un travail bien fait, explique le chef d'entreprise. Il n'est pas rare, par exemple, qu'après un long déménagement, un client invite ses prestataires au restaurant ». La méthode traditionnelle est encore rentable quand il s'agit de transferts importants ou groupés, pour lesquels sont chargés des porteurs-remorques de 110 à 120 m3. En revanche, Michel Heiss envisage d'embaucher des déménageurs en contrat de qualification, même s'ils n'ont pas le permis poids lourd, pour assurer des opérations plus modestes. « La qualité de nos prestations va en pâtir. De plus, l'ensemble des responsabilités reposera sur un seul homme, le conducteur. Où est la sécurité ? ». En outre, suite au plan de lutte contre l'exclusion de 2 MdF pour 2002 et à la création d'une aide forfaitaire à la mobilité et à l'installation de 130 MF, présenté par le gouvernement en juillet 2001, la CSD stigmatise les risques de dérive. « L'attribution d'une aide forfaitaire à la mobilité sur simple présentation d'un contrat de travail, sans prise en compte des dépenses réellement engagées, risque d'être détournée de son objet et d'alimenter plus encore l'économie parallèle et le travail illégal ». Seule solution : exiger des ayants droits la présentation d'une facture.

# 91 # Au « black », ça craint

« Travail clandestin égal danger », tel est le slogan de la campagne d'information engagée par la Chambre syndicale du déménagement (CSD). Un numéro vert est mis à la disposition des usagers, de façon à les informer des risques que comportent un déménagement « au noir » : complicité de travail clandestin, futur cambriolage, délais non respectés, dégâts non remboursés...

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