Comment les camions perdent du poids...

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Il suffit de comparer les poids des véhicules châssis-cabine qui figurent sur les fiches techniques respectives des constructeurs, pour se rendre compte qu'à gamme équivalente, ils ont perdu en moyenne 500 kg au cours des dernières années. Près de deux tonnes si l'on cumule les allégements dont ont bénéficié les derniers modèles de carrosseries et dont certains accusent 1 500 kg de perte de poids mort. Cette cure d'amaigrissement est appelée à se développer grâce à la généralisation de matériaux plus légers, aluminium et alliages, plastiques thermoformés, fibres de carbone, composites, céramiques etc. Mais, les derniers kilos sont toujours les plus difficiles à perdre et certains carrossiers estiment toucher leurs limites...

Ce n'est pas pour répondre à une quelconque mode que les véhicules routiers cherchent à perdre du poids. L'allégement des véhicules contribue à une meilleure rentabilité, objectif prioritaire de tous les exploitants... Pour ceux dont les véhicules ne circulent pas en charge complète, la réduction des poids morts influe favorablement sur les consommations. Pour ceux qui travaillent constamment à pleine charge, l'allégement bénéficie proportionnellement à l'amélioration de la charge utile.

600 kg gagnés en moins de 3 ans...

Les constructeurs, depuis une vingtaine d'années, inscrivent la réduction du poids des véhicules dans leurs « recherches fondamentales ». Cette réduction drastique des poids morts est utilisée désormais comme double argument commercial et tous les constructeurs mettent en avant, à l'occasion de la sortie de nouveaux modèles, les gains de poids obtenus par rapport aux versions précédentes. Ainsi, les Midlum de Renault VI, derniers arrivés sur le marché et destinés à remplacer les Midliner, ont été présentés par le constructeur « comme les véhicules de moyens tonnages qui offrent les meilleurs poids à vide de leur catégorie ». Ils varient de 3 000 kg pour les modèles de 7,5 t de PTAC à 4 000 kg pour les modèles de 16 t de PTAC.

Par rapport aux Midliner conçus dans les années soixante-dix, les Midlum sont allégés de plus de 300 kg en moyenne. « Le Midlum est compact et léger. Il rend plusieurs centaines de kilos à ses concurrents de la même catégorie. Cela va de 150 kg de moins sur la version 7,5 t à 800 kg pour les véhicules de 16 t de PTAC. Nous avons pu optimiser la charge utile grâce à des moteurs plus légers, à la suspension parabolique et à l'acier de haute limite élastique utilisé pour les panneaux et les longerons », explique Bernard Gonnet chez RVI. Il dresse, de la sorte, une partie de la liste des organes sur lesquels tous les constructeurs cherchent à gagner du poids.

Exercices sur les châssis et cabines

C'est sur les châssis que les gains les plus significatifs peuvent être obtenus. Un certain nombre de constructeurs tentent actuellement de remplacer le traditionnel cadre-échelle en acier par des structures modulaires en alliages aussi résistants qui permettront de ramener le poids d'un tracteur routier en ordre de marche à moins de 7 t alors que certains 6x4 accusent encore près de 9 t. Ils sont également à la recherche de matériaux tout aussi résistants mais qui auraient une densité moindre que l'acier des longerons actuellement utilisé.

Ce travail s'effectue également sur la cabine pour laquelle les constructeurs utilisent et utiliseront de plus en plus des matériaux plus légers (plastiques ou résines thermodurcissables renforcées de fibre de verre pour les pare-chocs, les planches de bord et les garnitures). Mais, la vraie révolution n'interviendra que lorsque pourront être commercialisées les cabines en matériaux composites qui sont actuellement à l'étude. Pour donner un ordre d'idée, sur un Unimog UX 100 présenté récemment par Mercedes, le constructeur a remplacé la cabine en acier dont le poids de métal brut pesait 200 kg par une structure en carbone qui ne dépasse pas 75 kg.

Moteurs, boîtes et ponts

Actuellement, c'est surtout l'addition des allégements obtenus sur la chaîne cinématique qui donne les résultats les plus importants.

Il y a plusieurs solutions pour gagner du poids sur les moteurs. La plus courante est celle qui a été adoptée par Mercedes qui a choisi de limiter le nombre des cylindres pour développer des motorisations 6 cylindres en V plutôt que les 8 cylindres qui sont plus lourds. Daf a préféré pousser la puissance de son moteur de 12,6 l de 480 ch à 530 ch ce qui lui permet, sur la dernière version du 95 XF, de remplacer le moteur Cummins de 14 l. Pour une puissance identique, cette opération lui permet d'économiser 400 kg. Avec les moteurs Cursor qui équipent les véhicules de la nouvelle génération, Iveco parvient à un résultat similaire et permet à des moteurs de 350 ch et de 400 ch d'obtenir des performances comparables à celles des moteurs plus puissants - mais aussi plus lourds - de la génération précédente.

Le gain de poids affiché par le Cursor 8 est de 250 kg. Il est moins sensible sur les véhicules dotés du Cursor 10 parce qu'ils sont équipés de freins à disques dont la masse est généralement plus importante que celle des freins à tambours.

Un handicap qui n'a pas échappé aux équipementiers. Les nouvelles générations de freins à disques seront de taille plus réduite pour peser moins lourd. Elles devraient même gagner du poids par rapport aux freins à tambours.

Revue de détails

Quelques centaines de kilos peuvent être également grappillées sur les autres composants. Si l'on prend l'exemple du Volvo FH 12, élu Camion de l'année 2000, il se distingue de la génération précédente par un châssis moins lourd. Longerons et traverses restent en acier riveté, mais le poids a été réduit de 105 kg. Le pont arrière est également plus léger. La suspension pneumatique arrière contribue aussi à cet allégement.

De la même manière, les Atego versions haut de gamme bénéficient d'un châssis-cabine allégé. A partir de 18 t, les porteurs sont dotés d'un réservoir en plastique et les tracteurs de réservoirs en alu pour remplacer l'inox. Toutes les versions à suspension acier sont équipées de ressorts paraboliques pour augmenter le confort, mais également pour réduire le poids mort. Sur les modèles qui sont dotés d'une suspension pneumatique, l'utilisation d'un bras de guidage a permis un gain de 75 kg.

A ces équipements de série, s'ajoutent - si l'on peut dire - des équipements optionnels qui permettent aux transporteurs d'augmenter leur performance économique : les boîtes de vitesses sur lesquelles les fabricants ont réussi à gagner quelques dizaines de kilos en utilisant l'aluminium ou des alliages. Ils peuvent également gagner du poids sur les sellettes d'attelage ou sur les roues en utilisant des jantes alu ce qui a pour effet d'alléger les essieux de près de 20 kg par roue.

Très gros efforts des carrossiers

Parallèlement aux constructeurs de véhicules-moteurs, les carrossiers font également des efforts considérables en matière d'allégement. C'est une tendance très nette dont on a pu voir la concrétisation lors des derniers salons mais qui, sauf à percer le secret des services d'études, pourrait rapidement trouver ses limites...

Des abaissements de poids symptomatiques sont apparus dans le secteur des citernes au Salon de Lyon, l'an dernier. Guhur, filiale du carrossier Maisonneuve présentait une citerne autoportante en alu de 38 000 l dont la tare avait été ramenée à 5 830 kg grâce, notamment, à une suspension pneumatique qui faisait gagner 150 kg. « Sur ce type de véhicules, on ne pourra pas aller beaucoup plus loin, souligne Christian Boulanger du Carcoserco. De nouvelles normes ont été fixées, notamment pour le transport de matières dangereuses, et on ne peut plus désormais gagner ni sur les épaisseurs ni sur les renforts ».

Au Salon de Courtrai, cette même tendance se confirmait sur les fourgons. Ainsi, le carrossier Stevens qui, dès 1997, avait présenté une semi-remorque plateau toute en matériaux composites, à l'exception des essieux, proposait lors de cette dernière manifestation, deux fourgons à toit découvrable totalement réalisés en composite et qui affichaient sur la bascule 1 500 kg de moins que le matériel équivalent construit en aluminium.

Moyersons, quant à lui, proposait une semi fourgon dont les parois latérales et le toit sont en composite. Réalisée en panneaux recouverts d'une pellicule de polyester, leur poids est de 8 kg au mètre carré, soit de moitié inférieur au poids du même modèle conçu en plywood traditionnel (16 kg/m2). Le gain de poids obtenu sur l'ensemble du véhicule est de 600 kg pour un coût supérieur de 16 %.

Plus léger encore, le Monopan de Wihag : constitué d'une ossature en polypropylène alvéolée de type nid d'abeilles sur laquelle sont ensuite thermocollés une feuille de polypropylène et un tissu de fibre de verre, il ne pèse que 4,5 kg au mètre carré et dispose, en outre, d'une forte capacité de résistance aux chocs.

Sur ce type de matériel, Christian Boulanger voit peu d'évolutions dans l'avenir « hormis le développement des parois en matériaux composites ou un allégement des ferrures. La norme 96-53, publiée il y a 5 ans, a permis une optimisation quasi annuelle de ces véhicules mais la courbe d'évolution est asymptotique... »

A Amsterdam, la frénésie d'amaigrissement touchait enfin les véhicules à parois coulissantes déjà particulièrement dépouillés. « Ce type de véhicule présente des caractéristiques d'évolution particulière, souligne Christian Boulanger. Le gain de poids que l'on avait obtenu grâce aux systèmes à parois souples est appelé à disparaître car, progressivement, à la demande des chargeurs qui veulent sécuriser davantage les marchandises, les carrossiers sont en train de les doubler de cloisons métalliques ».

Le carrossier Libner est le créateur de ce nouveau concept et, lors de la dernière Semaine Internationale du Transport et de la Logistique, il présentait la dernière née de sa série Euromust. Conçue entièrement en aluminium sur châssis Benalu, elle totalise 6 t. « Au fil des années, nous avons allégé nos véhicules de près d'une tonne et demie mais je crois que nous avons atteint le butoir, explique Joseph Libner. Il est désormais difficile d'alléger davantage les châssis, car ils atteignent leurs limites de torsion. Nous devons donc compenser ces torsions par plus de rigidité dans les superstructures. Or, comme on nous demande plus de hauteur pour transporter davantage de volume, il faut assurer plus de rigidité ce qui se traduit forcément par un supplément de poids ».

Pourtant, en abandonnant le châssis traditionnel au profit d'un cadre autoportant en aluminium fabriqué par sa filiale Benalu, General Trailer présentait des versions « light » de sa semi-remorque Maxi Speed au dernier Salon d'Amsterdam.

L'une, chaussée de pneumatiques conventionnels accusait 5,25 t sur la bascule, tandis que la version « ultra » équipée de pneumatiques 19.5 était ramenée à 4,95 t à vide. Ce qui permettait au carrossier-constructeur d'annoncer une charge utile de 34,05 t...

Au bénéfice des transporteurs du Benelux, est-il besoin de le rappeler ? Car ceux-ci, comme la plupart des opérateurs européens, s'ils sont tenus de respecter le PTAC de 40 t fixé réglementairement en trafic intra-communautaire, disposent de dérogations nationales qui leur permettent de circuler à 44 t et plus en trafic intérieur. Bridés par les 40 t qui leur laissent en moyenne 25 t de charge utile, les transporteurs français sont, de facto, beaucoup plus attentifs aux efforts qui sont faits en matière allégements.

Le poids du vide...

Les utilitaires légers n'échappent pas à la cure d'amaigrissement que subissent tous les véhicules de transport de marchandises. Mercedes travaille au développement d'un prototype conçu sur la base d'une carrosserie auto-portante en aluminium qui permettra d'abaisser le poids à vide de près de 500 kg. L'Altra, nom de ce véhicule, offrira une charge utile de 4 300 kg pour un PTAC de 7,5 t. A titre de comparaison, sur le Vito dont le PTAC est de 2,6 t, la charge utile optimisée est actuellement de 1 000 kg. Mercedes souligne que, sur des véhicules dont le PTAC se situe entre 6 t et 8 t, il s'agit là d'un gain considérable. Sur un véhicule dont le poids total sera multiplié par 3, celui de la charge payante sera 4 fois supérieur...

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