Après l'annonce, en début d'année, de la filialisation du Sernam (4 milliards de francs de chiffre d'affaires) par la SNCF, puis de sa prochaine intégration au sein du groupe Geodis (21 milliards de francs de chiffre d'affaires), lui-même contrôlé par la SNCF, La Poste vient de dévoiler un plan de rapprochement avec Geodis. Cette dernière opération prévoit la création d'un holding dont le capital serait détenu à 51 % par La Poste et 49 % par Geodis et qui chapeauterait les activités colis et logistique (COELO, soit environ 7 milliards de francs de chiffre d'affaires annuel) de La Poste. Celle-ci rachèterait simultanément la moitié des parts actuellement détenues par SNCF Participations dans le capital de Geodis, soit 24 % du capital.
Ces échanges d'assignats publics excluent toute initiative privée autre que l'éventuel soutien financier du marché boursier. S'ils aboutissent, ils visent à créer, d'après un communiqué commun de La Poste et de la SNCF, « le deuxième intervenant européen sur le marché du transport et de la logistique », avec un chiffre d'affaires annuel de 38 milliards de francs, derrière la Deutsche Post. En fait, l'Etat français vient de concéder à son administration le pouvoir de créer un gigantesque conglomérat national, avec une position dominante, voire monopolistique sur plusieurs spécialités du transport routier français. Et cet amas de services, de sociétés et de prises de participations diverses n'a d'européen que le volume de son chiffre d'affaires ou ses vélléités de partenariat et de développement. Il n'a même pas l'excuse de prétendre assumer une utopique mission de service public, puisqu'il vise le marché des entreprises. Finalement, cette alliance gauloise ne peut satisfaire, dans l'immédiat, que les ambitions de carrière d'une poignée de hauts fonctionnaires et l'orgueil national d'un pays qui refuse définitivement d'avoir confiance en l'initiative privée. Sauf lorsque celle-ci permet, par sa contribution fiscale, d'entretenir les privilèges d'une fonction publique toute puissante.