Les dispositions du décret « 35 heures » du 27 janvier 2000 (voir encadré ci-dessous) s'appliquent depuis le 1er février dans toutes les entreprises de transport routier de marchandises. Le ministère indique à ce titre que les transporteurs « devront veiller à prendre compte au plus tard sur la paie de mars, sauf motifs dûment justifiés, les conséquences immédiates du décret sur la rémunération des salariés, qu'il s'agisse du paiement des heures supplémentaires ou des heures de travail non consacrées à la conduite en cas de double équipage ». De même, « les repos compensateurs ou repos récupérateurs sont ouverts dans les conditions prévues par le décret sur la base des heures supplémentaires effectuées à compter du 1er février 2000 ».
Tolérance pour les moins de 20 salariés et le double équipage
Les entreprises employant jusqu'à 20 salariés et celles qui pratiquent le double équipage ont jusqu'au 1er juin 2000 pour se mettre en conformité avec les dispositions du décret. En ce qui concerne le double équipage, le délai d'adaptation ne concerne que le respect de la durée maximale du travail et non le paiement intégral des heures de travail effectif. Jusqu'au 1er juin, le ministère recommande aux contrôleurs de privilégier une mission de conseil. Les entreprises qui ne seraient pas prêtes avant cette date, notamment en raison d'une concertation avec les représentants du personnel, devront le signaler à l'inspecteur du travail territorialement compétent. « La compréhension de l'inspection du travail des transports est sans effet sur l'appréciation de la durée du temps de travail par le juge, notamment en cas d'accident », précise toutefois l'administration.
Décompte des horaires au-delà de la semaine
Les organisations professionnelles du transport routier attendaient sur ce point les précisions du ministère. Déception : la circulaire se borne en fait à reprendre les dispositions du décret. Ainsi, le décompte des temps de service sur une durée pouvant aller jusqu'à un an et respectant la moyenne hebdomadaire de 37 heures ou de 39 heures reste possible à condition que l'entreprise signe un accord sur la base de l'article L 212-8 du Code du travail. A défaut d'accord, le temps de service peut être décompté sur 2, 3, 4 semaines ou un mois sur autorisation de l'inspecteur du travail, après avis du comité d'entreprise ou des délégués de personnel. Des raisons techniques d'exploitation de l'entreprise devront justifier un tel calcul. Le transporteur devra donc décrire son organisation de travail et préciser que c'est bien sur celle-ci que les représentants du personnel ont été consultés. Le système de décompte reposera sur le principe déclaratif via un document type en cours de préparation. L'autorisation ne sera accordée qui si l'entreprise a mis en place des institutions représentatives du personnel ou s'est engagée à le faire avant le 1er juillet 2000.
Selon le ministère, les autorisations devraient pouvoir être délivrées dans un délai n'excédant pas un mois. Pour un traitement accéléré du dossier, l'entreprise devra préciser si elle a conclu un accord relatif à l'application du Contrat de progès ou/et si elle a obtenu le bénéfice d'un allégement des charges sociales. En cas de refus de l'inspection du travail, le transporteur pourra intenter un recours auprès du ministre des Transports. L'inspection du travail exercera sa mission de contrôle pour vérifier la véracité des informations délivrées par les entreprises. En cas d'inexactitude grave ou de changement substantiel de l'organisation du travail, l'autorisation pourra être retirée.
Incitations financières à la RTT
Les aides Aubry II (loi du 19 janvier 2000) sont ouvertes aux transporteurs employant des conducteurs grands routiers et « courte distance ». Pour en bénéficier, l'entreprise devra non seulement respecter les dispositions du décret, mais également conclure un accord paritaire (accord d'entreprise ou mandatement) prévoyant une clause de sauvegarde des emplois et une durée maximale de temps de service qui ne peut dépasser 208 heures par mois (48 heures par semaine) pour les grands routiers et 160 heures par mois (37 h par semaine) pour les « courtes distances ». En cas d'accord sur une durée de service de 35 heures, une « surprime » forfaitaire de 3 500 F sera accordée aux transporteurs employant grands routiers et « courte distance ».
Pour les « courtes distances », la durée de temps de service des conducteurs pourra être fixée au maximum à 180 heures dans le cadre d'accords conclus avant le 1er janvier 2002. Dans ce cas, l'aide sera limitée à une durée de 5 ans.
Parallèlement, le dispositif d'allégement des charges sociales sur les bas salaires, actuellement consenti aux entreprises appliquant le Contrat de progrès, est pérennisé. Il pourra bénéficier aux transporteurs qui, sans conclure d'accord de réduction du temps de travail, adoptent un temps de service de 220 heures maxi pour leurs conducteurs grands routiers. Pour bénéficier de cette ristourne dégressive , l'employeur doit respecter les dispositions sur la transparence des heures et des rémunérations (décret n° 83-40 du 26 janvier 1983 et accord du 23 novembre 1994) ainsi que celles du décret du 27 janvier 2000. Le régime des aides incitatives doit encore faire l'objet d'un texte complémentaire que cosigneront les ministères des Transports et du Travail. Lequel en précisera les modalités pratiques d'octroi.
Suivi d'application du décret
Un observatoire paritaire d'application du décret, placé sous l'égide de la Direction des transports terrestres, sera mis en place afin que l'État et les partenaires sociaux puissent s'assurer que ses dispositions sont correctement appliquées par les entreprises, notamment en ce qui concerne le temps de travail. La circulaire prévoit la mise en place de structures identiques sur le plan régional. Ces commissions de suivi se réuniront sous l'égide du Comité régional des transports et seront présidées par le directeur régional des transports, assisté du directeur régional de l'Equipement. Elles devront préparer un premier rapport pour le 15 juin 2000 comme contribution au bilan national qui doit être établi le 30 juin prochain.
Le temps de service au-delà duquel sont calculés les heures supplémentaires et les repos compensateurs ou récupérateurs est fixé à 39 heures par semaine pour les grands routiers et à 37 heures pour les autres personnels roulants (respectivement 169 heures et 160 heures mensuelles).
La durée hebdomadaire maximale de temps de service est quant à elle fixée à 56 heures pour les grands routiers et à 48 heures pour les « courte distance » sur une semaine isolée. Soit en moyenne sur un mois à 50 heures pour les grands routiers (ou 220 heures par mois) et à 48 heures pour les « courte distance » (ou 208 heures par mois).
Les heures effectuées au-delà des durées de temps de service sont des heures supplémentaires ouvrant droit, pour les grands routiers, au repos récupérateur ou au repos compensateur - selon le dispositif le plus favorable au salarié - et pour les autres conducteurs au repos compensateur. A défaut d'accord, le choix du dispositif le plus favorable au salarié s'établit à partir d'une simulation portant sur une période passée, suffisamment longue, par exemple l'année civile antérieure (ou les 12 derniers mois) et pour l'ensemble des conducteurs d'une entreprise, d'un établissement ou d'une catégorie homogène de salariés.
Les heures de travail comprises entre la 36e et la 37e (ou la 39e) heure incluse sont rémunérées comme des heures supplémentaires.
En cas de double équipage, le temps non consacré à la conduite est compté intégralement comme travail effectif. L'accompagnateur est donc rémunéré à 100 %.
Les infractions sont punies par des contraventions de 4e et 5e classe.