OTM : l'actualité démontre que la concurrence étrangère se renforce, or vous étiez l'un des représentants de la profession à redouter la mise en place du cabotage. Parce que dans votre région, sur la route de Cognac et de Bordeaux, les transporteurs étrangers qui venaient charger des vins et des spiritueux étaient déjà très nombreux. Ce phénomène s'est-il intensifié ?
M. V : je ne crois pas. Les transporteurs étrangers ne sont pas plus nombreux. Mais ce qui est certain, en revanche, c'est que les producteurs français ne sont pas plus sensibilisés aux problèmes de transport. Ces transporteurs étrangers venaient chercher des produits à la demande de leurs chargeurs parce que nos producteurs ont prix l'habitude de se désintéresser des transports et de vendre départ cave. Alors que les chargeurs d'Europe du Nord et même les Italiens privilégient leurs transporteurs et le pavillon national, ce n'est généralement pas le cas en France et c'est dommageable.
OTM : y a-t-il des sujets spécifiques ayant trait à la profession qui vous tenaient et qui vous tiennent encore particulièrement à coeur ?
M. V : il y a deux choses et elles sont dans le prolongement l'une de l'autre. Elles ont trait à la formation et à la reconnaissance du métier de conducteur routier.
Tout d'abord, je crois que la profession peut être très fière de tous les efforts qu'elle a pu accomplir en matière de formation pour les conducteurs.
Parallèlement, on pourrait envisager la création d'un statut spécifique au personnel roulant par la délivrance d'une carte professionnelle, assortie d'une obligation de formation, qui serait commune, à la fois, aux conducteurs qui opèrent en transport public et dans le transport pour compte propre.
Cela procède toujours du même raisonnement : sous une étiquette commune, le transport routier englobe de très nombreux métiers différents qui n'ont pas tous les mêmes rythmes de travail et qu'on ne peut traiter de manière uniforme. Comme je l'ai déjà exprimé, on peut distinguer deux grandes catégories de salariés : les sédentaires auxquels j'assimile tous les conducteurs livreurs, qui partent de chez eux le matin et qui rentrent le soir, et dont on peut organiser le temps de travail pendant la journée. Et puis, il y a les nomades. Ce sont les chauffeurs grands routiers qui effectuent des missions de plusieurs jours, qui ont opté pour ce métier par choix - quelles qu'en soient les motivations - et qui, dans le cadre de l'opération qui leur est confiée, ne dépendent que d'eux-mêmes et doivent organiser leur travail en fonction des contraintes réglementaires ou des aléas qu'ils rencontrent. Il s'agit de métiers différents.
OTM : cette démarche s'apparente à celle des syndicats qui, dans le cadre de la révision de la convention collective, suggèrent de créer des qualifications et une classification des conducteurs ?
M. V : je n'ai jamais dit que les organisations syndicales avaient forcément tort !
OTM : à la présidence de la Carcept, vous avez eu à gérer les dossiers de congés de fin d'activité. Pouvez-vous dresser un bilan et, votre mandat arrivant à son terme, serez-vous candidat à votre propre succession ?
M. V : la réponse à cette question ne m'appartient pas. Je préside ce que je considère être un outil de la profession et je m'en remets à la décision des instances de la FNTR et de ceux qui m'ont mandaté. Ce que je constate, en revanche, c'est qu'il y a de moins en moins de chefs d'entreprises disponibles et volontaires pour occuper des postes à responsabilité dans les organisations.
D'autre part, en ce qui concerne le congé de fin d'activité qui a été mis en place à la suite des accords de 1996, actuellement, 3 300 salariés ont bénéficié de ces dispositions et ont quitté la profession. Je pense, personnellement, que nous n'irons pas au delà de 5 000 personnes. Par ailleurs, l'analyse statistique des dossiers que nous avons traités va à l'encontre de ce qu'ont affirmé certaines organisations syndicales en matière de salaire. La rémunération moyenne des retraites qui sont versées s'élève à 8 000 F ce qui tend à démontrer que les salaires moyens en période d'activité étaient au moins égaux à 10 000 F.