Serait-ce une victoire pour les entreprises de transport routier françaises ? Toujours est-il que, par l'intermédiaire de leurs organisations professionnelles, dans un communiqué du 12 janvier, elles estiment que les engagements obtenus auprès du ministère le même jour «correspondent aux attentes fortement exprimées par la profession, notamment en matière de 35 heures». Elles peuvent en tout cas se satisfaire d'avoir réussi une manifestation exemplaire à la fois dans son organisation et dans son état d'esprit. Les syndicats de salariés, si prompts à dénoncer «l'irresponsabilité patronale», pourraient en prendre de la graine, eux dont les troupes se sont trop souvent laissées aller à pratiquer la prise d'otage du pays, le racket d'opinion publique ou la terreur de la pénurie de carburant.
Des débordements dont on peut espérer qu'ils ne se manifesteront pas le 31 janvier prochain. Date à laquelle les syndicats de salariés maintenaient l'organisation d'une action unitaire, avant de rencontrer, dans la soirée du 12, Jean-Claude Gayssot. Le ministre des Transports espérait sans doute les convaincre de renoncer à leur action, pour mieux suivre la voie d'un progrès social raisonné, telle qu'elle est indiquée par les entreprises. Celles-ci, en acceptant la promesse d'un décret fixant un maximum mensuel de 220 heures de service pour les conducteurs zone longue (208 heures en zone courte), moyennant un assouplissement des dispositions en matière de repos compensateurs, mais sans aucune garantie quant à une hypothétique harmonisation européenne, ont fait preuve de bonne volonté. Cela vaut bien, de la part de leurs interlocuteurs syndicaux, le renoncement à la mise en oeuvre dogmatique des 35 heures. Surtout quand ils y sont invités par un ministre de moins en moins communiste et de plus en plus réaliste.