Distribution de tracts, barrages filtrants, opérations « escargot » aux frontières et dans les principaux ports, les syndicats européens de salariés du transport routier se sont une nouvelle fois mobilisés pour demander une réduction du temps de travail des conducteurs. Sous le slogan « la fatigue tue », la journée du 5 octobre était organisée conjointement par la Fédération internationale du transport (ITF) et la Fédération européenne des Transports (ETF), à la veille d'un Conseil des ministres européens des Transports au Luxembourg. Au programme de cette réunion : le temps de travail des chauffeurs et l'harmonisation européenne des conditions de circulation des poids lourds le week-end.
Un dernier thème qui a mobilisé les organisations syndicales françaises, bien plus présentes sur le terrain que leurs homologues européennes. « Ce projet calamiteux, concocté par la présidence finlandaise et visant à limiter les interdictions de circuler au dimanche entre 7 h et 22 h sur les réseaux transeuropéens, n'est pas nouveau. Il ressurgit périodiquement. Nous souhaitons son abandon. Nous demandons en outre la suppression des dérogations accordées aux véhicules frigorifiques », explique Joël Le Coq, secrétaire général de la Branche Route CFDT. Toutefois, il reconnaît que, face aux réactions allemandes, autrichiennes, françaises et dans une moindre mesure italiennes, le projet finlandais a très peu de chance d'aboutir. Ce qu'admettait Loyola de Palacio, vice-présidente de la Commission européenne chargée des transports, le 1er octobre : « Les quinze pays de l'Union européenne auront beaucoup de difficultés à trouver un compromis. » Selon la commissaire espagnole, deux autres mesures du projet pourraient être plus acceptables : la mise en place d'un système européen centralisé de notification des interdictions et l'harmonisation des types de poids lourds et marchandises exemptés d'interdictions.
« Projet inacceptable ». Concernant le temps de travail des conducteurs routiers, mot d'ordre de l'Euro Action, les syndicats français ont réitéré leur attachement au projet de directive européenne. Celui-ci prévoit de limiter la durée hebdomadaire du travail (conduite et autres temps) à 48 heures en moyenne sur 4 mois avec un maximum de 60 heures sur une semaine isolée. Fruit d'un compromis entre les ministres des Transports et le Parlement européen sur la base des négociations paritaires, « ce projet n'est pas pleinement satisfaisant mais peut permettre un certain équilibre », indique Joël Le Coq. Faute de consensus entre les ministres européens, une deuxième version a été élaborée sous présidence allemande en juin dernier. Or, ce projet est jugé inacceptable par les syndicalistes français. «Il conduit à limiter le temps hebdomadaire maximal à 78 heures, en calculant la moyenne hebdomadaire sur un an au lieu de quatre mois. Ce qui interdit de fait tout contrôle, et exclut les temps d'attente du temps de travail », déplore Joël Le Coq. Autre point de blocage : le statut des conducteurs non salariés que certains États voudraient exclure du champ de la réglementation. Reste à connaître les intentions de la présidence finlandaise à ce sujet. Le Conseil des ministres du Transports du 6 octobre, date de bouclage de ce numéro, permettra peut-être d'y voir plus clair. Mais, il se murmure déjà que le projet de directive européenne sur le temps de travail n'aboutirait pas avant l'été prochain, lorsque la France présidera aux destinées européennes.
Selon la CFDT, l'Euro Action a donné lieu à une vingtaine de barrages en France. Avec quelques points chauds à Clermont-Ferrand, Reims, Strasbourg, Biriatou, Le Perthus. En revanche, l'opération n'a pas mobilisé les autres organisations européennes. Au Royaume-Uni, un meeting syndical à Douvres a réuni quelque 300 chauffeurs routiers de poids lourds... et de bus. Au Portugal, le syndicat Festru a organisé une action de protestation à Vilar Formoso, ville frontalière avec l'Espagne. En Suède et en Italie, la journée s'est résumée à la seule distribution de tracts sur les aires d'autoroute. En Autriche, les syndicats ont bloqué pendant quelques heures le poste frontière austro-slovène de Berg. Quant aux Allemands, ils ont concentré leur action aux frontières françaises.