Le groupe suisse Danzas et sa nouvelle maison-mère Deutsche Post ont annoncé le prochain rachat du Suédois ASG. Celui-ci figure parmi les onze premiers groupes européens de transport routier avec près de 9 milliards de francs (12 milliards de couronnes suédoises) de chiffre d'affaires en 1998. Pour ce même exercice, son résultat d'exploitation atteint 90,3 millions de francs et son bénéfice avant impôt 129,2 MF. Actif sur les marchés de l'aérien/maritime (1,5 MdF de CA) et de la logistique (704 MF de CA), ASG est essentiellement axé sur le transport routier qui génère une activité de 6,2 MdF. Ses spécialités : le lot complet/partiel. Son champ d'action : la Scandinavie mais également les trafics entre cette région et l'Europe continentale.
Évaluée à 2,4 MdF, l'OPA lancée par Danzas Sweden, la filiale suédoise du groupe suisse, porte sur 52,4 % des droits de vote d'ASG qui est cotée en bourse. Les repreneurs ont assuré que l'entreprise conserverait son identité et que sa direction resterait en place. ASG est appelé à constituer, au sein de Danzas, une nouvelle division Scandinavie/Baltique. Ces régions échappaient encore à l'empire que se construit la poste allemande en Europe. « Avec l'acquisition d'ASG, nous étendons notre couverture géographique et continuons de consolider notre leadership sur le marché », déclare Peter Wagner, président de Danzas et futur responsable de la division logistique de DP.
45 MdF de CA. Cette branche, constituée depuis la reprise de Danzas et autour de ce groupe, pèsera plus de 45 MdF de CA dont quelque 30 MdF sur le marché du transport terrestre et de la logistique grâce au rachat d'ASG et à celui du Néerlandais Nedlloyd European Transport and Distribution annoncé le mois dernier (cf. L'OT n° 2024). Ce dernier affiche un chiffre d'affaires de 9,5 MdF réparti entre différentes sociétés dont certaines - Unitrans, Districenters, Fashion Service, Flowmasters, Gerlach et Chemicals - seront intégrées au sein de Danzas Eurocargo tandis que les autres - Van Gend Loos et Selekvracht - rejoindront directement Deutsche Post. Les acquisitions de Nedlloyd et d'ASG restent soumises à l'accord de la Commission européenne. Laquelle ne devrait pas faire plus de difficultés sur ces opérations que sur les précédentes emplettes réalisées par la Deutsche Post.
La France touchée. Avec Nedlloyd, Danzas/Deutsche Post a repris un actionnaire et un partenaire essentiel du groupe français Dubois en Europe. Avec ASG, il s'offre le nouveau correspondant d'Heppner en Scandinavie. Annoncé en janvier dernier, l'accord entre le groupe suédois et le messager français est effectif depuis le 1er avril. « L'annonce de l'OPA intervient au moment où les volumes d'échanges entre le groupe Heppner et ASG sont en phase de démarrage, et cette coopération se poursuit conformément au contrat signé entre les deux groupes. Le réseau que nous construisons en Europe ne sera pas remis en cause par ces changements, bien au contraire. Nos partenaires européens (alias notamment Hellman en Allemagne du Nord, Creschmar en Rhénanie et Gebrüder Weiss en Autriche. Ndlr.) et nous même profitons de cette information pour afficher une très grande volonté de tisser un solide maillage européen au service de nos clients. Pour ce qui concerne Heppner, nos ambitions sur les pays du Nord ne sont en rien modifiées », assure Jean-Claude Stumpf, directeur général international du groupe. Difficile toutefois d'imaginer que l'accord conclu pour cinq ans avec ASG aille à son terme. Comment les Allemands pourraient-ils, en effet, rester alliés à la filiale de Deutsche Post, groupe public, qui vient opérer sur leur marché? Comment Heppner pourrait-il durablement collaborer avec une division de Danzas dont il est directement concurrent dans l'Hexagone? Avant de s'associer avec le groupe alsacien, ASG fut partenaire du Vendéen Graveleau, ce juste après avoir travaillé pendant plusieurs années avec... Danzas. A la suite de leur rupture, chacun des deux partenaires a noué de nouvelles alliances. C'est ainsi que Danzas s'est étroitement lié dans le secteur du groupage et du lot partiel à DFDS, ex membre du réseau Team... sur la Scandinavie. Qu'adviendra-t-il de cette union après le rachat d'ASG ? De Bâle, la direction du groupe suisse répond qu'elle réfléchit à la question.
> Danzas (filiale de Deutsche Post depuis mars dermier) a réalisé un chiffre d'affaires net de 29,5 milliards de francs en 1998 pour 250 millions de francs de résultat d'exploitation et 229 MF de bénéfice net.
> Le groupe suisse vient de lancer une OPA, évaluée à 2,4 MdF, sur le Suédois ASG qui réalise 9 MdF de CA dont 6,2 MdF en transport routier.
> ASG est, depuis le 1er avril dernier, partenaire d'Heppner sur la France après avoir été celui de Graveleau.
> La reprise d'ASG portera à plus de 50 MdF le CA cumulé des activités transport et logistique de Deutsche Post.
En 1998, sur un chiffre d'affaires total de 96 MdF, l'activité colis de Deutsche Post ne pèse que 15 MdF. La donne devrait changer pour 1999. Au gré des emplettes réalisées depuis décembre dernier, c'est plus de 50 MdF de CA supplémentaires que s'offre la poste allemande sur le marché du transport. Danzas, Nedlloyd et ASG totalisent à eux seuls 48 MdF. Viennent s'y ajouter le 1,2 MdF du Français Ducros Services Rapides, les 600 MF de l'Italien MIT, les 850 MF du Suisse Qualipac et les 500 MF de l'Allemand ITG. DP est également actionnaire à 50 % de Securicor Distribution (2,9 MdF de CA), 25 % de DHL (7 MdF) et de Trans-O-Flex (2 MdF). Au gré de ses acquisitions, le groupe postal allemand a gagné tous les secteurs du transport et de la logistique du petit colis au maritime en passant par la messagerie traditionnelle et le transport de lots. Il a conquis tous les régions européennes à l'ouest, où il couvre une douzaine de pays, comme à l'est, directement avec Servico en Pologne ou indirectement avec les implantations de ses nouvelles filiales.
Le groupe Danzas a réalisé, sur l'exercice 1998, un chiffre d'affaires net de 19,76 milliards de francs français (4,84 milliards de francs suisses) en hausse de 4,5 % par rapport à 1997. Son résultat d'exploitation fait un bond de 74,3 % pour atteindre 250,1 MF. Son résultat net progresse de 55,6 % à 229,1 MF et représente 1,2 % du CA. Un ratio que Danzas espère porter d'ici 5 ans à 3 ou 4 % du CA. Le groupe suisse attribue notamment l'amélioration de ses comptes à la restructuration en mars 1998 de ses activités en quatre « business units ». C'est la division « Intercontinental » (activités internationales par air et par mer) qui enregistre le plus fort bénéfice d'exploitation : 213,2 MF (en progression de 16 %) pour un chiffre d'affaires net de 7,1 milliards de francs en hausse de 4 %. Elle représente 31,3 % de la marge brute d'exploitation totale. Malgré la crise asiatique, le trafic aérien a augmenté de 1,3 % et le maritime de 7,4 %. Les deux unités logistiques créées en avril 1998, « Consumer Solutions » (produits de grande consommation) et « Industry Solutions » (prestations pour les secteurs industriels), restent stables en terme de marge d'exploitation (respectivement 317 et 68 MF). En 1998, la première de ces branches a généré un CA de 3,9 milliards de francs et un résultat d'exploitation de 32,8 MF. Elle représente 21,1 % de la marge brute d'exploitation à 1,29 milliards de francs. « Industry Solutions » enregistre un CA de 401,8 MF et une marge brute d'exploitation de 278,8 MF soit 4,5 % de la marge brute totale et un résultat net de 8,2 MF.
La division « Eurocargo », (transport terrestre européen) reste la branche d'activités la plus importante du groupe suisse avec un CA de 8,35 milliards de francs contre 7,8 MdF en 1997, soit une progression de 6 %. Avec une marge brute d'exploitation de 2,65 milliards de francs, elle génère 43,1 % de la marge brute d'exploitation totale. En revanche, les bénéfices d'exploitation qui s'élèvent à 36,9 MF ne représentent que 12,6 % des résultats du groupe. Au sein de cette division, l'activité groupage a progressé de 9 % à 4,1 milliards de francs et le lot complet de 20 % à 2,4 milliards de francs. Ces résultats s'expliquent en partie par l'arrivée de nouveaux clients. Novartis Nutrition a confié à Danzas son trafic européen, BMW le transport de lots complets et Schindler France son fret international.
En 1998, la France reste la « fille aînée » du groupe Suisse. Avec une marge brute d'exploitation de 1,78 milliards de francs, le marché français représente 29 % de la marge brute d'exploitation totale. Vient ensuite le marché allemand avec 19 %. Pour 1999, Danzas ambitionnait de porter son chiffre d'affaires brut de 28,6 MdF à 36,8 MdF grâce notamment à la reprise de Nedlloyd. Mais c'était quelques jours avant qu'il ne lance son OPA sur ASG. Cette nouvelle acquisition devrait encore accroître ses appétits.
Régis Gasquet