Sur le papier, l'accord entre Renault VI et Nissan Diesel donne naissance au second constructeur mondial de véhicules industriels de plus de 5 t. La production des deux réunis atteint, pour 1998, près de 120 000 unités dont 90 750 pour le Français et 27 584 pour le Japonais. La filiale véhicules industriels de Nissan Motor a réalisé sur l'exercice 1998-1999, clos le 31 mars dernier, un CA de 11,5 milliards de francs et un résultat déficitaire de 700 MF. Au Japon, avec près de 19 % du marché national et 5,6 % du marché mondial, il est le plus petit des quatre constructeurs de poids lourds après Hino, groupe Toyota, Isuzu, groupe General Motors et Mitsubishi Motors. Nissan Diesel emploie 16 000 personnes et dispose de 76 distributeurs dans 69 pays. De son côté, en 1998, Renault VI a enregistré un CA de 40,5 milliards de francs en hausse de 18 % et un résultat de 859 MF. Pour 465 MF, la maison mère de la marque au losange a acquis 22,5 % de Nissan Diesel à égalité avec Nissan Motor. Le reste du capital est entre les mains de nombreuses banques et compagnies d'assurance japonaises. Pour l'heure, le rôle des deux principaux actionnaires au sein de cette nouvelle entité n'est pas clairement défini. Jusqu'au 10 mars, le groupe Daimler-Chrysler avait l'exclusivité de regard sur le dossier. Jugeant la dette trop importante et les prévisions de résultat du Nippon trop faibles, le leader mondial du poids lourd a finalement décidé d'abandonner les discussions. Si on en croit les conclusions de Daimler-Benz, cette alliance semble risquée pour le constructeur français. Pour la première fois depuis longtemps, RVI a renoué cette année avec les profits. Mais, l'endettement financier du groupe s'élève encore aujourd'hui à 2,25 milliards de francs. Peu après la signature de ce contrat, Shémaya Levy, directeur général adjoint de Renault, n'écartait pas la possibilité de cession de Nissan Diesel. Toutefois, selon l'agence de presse japonaise Jiji Newswire, renseignée le 6 avril auprès de la direction de Tokyo, un Français de RVI devrait siéger dans le conseil d'administration de Nissan Diesel à partir du mois de juin.
Les apports de Nissan. Dans la perspective d'un partenariat durable entre Renault VI et Nissan Diesel, le Français pourrait bénéficier de l'expérience du Nippon. Des accords entre Daimler-Benz et Nissan Diesel prévoyaient la construction et la commercialisation d'un petit utilitaire de 3 t à 9 t sur les marchés émergents. Ils viennent d'être dénoncés, avoue Eckhard Zanger, responsable de la communication du groupe allemand. Ces projets pourraient donc être repris avec Renault, très actif sur ce segment avec le Master et le Messenger. Le constructeur français pourrait aussi exploiter les « archives » du Nippon, notamment dans le domaine des moteurs. En 1991, Nissan Diesel a débuté un programme d'étude de 5 ans avec le constructeur italien Iveco afin de développer conjointement une nouvelle motorisation de 9,5 l.
Plus performante, plus légère, elle devait-être à la base des familles de moteurs utilisés au début du XXIe siècle dans les deux marques. Chez Iveco, ces recherches ont donné naissance au Cursor 8 qui a été présenté en 1998 et aux Cursor 10 et 13 qui seront dévoilés dans les mois à venir.
En revanche, le Japonais n'a toujours pas commercialisé les fruits de ce partenariat. De son côté, Renault VI coopère avec le Finlandais Sisu en lui fournissant cabines et moteurs 12 l en échange d'un accord de distribution. Le Français conçoit également avec Daf Trucks (groupe Paccar) les cabines d'une future gamme de 6 t à 19 t. Pour son activité autobus et autocars, Renault VI a créé une entreprise commune, Iris.Bus, avec l'Italien Iveco. En revanche, dans le domaine des moteurs, Renault VI ne bénéficie d'aucun partenariat.
Un pied sur le marché asiatique. Grâce à Nissan, Renault VI peut aussi envisager de pénétrer le marché asiatique. Le constructeur japonais dispose de plusieurs implantations en Asie du Sud-Est. L'année dernière, il a entamé, sous forme de joint-venture avec un partenaire local, la production de camions et de bus en Chine. A l'inverse, Nissan ne devrait guère concurrencer Renault en Europe. Le Japonais présente une gamme généraliste qui va du petit utilitaire au poids lourd de 40 t. en passant par les autobus et les autocars. Mais, les véhicules de plus de 15 t ne sont pas commercialisés sur le Vieux Continent. La part de marché européenne de Nissan est infime sur les créneaux du VUL et du véhicule industriel léger avec les Cabstar E et Eco-T, lancés en 1999. Ces derniers, offrant des PTC de 2,8 t à 15 t, sont produits en Espagne où siège Nissan Europe, filiale à 100 % de Nissan Motor. En 1998, Nissan Europe annonçait la création de sa filiale Nissan VI. En France, cette entité est en train de construire son réseau et espère avoir 20 distributeurs à la fin de l'année. Face à cela, Renault VI dispose d'une gamme complète allant du Trafic de moins de 3,5 t de PTC au Premium, le tracteur de 40 t et d'un réseau européen très structuré.
> Renault maison mère a acquis 22,5 % du capital de Nissan Diesel à égalité avec Nissan Motors. Cette alliance donne naissance au second constructeur mondial de poids lourds.
> Selon Eckhard Zanger, responsable de la communication chez Daimler-Benz, le groupe allemand a abandonné ses projets de développement d'un véhicule utilitaire de 3 t à 9 t pour les marchés émergents.
> Nissan Diesel a participé aux études qui ont donné naissance chez Iveco à une nouvelle génération de moteur, le Cursor.