Retour vers le futur

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En reprenant Boc DS (ex-TLO) début janvier, Jacques Leroy, P-dg des Transports Lebreton, a acquis la société que son père avait créée après-guerre. Pour le chef d'entreprise rennais, c'est surtout l'occasion de relever un dernier défi : redresser une entreprise de transport frigorifique, qui a accusé l'an dernier 10 MF de pertes, pour en faire un prestataire logistique rentable.

« La reprise de Boc DS n'a pas été dictée par des raisons personnelles. Elle repose, bien au contraire, sur un véritable projet d'entreprise », prévient d'emblée Jacques Leroy, P-dg de Leroy Logistique. Le 15 janvier dernier, le dirigeant rennais a fait l'acquisition de Boc DS (ex-Transports Logistique Organisation), qu'il vient de rebaptiser Leroy Logistique. Une entreprise créée par son père quarante sept ans plus tôt (voir encadré). Implantée à Vern-sur-Seiche, dans la banlieue de Rennes, l'entreprise est spécialisée dans le transport frigorifique, le fret industriel et l'entreposage. En 1998, alors sous le giron du Britannique Boc, un major du gaz industriel, elle a réalisé 204,7 MF de chiffre d'affaires avec 260 salariés et 200 cartes grises. Dans le même temps, le transporteur a accusé un déficit de 10 MF.

Inertie de l'actionnaire. « Le rachat de Boc DS, explique Jacques Leroy, relève du challenge médité. Il n'est jamais évident de redresser une entreprise en difficulté. Mais, Boc DS présente de nombreux atouts : propriétaire de son parc immobilier et de ses véhicules, elle possède neuf implantations régionales (Rennes, Paris, Lille, Strasbourg, Saint-Dié, Die, Lyon, Cavaillon et Bordeaux) et 100 moteurs. Son endettement est quasi nul, sa clientèle est intéressante et les salariés, que nous avons tous intégrés à Leroy Logistique, étaient parties prenantes ».

Lorsque Jacques Leroy et son associé, Daniel Gautier, un investisseur rennais, étudient le dossier de reprise, le constat est simple : Boc DS n'a jamais disposé des moyens de son ambition. « Les expertises que nous avons menées nous ont permis de déceler plusieurs dysfonctionnements. Sans doute, étaient-ils à l'origine des déboires de l'entreprise », explique Jacques Leroy. Pêle-mêle, le responsable cite l'inertie de l'actionnaire, l'absence de direction générale, une informatique restée à l'âge de pierre, une exploitation avançant en ordre dispersé. Résultat : les clients commençaient à quitter le navire et plusieurs trafics étaient structurellement déficitaires.

Trafics parasites. La réaction de la nouvelle équipe dirigeante est alors immédiate, avec l'élaboration d'un plan stratégique sur un an. Dans un premier temps, une enveloppe de 30 millions de francs est dégagée pour renouveler le parc de véhicules (acquisition de 50 tracteurs et de 30 semi). Elle sert également à muscler l'informatique de l'entreprise via les systèmes Eurotrans et Renoir en attendant l'arrivée, en juin prochain, de l'EDI et de la traçabilité des colis. « D'ores et déjà, les neuf agences sont câblées. Elles seront prochainement reliées entre elles. L'exploitation est désormais pilotée depuis le siège de Rennes. Auparavant, huit salariés y travaillaient. Ils s'occupaient de tout et de rien à la fois. Aujourd'hui, deux personnes sont chargées de surveiller le respect de la réglementation sociale, deux s'occupent des départs et deux autres des retours. Les exploitants travaillent ainsi plus efficacement, ils connaissent les tournées et les clients qui s'y rattachent », souligne Franck Leroy, en charge de l'exploitation. Autres moeurs, les agences sont transformées en centres de profit. D'un point de vue marketing, une charte graphique, ainsi qu'une nouvelle plaquette commerciale, accompagne le changement d'appellation de l'entreprise.

Repositionnement. Les responsables traquent également les gains de productivité : des lignes sont supprimées. « Le chiffre d'affaires 1999 tombera en deçà des 200 MF en raison de la suppression de trafics parasites. » Une coupe sombre qui s'avère payante puisque Leroy Logistique escompte, dès cet automne, équilibrer ses comptes. « Le prix de revient était auparavant supérieur au prix de vente. Aujourd'hui, c'est le contraire avec, à la clé, un écart de 50 centimes. Nos véhicules parcourant 10 millions de kilomètres par an, la marge brute est facile à calculer », explique Jacques Leroy.

Mais, le grand chantier de Leroy Logistique reste le repositionnement futur de l'entreprise. Aujourd'hui, le transport frigorifique génère encore 70 % du chiffre d'affaires contre 20 % pour les prestations logistiques - pour le compte notamment de Marie-Brizard, Peaudouce, Vins de Bordeaux ou encore Beghin Say - et 10 % pour l'affrètement (lots complets et lots partiels de produits secs à température ambiante). L'entreprise s'est donnée quatre ans pour opérer un basculement de son chiffre d'affaires en faveur de la logistique. « Le salut des transporteurs passe aujourd'hui par cette activité. La valeur ajoutée est là. Et, je ne parle pas des nouvelles technologies. Car, le plus performant sera celui qui maîtrisera les flux d'informations. Dans ce contexte, le transport n'est qu'un complément », explique Jacques Leroy. Une cible est déjà identifiée : les pme industrielles régionales qui ont un besoin de stockage et de préparation de commandes pour des prestations personnalisées. « Les grands prestataires logistiques sont très forts dès lors qu'il s'agit de répondre à des appels d'offre de taille européenne pour de très grandes entreprises. En revanche, lorsque ces mêmes groupes assurent la logistique de plus petites entités à des échelles moins importantes, le résultat tourne souvent à la catastrophe. C'est l'éternel besoin de proximité des clients. De plus, nous ne sommes pas sur le même créneau que des prestataires comme Hays ou même Stef-TFE qui assurent une distribution fine. Nous nous intéressons à la logistique industrielle amont », avance Serge Rambault, directeur général de Leroy Logistique et ancien cadre de Grimaud, de Prost et d'UPS. Autre objectif : développer le transport frigorifique au départ de la Bretagne avec la création de nouveaux services. Pour asseoir ses ambitions, Leroy Logistique compte, dès cette année, renforcer ses positions régionales. « Des opérations de croissance externe sont envisagées. Nous avons quelques pistes », souffle même Jacques Leroy.

Lebreton, Transparc, Socorège

Outre Leroy Logistique, Jacques Leroy est aux commandes de trois autres entreprises, toutes installées à proximité de Rennes. « Elles n'ont aucun lien juridique entre elles », précise le dirigeant. La plus ancienne est Transparc. Créée en 1979, spécialisée dans le transport de lots et l'affrètement, elle affiche un chiffre d'affaires de 15 MF. Les Transports Lebreton, société acquise en 1987, est tournée vers le transport frigorifique (produits frais et laitiers). Elle réalise un chiffre d'affaires de 35 MF avec 30 véhicules. La troisième société a été reprise en 1989 : Les Entrepôts de Socorège est une entité exclusivement dédiée à l'entreposage. Avec ses 30 000 m2 de surface de stockage, elle dégage un chiffre d'affaires de 7 MF grâce, notamment, à des opérations de logistique intégrée pour le compte des fournisseurs de l'usine rennaise de Citroën.

Comment boucler la boucle
Des Transports Leroy à Leroy Logistique

La création de Leroy Logistique, suite au rachat de Boc DS, c'est un peu le come-back de Jacques Leroy. Rapide retour en arrière. En 1947, le père de Jacques Leroy fonde les Transports Leroy. Jacques Leroy quitte l'entreprise paternelle en 1979 pour créer Transparc et plus tard les Transports Lebreton. En 1984, la société Transports Leroy est reprise par des cadres de l'entreprise qui la rebaptisent Transports Leroy Organisation. En 1987, la pme change une nouvelle fois d'identité pour se nommer Transports Logistique Organisation (TLO). En 1994, le groupe britannique BOC, un des géants mondial du gaz industriel, souhaite se diversifier dans le transport et la logistique en France. En Angleterre, il assure déjà une partie de la logistique de Mark & Spencer qu'il compte développer dans l'Hexagone. Cette année là, à la SITL où TLO tient stand - pour une raison qui échappe encore aux responsables de l'époque - Boc jette son dévolu sur l'entreprise rennaise qu'il acquiert dans la foulée. En 1997, les Anglais la rebaptisent Boc Distribution Services. Coté à la bourse de Londres et de New York, présent dans plus de 60 pays à travers le monde, le groupe Boc affiche un chiffre d'affaires de 40 MdF. Affecté par la crise asiatique, confronté à des difficultés financières, il décide de se recentrer sur son coeur de métier. Fin 1998, Jacques Leroy fait partie des repreneurs potentiels « en compagnie de quelques grands noms du transport routier ». La boucle est bouclée le 15 janvier 1998, date officielle du rachat de Boc DS par Jacques Leroy. Dans cette opération, il est épaulé par Daniel Gautier, un investisseur rennais. Deux cadres de Boc DS, sont également associés au projet de reprise : Serge Rambault, le directeur général et Pierre Pougnand, directeur commercial. Ces deux derniers possèdent aujourd'hui 10 % chacun du capital de Leroy Logistique, le reste étant détenu par Jacques Leroy (40 %) et Daniel Gautier (40 %).

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