Le groupe Charles-André (26) vient d'acquérir l'activité de transport routier de produits pulvérulents du groupe Aubry (71). Cette transaction, qui porte sur environ 450 ensembles semi-remorques réunis au sein de deux sociétés, Aubry Silos et René Sevenier, permet à Charles-André de se placer comme un des deux principaux acteurs de cette spécialité en France. Son principal concurrent est Norbert Dentressangle, qui avait racheté en juin dernier les 300 citernes de Seroul. La reprise des silos Aubry consacre ainsi la concentration du transport routier zone longue de produits pulvérulents entre les mains de deux groupes. Peut-être trois si on prend en considération Vos Eurosilo, filiale française du groupe néerlandais Harry Vos créée pour reprendre en setembre 1998 les citernes du groupe stéphanois Darfeuille. En multipliant les rachats, ce dernier avait tenté de se placer parmi les leaders français du « pulvé ». Une stratégie trop tardive et trop coûteuse, qui a failli entraîner Darfeuille au dépôt de bilan.
Malgré la vente de ses silos, le groupe Aubry se trouve aujourd'hui confronté au même danger. Il vient d'être placé sous mandataire ad hoc. Pour éviter le redressement judiciaire, Patrick Aubry, président du groupe depuis l'été 1998, pourrait être contraint de céder une des deux activités qui lui restent : le transport de lots complets en camions remorques et semi-remorques ou les concessions Renault VI qu'il possède dans sa région. Quoi qu'il arrive, cela signera la fin d'un des derniers grands groupes français issus de l'après-guerre, souffrant de (qui s'éteint faute d'avoir su) n'avoir pas su s'adapter aux très exigentes contraintes de la libéralisation du secteur. Celle-ci, ajoutée aux pressions fiscales et sociales, dans un contexte économique déflationniste, favorise une concentration croissante des entreprises, au niveau français et européen. Certains chargeurs, entraînés dans les logiques financières de la monnaie unique européenne et de la mondialisation des échanges, ne sont pas étrangers à cette évolution. Le pétrolier Shell, qui contrôle 10 % du capital d'Aubry, en fait partie.