Une augmentation de tarif prévue par contrat

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Action en justice, rapports dénonçant l’abus des augmentations de tarifs des péages autoroutiers : rien n’y fait, la hausse sera appliquée cette année ! En effet, elle est prévue dans les accords que l’État a conclu les sociétés concessionnaires mais qui restent opaques puisque non-communiqués. Cependant, on peut espérer que les nouvelles missions confiées à l’Arafer changent la donne.

Les usagers des autoroutes sont vent debout contre l’augmentation des tarifs de péages à compter du 1er février prochain d’autant plus que le carburant prend également une tendance haussière. Si ces crispations restent compréhensibles, notamment au regard des résultats économiquement éloquents que les sociétés concessionnaires d’autoroutes enregistrent (9,8 Md€ de CA en 2016, soit + 4,5 %), il n’en demeure pas moins que ces augmentations de tarifs résultent de la stricte application des contrats que l’État a bien voulu signer avec ces sociétés.

Accords plus ou moins « secrets »

La hausse qui sera pratiquée cette année découle d’un avenant au protocole d’accord avec les sociétés d’autoroutes prévoyant un plan de relance autoroutier signé le 9 avril 2015 que l’État refuse obstinément de rendre intégralement public. Ce qui jette la suspicion sur toute augmentation de tarif. Même le Sénat n’a pu obtenir la copie intégrale. Le Président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, Hervé Maurey, relate dans son rapport sur les infrastructures routières et autoroutières en date du 8 mars 2017, la réponse négative que l’État lui avait fourni suite à sa lettre en vue d’obtenir une version complète du texte « dans la logique même de la transparence accrue du secteur souhaitée par tous ». Ainsi dans une lettre du 5 mai 2015, la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, Ségolène Royal, et le ministre de l’Économie, de l’Industrie et du Numérique, Emmanuel Macron, lui avaient exposé que « certains engagements des sociétés concessionnaires reposent sur des chiffrages pour partie couverts par le secret des affaires ; par ailleurs ces engagements devront être précisés sous forme d’avenants aux contrats de concession et seront rendus publics ultérieurement » (sic). Finalement, on apprenait sur France 2 en septembre dernier qu’en échange d’un financement de travaux réalisés sur 10 ans à hauteur de 3,2 Md€, l’État aurait garanti aux sociétés signataires de l’accord du 9 avril 2015 une stabilité fiscale et un allongement de la durée des concessions. Les sociétés auraient également obtenu la permission d’augmenter les tarifs des péages chaque année entre 2019 et 2023 pour compenser le gel imposé par l’État en 2015.

Action en justice

De leur côté, les usagers avaient également tenté de faire annuler les trois décrets du 21 août 2015 auprès du Conseil d’État en introduisant des requêtes pour excès de pouvoir. Ces décrets (voir encadré ci-contre) portent approbation de sept avenants aux conventions passées entre l’État et des sociétés autoroutières pour la concession de la construction, de l’entretien et de l’exploitation d’autoroutes et approbation aux cahiers des charges annexés à ces conventions. Ces requêtes introduites notamment par l’Automobile-club des avocats, l’OTRE, la Fédération Française des Motards en Colère (FFMC), la Fédération Française de Motocyclisme (FFM) ont été rejetées par le Conseil d’État dans une décision en date du 23 décembre 2016 (n° 397096). La Haute Cour administrative a considéré que « si les requérants soutiennent que les clauses qui définissent des compensations financières, en prévoyant une hausse des péages pour une durée d’encaissement plus longue, constitueraient elles aussi des clauses réglementaires illégales, un tel moyen doit également, en tout état de cause, être écarté dès lors, d’une part, que, contrairement à ce qui est soutenu, l’article L. 122-4 du code de la voirie routière cité au point 3 ci-dessus ne fait pas obstacle à la couverture, par les péages, d’une hausse de la redevance domaniale et, d’autre part, qu’il ne saurait être utilement soutenu que des investissements nouveaux relèveraient de l’exploitation normale de la concession et ne pourraient dès lors faire l’objet d’une compensation ». Notons que cette décision concerne des contrats signés avant la mise en place de l’Arafer, (l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières).

L’Arafer a désormais son mot à dire

La loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques a confié à l’Arafer de nouvelles missions dans le secteur autoroutier concédé. Désormais le dispositif juridique contractuel a été revu pour mieux encadrer les procédures de passation des contrats de sous-concession. L’Arafer doit obligatoirement être consulté avant la signature d’un contrat. Elle a également pour mission d’émettre un avis sur tout projet de nouveau contrat de concession et sur tout projet d’avenant à un accord existant dès lors que celui-ci a un impact sur la durée ou le niveau des tarifs de péages. L’autorité n’a pas manqué de remplir son rôle en émettant plusieurs avis, entre 2016 et 2017, attirant l’attention sur la pertinence des hausses des péages. Ses avis font penser qu’à l’avenir il deviendra plus difficile pour l’État d’appliquer des contrats « secrets ». Toute nouvelle hausse passera difficilement auprès des usagers comme en témoigne déjà le communiqué publié par l’OTRE pour dénoncer la manœuvre.

Textes régissant l’application des péages autoroutiers

(1) Décret n° 2015-1044, décret n° 2015-1045 et décret n° 2015-1046 du 21 août 2015 approuvant des avenants aux conventions passées entre l’État et les sociétés APRR, AREA, ASF, Escota, Cofiroute, Sanef et SAPN pour la concession de la construction, de l’entretien et de l’exploitation d’autoroutes et aux cahiers des charges annexés à ces conventions.

(2) Décret n° 2010-406 du 26 avril 2010 relatif aux contrats de concession de travaux publics et portant diverses dispositions en matière de commande publique – article 13-1 (tel que modifié par le décret n° 2014-1341 du 6 novembre 2014 applicable aux contrats de concession en cours d’exécution à la date de publication dudit décret).

(3) Ordonnance n° 2016-65 du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concession – article 55 ; décret n° 2016-86 du 1er février 2016 relatif aux contrats de concession – articles 36 et 37.

(4) Décret n° 2013-436 du 28 mai 2013 modifiant la redevance due par les sociétés concessionnaires d’autoroutes pour occupation du domaine public.

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