Dirigeant l’activité VO de Mercedes Benz Trucks France, Jacques Rouquette souligne qu’après un premier trimestre calme, la demande est repartie à la hausse à partir du deuxième trimestre 2017. Selon lui, le marché est actuellement dynamique et devrait le rester en 2018.
Le ressenti est différent chez DAF où Frédéric Brialy trouve le marché 2017 moins bon que celui de 2016 en raison de la baisse des prix sur les tracteurs Euro V, baisse qui devrait se poursuivre à l’avenir. Il souligne cependant la bonne santé des Euro VI et un volume 2017 supérieur à celui de 2016, les neuf premiers mois de 2017 correspondant aux douze mois de 2016 en raison des fortes ventes de VN en 2013.
Kamel Iznasni, responsable commercial VO de Scania France a un point de vue intermédiaire. « Ceux qui ont beaucoup de stock trouvent le marché difficile. Ceux qui en ont peu le trouvent facile. Scania est entre les deux sur un marché qui n’est pas très dynamique, mais correct, avec rien d’exceptionnel. On arrive à sortir ce qui rentre. » Quant à Sébastien Soulié, directeur de l’activité VO pour Renault Trucks et Volvo Trucks, il souligne que « la France est le marché VO le plus stable ».
L’Observatoire du véhicule industriel annonçait en juin dernier un repli global des prix estimé à 4 %. La CSIAM a pour sa part communiqué des immatriculations de VO en progression de 7,4 % sur les sept premiers mois de l’année par rapport à la même période de l’année 2016.
Précisons également que les marchés, tant VO que VN, sont freinés par un facteur exogène : le manque de chauffeurs en France. Les chargeurs, eux, sont bien là.
Les entreprises de transport, faute de visibilité sur leur activité future, peuvent hésiter à investir dans un VN. En cas de baisse d’activité, un VO peut être revendu un an plus tard avec une décote très faible, voire nulle pour les porteurs les plus demandés.
Le VO, à condition d’être proposé par le marché, a l’avantage d’être disponible immédiatement et utilisable dès le lendemain de son achat. Face à lui, un porteur VN souffre d’un délai de carrossage (souvent quatre ou cinq mois) qui nuit à la réactivité du transporteur face à la demande.
Au cours de leurs trois premières années, les tracteurs ne passent à l’atelier qu’en coup de vent, à l’occasion de deux vidanges. Afin de faire vivre le réseau, il est indispensable que leur deuxième vie ait lieu en France. Pour leur éviter d’aller chez les réparateurs indépendants, la tendance lourde consiste, pour les réseaux des constructeurs, à vendre les VO avec une garantie et un contrat d’entretien. Ainsi, ce que le tracteur n’a pas rapporté au réseau au cours de sa première vie, il le rapportera au cours de sa deuxième vie.
Souvent plus chers que les tracteurs, donc plus long à amortir, les porteurs ne quittent leur premier propriétaire qu’après six à dix ans. Avec 37 % de parts du marché VO, Renault Trucks le domine. Ce réseau a en outre l’originalité d’avoir une activité VO répartie équitablement entre les porteurs et les tracteurs. La marque TruckPlus de Renault Trucks concentre donc la plus large offre du marché en porteurs. à l’opposé, DAF France ne voit pas passer les porteurs en recommercialisation.
Lors des renouvellements de flottes, certains clients grands comptes rendent leurs tracteurs au constructeur pour qu’il s’en débrouille, mais gardent les porteurs afin d’optimiser leur revente. Contrairement aux tracteurs, les porteurs ne sont généralement pas vendus avec buy back, ce qui contribue à les tenir à l’écart des réseaux des constructeurs. En pratique, la cote d’un plateau-grue est actuellement telle que leurs propriétaires n’ont aucun intérêt à passer par un intermédiaire pour le revendre.
La demande en porteurs est actuellement importante. Miguel Gonzalez, responsable VO pour Iveco France, précise : « Tant en France qu’à l’export, il y a une demande de porteurs en VO. Ceci concerne les 26 et 32 t avec des carrosseries construction (benne, malaxeur, plateau, plateau-grue, appareil à bras), mais aussi les véhicules de distribution en 19 et 26 t avec fourgons secs, bâchés ou réfrigérés. » On note par ailleurs que les clients préfèrent nettement les moteurs six cylindres sur les moyens tonnages. Cette demande importante a face à elle une offre actuellement insuffisante. Bref, ce qui se vend bien est ce qui est difficile à trouver pour les négociants.
Le marché du tracteur est un marché de masse, plus ou moins saturé par le renouvellement des grandes flottes tous les trois ans. Pour elles, le tracteur est presque un produit jetable. L’achat pur des tracteurs est en voie de disparition, les constructeurs prenant lors de la vente des engagements de reprise. La situation est souvent résumée par une offre surabondante en tracteurs, mais elle est plus complexe que cela et varie selon les constructeurs.
Miguel Gonzalez résume la situation d’Iveco : « le marché est difficile pour les tracteurs en raison de la concurrence des VN et d’un stock supérieur à la demande. Sur ce point, la situation est actuellement pire en Allemagne et en Espagne où les stocks sont encore plus importants. » Même ressenti chez MAN où l’offre en tracteurs dépasse la demande. Chez Mercedes, on constate une forte demande de tracteurs Euro VI et de tracteurs avec hydraulique pour benne.
À l’exception de Renault Trucks, les tracteurs sont majoritaires dans les réseaux des constructeurs. Ainsi, 80 % des VO de Volvo Trucks France sont des tracteurs.
La banalisation des financements sur trois ans, au lieu de quatre ans, a fait évoluer le tracteur d’occasion. Il avait auparavant 4 ans et 480 000 km après sa première vie, il a aujourd’hui 3 ans et 360 000 km.
Les VO récupérés par DAF ont, en 2017, un âge moyen de 3,5 ans. Les reprises des véhicules vendus neufs en 2013 concernent des Euro V alors que le client VO cherche prioritairement des Euro VI. Il en résulte une offre importante en tracteurs Euro et donc, la décote de ces derniers.
Chez DAF, MAN, Mercedes ou Scania, ce sont les engagements de reprise auprès des grands comptes qui fournissent la plupart des VO. Les reprises, le négoce et les véhicules issus des captives de location comme CharterWay complète les approvisionnements.
Alexandre Milan, directeur de l’activité VO de MAN France, précise que le constructeur France importe 50 à 100 véhicules par an, par exemple des malaxeurs depuis l’Allemagne, bien que leur francisation reste une contrainte. Volvo Trucks France importe également une cinquantaine de VO par an, en particulier des porteurs 6x4 et 8x4, et pourrait spécialiser l’un de ses collaborateurs afin qu’il se consacre exclusivement aux achats à l’étranger.
Iveco importe quelques Eurocargo d’occasion. Sa marque OK Trucks peut assurer des importations à la demande et assurer des prestations complémentaires telles que le convoyage et la francisation réalisée en collaboration avec le service homologation d’Iveco France. Les clients savent que l’adaptation d’un véhicule peut être une opération complexe (problèmes des masses par essieu, des feux, des rétroviseurs et autres). Ils l’évitent donc autant que possible. On constate en effet qu’une importation simple, depuis l’Allemagne vers la France, peut durer trois ou quatre mois. Le certificat de conformité européen (COC) n’a pas amélioré la situation.
L’exportation concerne des tracteurs de plus de cinq ans ou de plus 500 000 km. La vie des porteurs est plus longue chez leur premier propriétaire, mais leur revente en France devient difficile quand ils ont plus de 8 ans et ne sont donc pas conformes à la norme Euro 4.
Les grands groupes de TP gardent fréquemment leurs véhicules une dizaine d’années et les proposent au marché VO alors qu’ils ne sont plus au niveau des attentes des clients français. D’autre part, l’utilisation des camions varie selon les pays et modifie leurs paysages VO. Par exemple, il n’est pas exceptionnel qu’un Espagnol parcoure 180 000 km par an alors qu’un Français dépasse rarement 120 000 km ou 130 000 km par an. En conséquence, l’Espagnol acceptera un VO ayant 600 000 km que refuserait un client français.
En Europe, les principaux pays producteurs de VO sont l’Allemagne, la France et les Pays-Bas, rejoints depuis peu par l’Espagne et l’Italie. Selon les réseaux, les situations sont différentes. Scania France revend 1 200 à 1 300 véhicules par an et en exporte 60 à 70 % car l’entreprise exporte les reprises de conquête(1). Renault Trucks vise une revente de plus de 50 % de ses VO en France. Pour l’exportation, le constructeur a ouvert des centres VO à Budapest et à Dubaï. Volvo dispose d’un hub par lequel passent les véhicules dont l’état ou la configuration sont inadaptés à la revente en France. Globalement, Volvo France exporte 35 % de ses VO.
Un camion exporté, c’est un camion qui quitte le parc roulant national et ne générera plus, ni heures en atelier, ni vente de pièces. L’exportation n’est donc retenue par les réseaux qu’en cas d’offre surabondante ou lorsque les caractéristiques d’un véhicule, notamment son âge, ne lui permettent plus de trouver un acquéreur français.
Globalement, les principales destinations des VO sont l’Europe de l’Est (Bulgarie, Pologne et Roumanie) et l’Europe du sud (Espagne et Italie). L’Afrique du Nord n’importe plus car la Tunisie est en crise depuis les attentats, la Lybie est désorganisée tandis que l’Algérie et le Maroc opposent des barrières douanières comme le font les pays d’Amérique du Sud. Le Moyen-Orient subit pleinement la crise irako-syrienne et privilégie Mercedes et Volvo.
La Russie n’importe plus que des véhicules de moins de trois ans (date de fabrication). Cela exclut à quelques jours près les jeunes tracteurs en buy back à 36 mois. La dévaluation du rouble, les tensions politiques et la saturation du marché par les gros négociants néerlandais, belges et allemands contribuent à fermer le débouché russe. Ceci dit, la dégradation rapide des camions sur les routes russes incite les Russes à accepter une faible différence de prix entre VN et VO.
La Pologne a eu ses années magiques pour le VO entre 2005 et 2008. Aujourd’hui, les ventes de VN se développent en Bulgarie, Pologne et Roumanie tandis que le marché polonais s’autosuffit en VO, mais les Polonais continuent de venir chercher des VO en France car ils savent qu’ils y trouveront des véhicules propres, entretenus par le réseau, et non des véhicules bricolés par leurs chauffeurs pendant les week-ends passés sur les parkings. Le réseau MAN est régulièrement démarché par des négociants polonais et néerlandais qui cherchent à acheter à des prix trop bas. Indépendamment de cela, les pays de l’est de l’union européenne s’inquiètent de l’arrivée de la géolocalisation associée au chronotachygraphe qui devrait à l’avenir les empêcher de caboter à l’ouest.
L’Afrique de l’Ouest continue de demander des véhicules âgés de 5 à 15 ans, tout en étant depuis peu acheteuse de véhicules Euro VI. Pour eux, MAN a sa solution officielle de conversion depuis Euro VI vers Euro V. Pour les porteurs de distribution, les loueurs longue durée ont tendance à acheter des véhicules dans une configuration minimaliste qui sera difficilement exportable. Ils fournissent ainsi à leurs clients français des porteurs de 12 t avec moteur de 180 ch alors que les marchés allemand et italien demandent plutôt 250 ch pour 12 t en VO. Les marchés ont ainsi leurs spécificités qui gênent les ventes de VO à travers l’Europe.
L’acheteur VO est souvent focalisé sur le prix, ce qui peut l’inciter à acheter un véhicule mal entretenu ou mal exploité. Il devrait cependant penser d’abord à la tranquillité d’utilisation apportée par un véhicule expertisé.
Le profil des clients VO s’élargit et il n’y a plus de séparation claire entre les clients VN et ceux du VO. Les monopossesseurs et les jeunes PME, acheteurs traditionnels de VO, profitent parfois de l’agressivité commerciale des VN pour en acquérir à bon compte. Inversement, les grandes flottes, habituées à acheter du neuf, n’hésitent plus à acquérir des VO lorsque cela est pertinent, par exemple pour leurs petites tournées ou lorsqu’elles doivent répondre à un besoin urgent.
Volvo est peu présent dans les grandes flottes en VN. Il ne l’est pas davantage en VO. Le client VO de Volvo est donc généralement une entreprise qui exploite, au plus, une vingtaine de camions.
Les ventes de VO à un négociant ou à un concessionnaire s’effectue couramment à des prix inférieurs de 4 000 à 5 000 € à ceux proposés à un utilisateur final. Cela s’explique par la vente « en l’état » à un négociant tandis que la vente à l’utilisateur sera précédée par des travaux de sécurisation. Outre la vidange des fluides, le galet tendeur et le turbo sont fréquemment remplacés préventivement chez DAF dans le cadre d’un contrôle sur 200 points. À cela, s’ajoutent l’inspection du freinage et des pneus, d’éventuels travaux esthétiques, voire une expertise de l’huile chez Iveco. Tous les réseaux ont dans ce domaine des pratiques comparables afin d’assurer la satisfaction de leurs clients.
Eric Bonnard, responsable marketing VO de Renault Trucks, précise : « Aujourd’hui, on achète un VO comme un VN, c’est-à-dire avec du service. En deuxième vie, on souhaite une pleine exploitation du véhicule ». Chez Iveco, la vente de VO peut être assortie d’un financement complet, d’un leasing opérationnel, d’une garantie de 36 mois, d’un contrat d’entretien pour la même durée et même d’un buy back. Mercedes propose sur ses VO des crédits-bail ou de la location financière.
Entre les constructeurs, des surenchères sont en cours sur les durées de garantie des véhicules d’occasion. Au moment où nous écrivons, DAF propose des contrats d’entretien et de réparation jusqu’à la sixième année du véhicule. Renault Trucks garantit deux ans ou 240 000 km un véhicule âgé de 3 ans avec 350 000 km. Un tracteur de moins de six ans est garanti un an.
En 2018, il sera possible de souscrire une garantie de cinq ans pour un VO Scania âgé de deux ans. Il sera ainsi couvert jusqu’à ses sept ans, âge limite fixé par Scania pour sa garantie. La formule étant souple, elle accorde par exemple trois ans de garantie à un véhicule âgé de quatre ans.
L’offre de service Start’n Drive Excellence est déjà proposée par Renault Trucks sur ses VN. Elle sera lancée sur les VO à Solutrans, les contrats d’entretien des Renault T pouvant être étendus jusqu’à 900 000 km.
Comme Renault Trucks, Volvo Trucks alignera les contrats de maintenance de ses VO sur ceux de ses VN à l’occasion de Solutrans. Tous les VO Volvo sont connectés (Dynafleet) et disposent de l’i-See ainsi que de la garantie constructeur Volvo. La garantie couvre le véhicule pendant ses six premières années, et jusqu’à un million de kilomètres. Si l’on apporte au client une garantie et un contrat de maintenance, il est possible de vendre un véhicule ayant un fort kilométrage.
Chez MAN, le leasing est la formule d’achat majoritaire pour les VN. Elle se développe rapidement pour les VO. Ainsi, un tiers des VO du réseau MAN vendus à des clients finaux ont été financés en leasing. Le constructeur allemand a lancé deux offres spectaculaires sur ses tracteurs VO, l’une à 749 €/mois pour les Euro 5, l’autre à 849 €/mois en Euro 6. L’addition s’arrondit à 1 000 € avec un contrat d’entretien complet hors pneus et carrosserie, mais incluant les remorquages.
Avec un contrat intégral, la principale différence entre le VO et le VN est le montant du loyer. Il faut aussi considérer que le VO consommera un peu plus de carburant qu’un VN disposant des dernières évolutions technologiques. Il devra peut-être aussi passer à l’atelier un peu plus souvent. D’où la question : à combien valorise-t-on ces différences entre VN et VO ? Alexandre Milan considère qu’à partir d’une économie de 200 €/mois, le VO est compétitif face au VN.
La diversification des clients VO et le développement des services associés aux VO entraînent une cannibalisation mutuelle entre les marchés VO et VN. Il est donc souhaitable que les vendeurs VN sachent vendre un VO lorsque c’est pertinent.
Cette concurrence VN-VO n’est pas ressentie chez Mercedes et Scania, mais elle l’est chez DAF et MAN où l’on considère qu’un VO de 36 mois à 50 000 euros concurrence le neuf. C’est alors le coût total de détention qui dicte le choix.
L’effondrement du marché en 2008 a été fatal à de nombreux négociants. Aujourd’hui, leur disparition se poursuit en raison de la reprise de l’activité VO par les distributeurs, succursales et réparateurs agréés. Les négociants français doivent donc s’adapter en se spécialisant sur des niches ou en essayant de vendre des véhicules de plus de 7 ou 8 ans.
Les négociants ont parfois une spécialité officieuse. On trouve ainsi beaucoup d’Iveco chez BVI, et beaucoup de Renault chez Hénaux-Bal. Certains négociants ont une envergure européenne et sont capables d’acheter des flottes entières tout en apportant les avantages de leurs organisations bien rodées. Dans cette catégorie, on trouve BAS Trucks BV et Kleyn Trucks, tous deux installés aux Pays-Bas. Parmi les grosses vitrines internationales de VO disponibles sur Internet, citons europe-camions.com et automobile.fr alias mobile.de Gmbh, également disponible sous ce nom sur l’AppStore d’Apple sous forme d’appli pour iPad et iPhone.
Les réseaux des constructeurs tentent de garder leurs distances vis-à-vis des gros négociants car les constructeurs cherchent à déterminer le prix de leurs VO.
Les négociants peuvent naturellement acheter un véhicule à un transporteur, mais ils gagnent parfois à massifier leurs flux en achetant aux loueurs longue durée ou aux constructeurs. Pour ces derniers, la vente à un négociant traduit un stock trop important, impossible à écouler rapidement par le réseau du constructeur.
Auparavant, les ventes aux enchères, alimentées par les faillites, fournissaient de nombreuses opportunités d’achat. Aujourd’hui, les banques ne prêtent qu’aux clients solvables. Cela réduit le risque de faillite et donc, le nombre de véhicules proposés lors des ventes aux enchères.
DAF incite ses concessionnaires à développer leur activité VO en la mettant en valeur grâce aux services associés. Dans le réseau Mercedes, les distributeurs sont autonomes pour leur activité VO et leurs reprises. Certains ont donc développé une activité de négoce. Contrairement à certains de ses concurrents, Mercedes n’utilise pas de labellisation particulière pour ses VO. Toutefois, une évolution dans ce sens est attendue à l’occasion de Solutrans.
Sur le marché VO, il est possible de valoriser un véhicule s’il est spécifique car « être standard » vous confronte à l’ensemble de la concurrence. Inversement, un véhicule particulier, par exemple un tracteur avec grue dos cabine, sera peut-être plus long à vendre, mais s’écoulera mieux. Il est aujourd’hui facile de donner une visibilité européenne à un véhicule grâce aux sites internet spécialisés.
Un bon VO a d’abord été un bon VN ! En raison des demandes connues des acheteurs de VO, il est souhaitable que les VN soient équipés de manière à devenir ensuite de bons VO. Les grandes flottes négligent souvent d’équiper leurs tracteurs de ralentisseurs hydrauliques. Or, lors de la revente en VO, le ralentisseur est demandé par le client. Celui-ci sera également sensible à la présence de jupes latérales et à celles d’une connexion Bluetooth et d’un GPS couplé à un système télématique. Les couleurs exotiques sont, comme les cabines équipées d’un unique siège, des obstacles à la revente en VO. Côté réservoir, les acheteurs français de tracteurs se contentent de 700 litres alors que la clientèle export demandera plutôt 1 000 litres. Renault Trucks modifie parfois les réservoirs de ses VO destinés à l’Europe de l’Est. Afin d’éviter de reprendre plus tard en buy back des véhicules incompatibles avec le marché VO, les ventes de VN aux grands comptes s’assortissent parfois d’équipements optionnels offerts dans le seul but d’obtenir plus tard des VO vendables. Les clients grands comptes se contentent souvent d’une configuration de base pour leurs tracteurs. Il faut s’éloigner de celle-ci pour rendre le VO séducteur. La communication est donc indispensable entre les vendeurs de VO et de ceux des VN.
Chez Volvo, la configuration du FH optimisé pour la revente en France est très claire. Il s’agit d’un FH de 500 ch avec cabine Globetrotter, deux couchettes, double réservoir, chauffage de cabine, climatisation autonome, bluetooth et réfrigérateur. Pour la revente en Italie, il faut encore plus de puissance, un ralentisseur hydraulique et une cabine Globetrotter XL.
DAF avec le MX Engine Brake, et Volvo avec le VEB, ont choisi de promouvoir sur les VN les « freins moteurs » au détriment des ralentisseurs hydrauliques acquis auprès de tierces parties. Cette démarche se reporte sur les VO de ces marques. Le ralentisseur hydraulique n’est donc pas indispensable à leur revente, sauf si elle vise un marché export qui exige un ralentisseur hydraulique, par exemple le Maroc.
Chez MAN, la valeur résiduelle du véhicule, calculée lors de son financement, prend en considération la compatibilité de ses caractéristiques avec le futur marché des véhicules d’occasion.
Pour les porteurs, en raison des allers-retours de l’écotaxe et d’un avenir réglementaire flou, les clients demandent des véhicules Euro V ou Euro VI. L’Euro IV est impossible à vendre à un utilisateur final en région parisienne, mais cette norme sera néanmoins tolérée faute de mieux par certains clients pour des véhicules spécifiques. Par conséquent, les modèles antérieurs à 2006 ne trouvent plus d’utilisateurs en France hors emplois occasionnels éloignés d’un centre urbain.
Les clients français sont dissuadés par la barrière psychologique à 500 000 km, non fondée pour un tracteur entretenu correctement. Certains clients refusent d’acheter des véhicules parisiens, ou ayant roulé en bord de mer ou sur des routes fréquemment salées en hiver.
Le client VO qui cherche un petit prix devra s’orienter vers un véhicule avec fort kilométrage et refusera les prestations complémentaires, préférant faire les travaux d’entretien lui-même. Cependant, il devient de plus en plus sensible au coût total de détention, ce qui l’oriente vers des véhicules récents.
Aujourd’hui, un financement à taux correct n’est accordé que pour des véhicules Euro V ou Euro VI, dont le kilométrage n’excède pas 250 000 à 300 000 km pour un moteur 4 cylindres ou 400 000 à 500 000 km pour un moteur 6 cylindres. Il peut être refusé si le véhicule a plus de cinq ans à la fin du financement. Ceci favorise les ventes de véhicules d’occasion récents.
Les VO ne sont plus vécus comme un mal nécessaire par les réseaux, mais comme une activité vitale afin de garder dans le parc roulant des véhicules générateurs d’activité (ateliers et pièces). Rappelons que lors du passage à Euro VI, Volvo a annoncé à son réseau une baisse probable de 20 % des ventes de pièces et de l’activité des ateliers par rapport à Euro V. Cette baisse doit être compensée en faisant rouler des VO rendus captifs des réseaux par les contrats d’entretien.
En 2018, le marché des tracteurs d’occasion aura basculé vers Euro VI et l’année prochaine, tous les constructeurs vont faire bouger le VO. Les liens entre VN et VO vont devenir de plus en plus étroits. Qu’il s’agisse de l’équipement initial du véhicule déterminé dans une perspective VO ou des services accompagnant la vente, VN et VO s’imbriquent de plus en plus. L’activité VO va poursuivre sa rationalisation et sa standardisation en tant qu’outil d’optimisation de l’activité des réseaux.
L. F.
Le marché VO des camions fonctionnant au gaz démarre timidement, faute d’offre. Ainsi, en octobre 2017, ce sont trois Stralis 330 ch (GNC et GNL) qui rejoignent le parc VO d’Iveco France et pourraient intéresser des petits tractionnaires desservant des bases logistiques de la grande distribution. à doses tout aussi homéopathiques, le Fuso Canter EcoHybrid a déjà connu des reventes par TruckStore. Ses acquéreurs se voient imposer l’hybridation par leurs donneurs d’ordre.
Installé en Seine-et-Marne à Jouy-le-Châtel, le garage Rambach est réparateur agréé Mercedes VI. N’étant pas distributeur, il ne peut pas vendre de véhicules neufs, mais il peut avoir une activité VO. Actuel dirigeant de l’entreprise créée par son père, François Rambach déclare « subir » le VO car il ne dispose pas de vendeurs spécialisés. « Ici, nous sommes mécaniciens avant d’être commerçants, déclare-t-il. Nous n’acceptons pas la négociation sur le prix minimal que nous demandons. En revanche, nous assurons la vente d’un véhicule en bon état. En évitant de laisser partir des camions hors d’état, nous travaillons à la satisfaction du client. Cela paye toujours à la fin, par exemple en nous amenant de nouveaux clients par bouche-à-oreille. » Ceci vaut pour les ventes aux utilisateurs finaux. Dans le cas d’une vente à un négociant, c’est à lui de garantir l’état du matériel auprès de l’utilisateur final.
Sur des VO récents, Rambach réalise les modifications dictées par l’emploi auquel le véhicule est destiné par son nouvel acquéreur. Il peut s’agir d’installer la télématique Fleetboard, l’hydraulique sur un tracteur, de le chausser en 315/80 ou encore, de modifier son rapport de pont. François Rambach insiste sur les conséquences très sensibles sur la consommation d’un rapport de pont inadapté à l’utilisation car les camions actuels ne sont économes que s’ils sont utilisés correctement.
Rambach est apporteur d’affaires VN et assure leurs livraisons. Ces activités VN sont habituellement associées à des reprises de VO. S’il sent la revente possible, François Rambach propose une reprise. À défaut, il la confie à TruckStore. Par exemple, il a repris un porteur 6x4 avec bras Ampliroll et grue auxiliaire, mais a orienté un lot de sept tracteurs vers TruckStore. Ainsi, il ne grève pas sa trésorerie avec des VO.
François Rambach identifie deux types de clients VO. Parmi eux, le client local cherche du matériel récent. Le client étranger acquiert quant à lui du matériel en fin de vie et l’exporte vers les pays de l’Est ou le Moyen-Orient malgré la situation en Syrie qui y a fait chuter les cours.
Bien que situé à 62 km de Paris (porte de Bercy) par la nationale 4, le garage Rambach ressent les effets des travaux du Grand Paris sur l’activité VO. La demande en matériel de TP est importante et devrait le rester au cours des vingt années à venir en raison de ce qui est présenté comme « le plus grand chantier du monde ».
L. F.
Traditionnellement, le vendeur de VO gère son parc tandis que le vendeur de VN se rend chez ses clients qui sont habitués à ce démarchage. Aujourd’hui, il faut évoluer. Le vendeur VO performant sera celui qui ne se contente pas de ce qu’il a sur son parc. Pour sa part, le vendeur VN doit identifier les demandes de VO de la part de ses clients, par exemple lorsqu’ils cherchent un véhicule pour des petites tournées.
Parmi ses prestations complémentaires, le vendeur de véhicules d’occasion doit accepter d’envoyer un véhicule chez le carrossier afin de l’adapter à la demande, mais aussi assurer la mise en main du matériel.
Chez Volvo Trucks, l’organisation commerciale des VO est totalement séparée de celle des VN. La démarche des vendeurs de VO est cependant proche de celle des vendeurs VN puisqu’ils vont aussi chez les clients. Sébastien Soulié, directeur de l’activité VO pour Volvo Trucks et Renault Trucks considère que « Face à une offre VO qui est abondante, il faut être actif sur le terrain afin de se démarquer. Il faut donc mettre des gens sur la route et proposer des garanties ».
L. F.
L’installation de l’hydraulique sur un tracteur est l’une des modifications les plus courantes sur un tracteur VO qui va passer d’une utilisation longue distance à la traction d’une benne de chantier. Elle se pratique dans les réseaux DAF, MAN ou Mercedes et peut s’accompagner d’une modification de la monte pneumatique. Chez DAF, un prestataire se charge de l’adaptation ADR des VO afin de faciliter leur revente.
Profitant de l’outil industriel de Bourg-en-Bresse (Ain), et afin d’adapter l’offre VO à la demande, Renault Trucks a officialisé et industrialisé la conversion de tracteurs routiers longue distance en tracteurs d’approche chantier, mais aussi la transformation de tracteurs en porteurs. C’est ainsi qu’une centaine de Premium XRoad ont été réalisés pour le marché français depuis 2015, d’autres ont été exportés. Successeur du Premium XRoad, le Renault T XRoad sera lancé à Solutrans.
La viabilité économique de la conversion de tracteurs d’occasion en porteurs est autorisée par les synergies dont dispose l’atelier de transformation avec la chaîne d’assemblage VN. Ainsi, l’approvisionnement en longerons profite pleinement de la massification des flux. Une vingtaine de porteurs ont déjà été obtenus à partir de tracteurs ; ils sont carrossés en fourgons bâchés. Renault présentera à Solutrans un porteur d’approche chantier C 4x2 obtenu par transformation de T routiers.
Chez MAN, il n’apparaîtrait rentable de convertir des tracteurs en porteurs qu’en cas d’effondrement du cours des tracteurs. Une étude est en cours pour adapter des véhicules longue distance aux besoins de l’approche chantier.
L. F.
(1) Rachat de véhicules neufs de marques concurrentes