Coup double ! Non seulement, la Commission européenne vient de donner son feu vert pour le versement de 7 M€ au projet de hub ferroviaire CargoBeamer à Calais mais le conseil régional des Hauts-de-France a voté l’augmentation de sa participation, passant de 2 à 3 M€. L’investissement pour ce hub de 18 modules de transbordement automatisé et un parking de 150 places pour poids lourds est aujourd’hui estimé à 32,6 M€. Si l’on ajoute les autres subventions sollicitées auprès de différents acteurs publics, le financement public atteint 40 % : 19,6 M€ resteraient à charge de CargoBeamer. Natacha Bouchart, maire de Calais et présidente de Calais Promotion, l’agence de développement économique du territoire, s’est réjouie de la création d’une vingtaine d’emplois directs, sans compter les navettes et le stockage.
Pour l’entreprise allemande, Calais, et plus précisément la ZAC Transmarck-Turquerie et ses 220 ha dédiés au transport et à la logistique, est stratégique. Non seulement, elle se situe au cœur du nœud routier, à moins de 10 kilomètres du port de Calais et d’Eurotunnel (3,6 millions de véhicules de fret en 2018) mais elle sera bientôt embranchée fer, avec un raccordement à la ligne Calais-Dunkerque. « Cette ligne est actuellement fermée à la circulation de nuit mais nous sommes en discussion avec SNCF Réseau », précise le porte-parole de Hans-Jürgen Weidemann, président directeur général de CargoBeamer. À Calais, « le nombre de trains affrétés par semaine dépendra de la demande, mais nous disposerons à terme d’une capacité de 12 trains par jour, chaque train comptant 36 semi-remorques », a précisé le P-dg de CargoBeamer. L’investissement dans le projet calaisien sera graduel, avec deux trains quotidiens au début et un fonctionnement à pleine charge prévu pour 2026. « L’intérêt de notre technologie pour le chargement et le déchargement, c’est qu’elle est automatisée, et donc très rapide, adaptée aux semi-remorques et surtout compatible avec tous les transports combinés existants et utilisable dans tous les terminaux », a ajouté CargoBeamer.
La nouvelle ligne permettra d’accueillir les marchandises venues de la Grande-Bretagne pour desservir l’Allemagne et l’Italie du Nord, via une ligne déjà exploitée par CargoBeamer, entre Domodossola près de Milan et Kaldenkirchen près de Venlo, à la frontière germano-hollandaise. Rien qu’avec cette liaison, CargoBeamer revendique 1 500 trains, équivalents de 52 000 poids lourds, depuis l’ouverture en 2015. Le service compte trois trains, d’une capacité de 33 semi-remorques chacun, effectuant 16 départs par semaine… avec un taux de remplissage de 97 % ! « Avec la perspective du Brexit, beaucoup de chargeurs craignent des ruptures d’approvisionnement et on entrevoit que beaucoup d’entre eux vont stocker près de la frontière côté français pour tenter de compenser les éventuelles difficultés à accéder au marché du Royaume-Uni », ajoute-t-on chez CargoBeamer. « De nombreux transporteurs nous ont d’ores et déjà montré des marques d’intérêt en nous affirmant que si nous ouvrons une ligne à Calais, ils nous apporteront le volume nécessaire, a assuré l’entreprise. Nous travaillons déjà avec une trentaine de clients sur les liaisons Milan-Venlo et il s’avère que de plus en plus de transporteurs sont intéressés par la liaison calaisienne. » Présent lors de la signature officielle de la convention de financement européen, Jean-Pierre Devigne, gérant de RDV Transport, confirme : « Je suis en contact avec CargoBeamer depuis l’annonce de ce projet en 2012. Nous travaillons avec l’opérateur VIIA pour la ligne Calais-Le Boulou pour l’Espagne mais j’ai des livraisons en Allemagne notamment pour Arcelor Mittal. J’attends donc de connaître les modalités de CargoBeamer. » Le transporteur déménagera mi-octobre juste à côté du futur terminal ferroviaire. CargoBreamer voit encore plus loin en suivant de près les échanges entre le territoire Calaisien et Datong pour développer un itinéraire sur les nouvelles routes de la soie. Il a développé une solution permettant un transbordement rapide et automatisé entre les différents écartements de voies entre la Chine, la Russie et l’Europe ainsi qu’un container à grand volume permettant d’augmenter la capacité de chargement.
Décharger et recharger un train de 36 semi-remorques en vingt minutes contre près de dix heures avec un système classique : c’est la promesse de CargoBeamer.
L’entreprise allemande a mis au point une palette de manutention sur laquelle sont placées les semi-remorques avant l’arrivée du train. Grâce à un module de manutention spécifique baptisé « GateModule », les palettes peuvent alors être chargées latéralement sur les wagons ferroviaires spécialement adaptés et ce, de façon largement automatisée.
Un système informatique supervise les opérations, servant également d’interface avec les clients pour les réservations, le suivi en temps réel et les documents de transport. Dans les terminaux de transport combiné classique, la manœuvre prend un peu plus de temps mais la palette rend les semi-remorques préhensibles par portique ou grue télescopique, contrairement aux conteneurs maritimes plus difficiles à manipuler.