Premier péage satellite au monde, la « Maut » (comme on appelle le péage en Allemagne) de Toll Collect devait entrer en fonction en 2003. Mais les recettes n’ont commencé à affluer vers le budget fédéral que 16 mois plus tard, à compter de 2005, en raison de problèmes techniques. En 2004, le gouvernement allemand, à l’initiative de Gerhard Schröder, se tournait finalement vers les tribunaux. Depuis, État Fédéral et actionnaires de Toll Collect – Deutsche Telekom et Daimler, à hauteur chacun de 45 %, ainsi que le Français Cofiroute à hauteur de 10 % – se battent devant la justice. Le gouvernement allemand a exigé jusqu’à 9,5 milliards d’euros de Toll Collect en raison d’un manque à gagner conséquent pour les caisses publiques. La Maut rapporte chaque année 4,5 milliards d’euros.
Toll Collect et le ministère des Transports viennent finalement de s’entendre à l’amiable. Les actionnaires de l’entreprise verseront 3,2 Md€ à Berlin. « Nous avons atteint le meilleur accord possible pour le contribuable », s’est félicité le ministre des Transports allemand, Andreas Scheuer. Deutsche Telekom et Daimler se sont également montrés satisfaits d’un compromis « qui met fin à l’incertitude juridique » pour la société. « C’est une bonne chose que ce conflit soit enfin réglé après 14 années, estime l’analyste Frank Schwope, de Nord-LB. De ce qu’on en sait, cet accord semble acceptable et honnête pour toutes les parties en présence. » En 14 années de batailles juridiques, le dossier Toll Collect aura coûté au final à l’État et aux actionnaires près de 245 millions d’euros, en frais d’avocat et en expertises.
L’opposition est pourtant loin de partager le soulagement des parties en jeu. « C’est un mauvais deal pour l’État, estime l’expert budgétaire des Verts Christian Kindler. Scheuer s’est fait rouler dans la farine. Il n’a même pas obtenu la moitié de ce qu’il réclamait ! Cela met au grand jour l’absurdité de privatiser des tâches publiques. L’État Fédéral doit gérer lui-même le péage autoroutier ! ». Ce sera le cas dans les prochains mois. Le contrat de l’État avec l’opérateur arrive, en effet, à échéance le 31 août. Berlin, qui a lancé en 2016 un appel d’offres européen pour trouver un successeur à Toll Collect, assurera la collecte de la Maut pour une phase intérimaire de 6 mois à compter du 1er septembre, avant de remettre ses parts à un nouvel opérateur. Daimler a d’ores et déjà annoncé vouloir jeter l’éponge. Le péage autoroutier est redevable à l’heure actuelle par tout poids lourd de plus de 7,5 tonnes, sur les autoroutes et sur 2300 kilomètres de routes nationales. À compter du 1er juillet prochain, la Maut sera étendue à l’ensemble des 39 000 kilomètres de routes nationales dans le pays, et devrait rapporter 2 Md€ supplémentaires au budget fédéral. Les recettes du péage sont directement réinvesties dans l’entretien d’un réseau routier très délabré.