A moins de trois mois de la mise en place de l’écotaxe basque, l’exploitant du réseau Bidegi vient enfin de publier sur son site Internet des informations à l’intention des transporteurs (en basque, espagnol, français et anglais) – (cf L’OT n° 2893). La province basque espagnole du Gipuzkoa, limitrophe de la France, compte en effet instaurer, en janvier 2018, un péage pour les camions de plus de 3,5 t qui utilisent une portion très fréquentée de la nationale 1 entre Irun, la ville frontière avec Hendaye, et la ville d’Etzegarate, située elle aux portes de la Navarre. Ce système est destiné à favoriser le report sur l’autoroute et financer le coût des infrastructures.
En passant sous l’un des trois portiques installés, le système AT classera les camions et activera la procédure de paiement, soit à travers le dispositif de télépéage utilisé sur les autoroutes espagnoles (Via-T), soit par lecture de la plaque d’immatriculation pour les camions non équipés de Via-T, ou dont les badges ne sont pas compatibles avec Via-T. Bidegi précise que dans ce cas, leurs propriétaires sont priés d’enregistrer leurs véhicules sur le site Internet de Bidegi (cette procédure ne sera disponible qu’à partir de décembre 2017). Le système ne comporte que deux classes de paiement (plus ou moins 12 t), qui seront appliquées en fonction du volume calculé par les lasers des portiques.
Aucune réduction ne sera appliquée pour les transporteurs locaux ou les camions Euro VI. La province du Gipuzkoa projette de taxer également la route GI-632, actuellement en construction, en ciblant cette fois-ci « tous les véhicules ».
L’exploitant signale que les transporteurs dont les camions sont passés par les portiques sans badge Via-T, et sans inscription préalable, disposent d’un délai maximum de 24 heures pour régler la facture, après quoi cette dernière sera majorée de 20 %. Si aucun règlement n’intervient dans les deux mois, le Conseil Général de Guipúzcoa engagera une procédure de sanction et procédera à l’encaissement de la dette en recourant à une exécution forcée, avec une surtaxe pour frais de gestion. Bidegi fait savoir que le non paiement occasionnel constitue une infraction « légère », dont la sanction oscille entre 150 et 1 999 € ; le non paiement réitéré constitue une infraction « grave » dont la sanction oscille entre 2 000 et 7 999 €. Les infractions graves réitérées peuvent constituer une infraction « très grave » avec des amendes de 8 000 € à 150 000 €. Sans surprise, les transporteurs espagnols ont fait part de leur « rejet absolu » de cette mini-écotaxe et devaient se rencontrer cette semaine octobre pour décider des éventuelles actions à mener contre ce projet.
Côté français, aucune action n’est prévue et c’est plutôt un sentiment d’impuissance qui prévaut. A part le fait que le flou le plus total entoure le système de facturation, indique Caroline Augé, secrétaire général de l’OTRE Pays de l’Adour, « Nous n’avons pas encore chiffré le coût mais l’impact de cette taxe risque d’être très important pour nous », soupèse Andres Mendizabal, responsable commercial en charge de l’Espagne chez les Transport Lapegue. Cette société d’une trentaine de semi-remorques (pour 50 remorques), installée à Hendaye, de l’autre côté de la Bidassoa, gère des transports sur toute la France ainsi qu’au Pays Basque espagnol. L’ensemble de la flotte est déjà équipée de badge télépéage Via-T (ou compatible Via-T). « Nous descendons jusqu’à Saragosse et Santander. Tous les jours, nous allons charger ou décharger de l’autre côté de la frontière et en fonction des destinations nous pouvons passer par la N-1 pour éviter de faire un détour pour emprunter l’autoroute, cette dernière restant relativement chère. Nous allons peut-être revoir certains itinéraires », explique-t-il. Comme ses confrères français, Andres Mendizabal confirme n’avoir reçu aucune information au sujet de cette écotaxe. « Personne n’en parle, les transporteurs espagnols non plus. Nous allons devoir en parler à nos clients, comme nous le faisions il y a quelques années pour l’écotaxe. À l’époque, nos clients espagnols ne voulaient pas en entendre parler, mais ils seront peut être plus à l’écoute parce que la taxe sera cette fois-ci de leur côté. » Sera-t-il possible de répercuter le coût ? Son confrère hendayais, Dominique Lopez, gérant des transports TDF (une vingtaine de camions), n’y croit guère « Je n’en ai pas eu le temps d’en parler à mes clients mais il me parait évident que personne n’acceptera de compenser le coût de cette écotaxe », prévoit-il.