Jean-Christophe Cuvelier : Je pense que l’aspect numérique aura deux impacts sur la filière transport. Le premier est d’ordre technologique. Je pense que tout le monde fait la confusion entre les nouvelles offres numériques et les technologies. Actuellement, nous avons à notre disposition un certain nombre de technologies pour dégager de la productivité, au sein de l’entreprise, et notamment dans les processus administratifs. On parle, là, de dématérialisation et d’automatisation de chaînes d’action. Le premier enjeu consiste donc à automatiser au maximum un certain nombre de tâches administratives sans valeur ajoutée via les nouvelles technologies.
Le second impact est lié au digital, qui ouvre à une meilleure connaissance de ses clients. En récupérant une masse de données les concernant, il est possible de mieux les connaître et de mettre à leur disposition de nouvelles offres de services à valeur ajoutée. Je pense que les gens, dans notre filière et au-delà, ne savent pas par quelle porte entrer dans le digital.
J.-C. C. : Il y en a deux. Quand on a une vraie vision du marché et des besoins clients, on est capable de construire une stratégie commerciale avec la mise en œuvre de nouvelles offres et le recours à la technologie. Ou alors, lorsque l’on a une vision approximative, on se concentre sur la stratégie la plus connue, celle de la productivité, et l’on met les technologies au service de la productivité au sein de son entreprise. Dans ce cas, on dégage de nouvelles marges de manœuvre en termes de rentabilité, et on les utilise en montant sur la partie digitale pour créer des offres de service.
J.-C. C. : Il faudra effectivement chercher de nouvelles compétences sur le marché, des profils hybrides, c’est-à-dire des gens capables d’avoir une orientation business, de construire des modèles économiques, de marketer une offre et des produits. Des profils tournés vers les clients et à même de comprendre les processus de production dans l’entreprise. Ils devront également posséder une forte sensibilité aux systèmes d’information, aux technologies. Ce double coût – technologies et compétences – peut devenir compliqué pour un certain nombre d’entreprises.
J.-C. C. : Le groupe pour lequel j’exerce (Crystal Group Alis International, Ndlr) possède des activités au Maroc. Que fait l’État marocain ? Il dit aux entreprises : « Digitalisez-vous et vous aurez droit à un package de X milliers d’euros à titre de remboursement ! » Je crois que si l’État n’aide pas les TPE-PME dans leurs projets de digitalisation, elles ne sauront pas se convertir. D’ailleurs, il existe sur le marché des acteurs qui proposent des solutions de digitalisation. Je pense aux plateformes numériques type Chronotruck Fretlink ou Everoad, commissionnaires de transport digitalisés. Ils mettent à la disposition des TPE-PME du transport routier une technologie portée par une société tierce pour accéder à de nouveaux marchés. Everoad et ses homologues apportent la technologie, et le transporteur reste sur son métier d’origine. À l’avenir, les TPE-PME devront se tourner vers des partenaires de technologies externes pour digitaliser leurs processus autrement qu’en interne.
J.-C. C. : Elle se compose de deux volets. Le premier consiste à sensibiliser nos adhérents sur l’impact des nouvelles technologies. On parle de blockchain (quels usages potentiels elle pourrait, demain, disrupter dans nos secteurs d’activité, d’intelligence artificielle ; quel sera son apport ?). Viennent ensuite les objets connectés puis les incidences de ces technologies sur nos ressources humaines (comment conduire le changement, avec quelles compétences ?). Le second volet vaut pour l’année 2019. Il s’agit de constituer un livre blanc qui recense les effets de ces nouvelles technologies sur nos usages, nos métiers. Notre propos consiste à donner des clés à nos adhérents pour les aider à mieux appréhender le sujet.