Transmettre son entreprise à ses salariés ? L’idée fait son chemin, mais rencontre encore des résistances. Pourtant, faute de cédants ou faute de candidats à la reprise, selon l’Observatoire de la BPCE, 30 000 des 75 000 TPE-PME concernées ferment chaque année. Un frein important, selon une enquête de 2017, serait le coût du conseil extérieur, pour 42 % d’entre eux, tous secteurs confondus. La moitié cherchent aussi un repreneur de confiance, plus de 80 % d’entre eux souhaiterait quelqu’un du métier…
Pourtant, « la reprise d’entreprise, 42 % de nos dossiers d’aide, reste majoritairement le fait d’acheteurs extérieurs, devant les reprises familiales et, plus minoritaires, les reprises par les salariés, explique Cécile Le Bihan, coordinatrice d’Initiative Bretagne et Armor, chargée du dispositif Brit, fonds régional d’aide à la transmission-reprise d’entreprises, créé en 2007 par la Région et la caisse des dépôts. Une reprise coûte moins cher, a priori, et présente un taux de pérennité supérieur à une création d’entreprise. » Le conseil ? « Nos dossiers de financement sont adossés à un accompagnement, ajoute la responsable. Mais il importe aussi de se rapprocher d’une CCI, par exemple et, pour le cédant, de se préparer psychologiquement à laisser son entreprise. Il est bien qu’il accompagne le reprenant trois à six mois, mais pas au-delà ! En choisissant de transmettre à sa famille ou à ses salariés, il fait le choix de la continuité ».
Jacques Leblanc, ex-dirigeant des transports éponymes, à Carentoir, dans le Morbihan, a fait les choses simplement. Lorsqu’il s’est agi de transmettre sa société, il y a cinq-six ans, comme ses deux enfants avaient d’autres projets, il s’est tourné vers Céline Rio, l’une de ses salariés. « Elle était passée par tous les postes, elle s’impliquait, jusqu’à devenir ma proche collaboratrice. » Jacques Leblanc l’emmène dans des rendez-vous commerciaux, des séminaires. Il la forme. Petit à petit, « elle a pris goût au métier de patron ».
En écho, Céline Rio accepte, après avoir hésité, et entraîne deux collègues à partager l’aventure en 2015. Et surtout, dans le même esprit, ils se font accompagner de concert, principalement, avec l’expert comptable, l’avocat fiscaliste et le banquier de l’entreprise. « Ce sont les conseillers habituels de l’entreprise vers lesquels je me suis tourné, commente le nouveau retraité. Ceux avec qui j’avais travaillé et avec lesquels Céline Rio allait travailler également. Ils nous ont accompagnés sur le fonctionnement, les démarches et la mise en place de la transmission, à toutes les étapes ».
Pour Céline Rio, « ces démarches communes étaient un gage de pérennité. Nous avions des rendez-vous communs et des rendez-vous distincts dans un esprit de confiance. » La jeune chef d’entreprise s’est aussi tournée vers l’OPCA pour un audit T-Diag puis une aide avec un cabinet extérieur qui améliorera l’organisation entre les services. Enfin, parallèlement à tout le travail de terrain, la participation au groupe Tred Jeun’s, dans le cadre de Trait d’Union, a été un élément déclencheur : « les échanges dans le groupe, avec d’autres jeunes transporteurs sur l’entreprise de demain, permettent de s’assurer dans son projet. De se sentir moins seule, même si j’étais très accompagnée ! »