Deuxième région économique de France, Auvergne Rhône-Alpes (Aura) est particulièrement touchée par la pénurie de candidats à l’embauche. La pyramide des âges de la branche est notamment en cause, comme ailleurs : selon le rapport 2016 de l’OPTL Aura, 4,5 % des effectifs ont moins de 25 ans contre 16 % ayant 55 ans et plus. Mais la forte activité à Lyon ou encore à Chambéry rend plus que jamais difficile le renouvellement des effectifs. « Depuis le début de l’année, le turnover s’accélère dans les entreprises », témoigne Franck Moissonnier, DRH du groupe Perrenot. Karine Coulon, déléguée régionale de l’Opca Transport et Services (Opca TS), confirme : « L’activité étant repartie, les besoins sont très prégnants ».
Les transporteurs de la région ont pris conscience depuis 10 ou 15 ans déjà qu’ils devaient élargir leur sourcing : ils ont créé trois Groupements d’employeurs pour l’insertion et la qualification (Geiq) spécialisés dans le transport, sur une dizaine existant en France. Le Geiq Avenir Emploi en Rhône-Alpes (Aera), par exemple, basé dans l’Est lyonnais et auquel adhèrent quelque 20 sociétés de transport et logistique (et leurs filiales), signe environ 60 contrats de professionnalisation par an : « Il propose à des demandeurs d’emploi de passer un titre professionnel (permis C ou CE et Fimo) avec une alternance intervenant après l’obtention du permis, explique son président, Laurent Bonny, dirigeant de la société LBTP. On peut y ajouter des formations demandées par l’entreprise : formation métier, éco-conduite, maths, français, lecture de cartes routières, hygiène de vie, etc. ». Grâce aussi à un accompagnement social et au double tutorat, 85 % sont ensuite embauchés par leur employeur. Un Groupement d’employeurs a aussi été créé pour recruter et placer les autres, afin qu’ils ne soient pas perdus par la profession. « Depuis l’année dernière, un décret nous autorise aussi à aider nos adhérents pour leur RH, notamment les recrutements, ajoute Laurent Bonny. C’est le cas pour des programmes de remplacement de salariés qui vont partir à la retraite. »
En 2016, l’Opca TS a proposé une opération de Gestion prévisionnelle des emplois et des compétences territoriale (GPECT) aux nombreuses entreprises du TRM installées dans ce gros bassin qu’est l’Est lyonnais. Sur 90 invitées à intégrer le collectif dédié, 20 sont venues, dont 10 très actives. « La montée en puissance des difficultés de recrutement, depuis un an, a été l’occasion de nous remettre en cause, assure Arnaud Froment, l’énergique DRH de BH Développement. Nous avons dû nous poser des questions nouvelles, sur notre marque employeur, sur le bonheur au travail, etc. Et la participation au collectif d’entreprises nous a rassurés, les autres ayant les mêmes problèmes ». Après 3 mois de diagnostic de leurs besoins et pratiques, tous ont été invités à produire des outils opérationnels, à raison d’une demi-journée de réunion toutes les 6 semaines, en collaboration avec Pôle Emploi. « Dans mon groupe de travail, nous avons précisé les profils dont nous avons besoin afin d’aller puiser dans la CVthèque de Pôle Emploi, plutôt que de passer des annonces », explique Arnaud Froment. Une grille d’entretien téléphonique pour des présélections et un modèle de parcours d’intégration ont aussi été créés. Aujourd’hui, bien que la GPECT soit terminée, le collectif continue à se réunir autour de thèmes décidés ensemble. « Cela s’enrichit avec les apports de chacun, assure Arnaud Froment. Nous, par exemple, avions contacté les gestionnaires du RSA à la Métropole de Lyon pour trouver de nouveaux publics. Du coup, la Métropole a intégré le collectif ».
Si ce DRH assure que son entreprise « a passé l’été sereinement » grâce à tous ces outils, les besoins globaux continuent de croître. L’Opca et l’AFT ont donc sollicité les membres du collectif pour le tournage, dès cette rentrée, d’un film qui montrera aux jeunes la réalité du travail dans le TRM. Un format court sera diffusé sur les réseaux sociaux et un autre, long, à Pôle Emploi, et dans les collèges et lycées.