Ce changement de cap, annoncé par le ministre de l’Équipement, José Luis Ábalos, dans une interview du 18 juin dans le quotidien El País, concerne d’abord l’autoroute AP-1 entre Burgos et Armiñón, dans la province d’Alava au Pays basque espagnol (84 km), opérée par Itinere. En réponse à la question d’une sénatrice, le ministre a confirmé, le 19 juin, que le péage sera supprimé à l’expiration du contrat, le 30 novembre 2018. « Nous n’allons pas prolonger cette concession », a-t-il précisé. La liste inclut également l’AP-7, entre Alicante et Tarragone, et l’AP-4 entre Séville et Cadix (94 km), deux concessions gérées par le groupe Abertis qui viennent à échéance le 31 décembre 2019 (468 km). À cela s’ajoutent les concessions à échéance le 31 août 2021, soit après la fin de l’actuelle législature (2020). Il s’agit de l’AP-2 entre Saragosse et la Méditerranée et de deux tronçons de l’AP-7, Tarragone-La Jonquera et Montmeló-El Papiol, soit 479 km opérés par Acesa (Abertis). L’annonce du ministre crée un précédent, et laisse planer un doute sur le lancement de l’appel d’offres des neuf autoroutes en faillite récupérées par l’État. Le virage du nouveau gouvernement espagnol a été bien accueilli par le TRM espagnol. L’autoroute entre Burgos et Armiñón est la voie de passage obligé pour les poids lourds en provenance de Madrid, du centre et du sud de l’Espagne lorsqu’ils se dirigent vers la France et le reste de l’Europe. L’AP-7 est tout aussi stratégique : c’est le « corridor d’exportation » des fruits et légumes de Catalogne, du Levant, de Murcie et de l’Andalousie orientale. La Fédération nationale des associations de transporteurs d’Espagne (Fenadismer), qui regroupe des PME et des travailleurs indépendants, a applaudi l’annonce du ministre. Elle considère que cette mesure « apportera des avantages indéniables pour l’amélioration de la sécurité routière et le désengorgement du réseau routier national, dans la mesure où elle permettra une meilleure répartition des trafics, aussi bien privés que professionnels entre routes nationales et autoroutes nationales », affirme-t-on chez Fenadismer. Astic, l’association des transporteurs internationaux, a également approuvé la décision.
Reste que l’annonce du ministre pose des questions sur l’avenir du système routier espagnol. Les six tronçons représentent 38 % du réseau à péage. Le ministre a reconnu, dans l’interview, un coût de l’entretien et de la maintenance compris entre 50 000 et 68 000 €/km, alors que le réseau routier espagnol est très détérioré à certains endroits, faute de financements. Il a promis une réflexion sur la « viabilité et la durabilité » du réseau public lorsque toutes les concessions seront terminées. Le gouvernement régional de Catalogne évoque la possibilité de remplacer les péages par une écotaxe. Le Seopan, association qui regroupe les grandes entreprises de travaux publics, se montre très critique. Elle estime que le coût annuel pour l’État va s’élever à 450 M€ pour les six tronçons, et que cette charge sera supportée par le contribuable.