OLIVIER THOUARD : Aujourd’hui, nous sommes toujours dans l’attente. Cependant, quelle que soit la situation, nous devons nous préparer. Il reste évident qu’en l’absence d’accord entre le Royaume-Uni et l’Union européenne, les parties prenantes vont rencontrer d’énormes difficultés à être prêtes d’ici au 29 mars. Cela serait beaucoup plus confortable si les opérateurs impactés par le Brexit obtenaient plus de temps pour se préparer, par exemple un décalage en 2020. Dans tous les cas, l’Europe sera perdante en cas de Brexit dur. L’hypothèse d’accords bilatéraux verra difficilement le jour car il est impossible pour les parties de se projeter si elles ne savent pas où elles vont.
O. T. : Dans les deux organisations, nous mobilisons toutes les ressources disponibles pour affronter cet événement. S’agissant de GEFCO, nous avons commencé par évaluer notre exposition au Brexit notamment en analysant les flux d’échange. Nous nous sommes interrogés sur la manière dont nous aurions à accomplir les opérations de douane en répertoriant nos besoins d’agréments et en vérifiant que nos clients possèdent les autorisations douanières. Chez TLF/TLF OVS, une mission Brexit a été spécialement créée afin de diffuser aux adhérents toutes les informations sur la sortie du Royaume-Uni et sur l’aide que nous pouvons leur apporter. Nous travaillons aussi bien avec les douanes françaises que les douanes britanniques. Elles sont toutes deux mobilisées pour que tout soit prêt pour le 30 mars : recrutement de personnel, identification de locaux supplémentaires, construction de bungalows, etc. En effet, en cas de hard Brexit, il faudra parquer les camions qui n’auraient pas les autorisations nécessaires, pour ne pas bloquer ceux qui les ont. Il est évident que personne n’a intérêt à bloquer des ports et le tunnel. Actuellement, pour les flux qui vont de France vers la Grande-Bretagne, avant d’arriver côté anglais, l’importateur doit faire une déclaration anticipée avant le départ afin d’éviter les blocages à l’arrivée. Je pense qu’aucun État ne prendra le risque d’être tenu pour responsable d’un désastre, si la mise en application du Brexit tournait mal à la frontière. La Grande-Bretagne a commencé à effectuer des tests, avec un convoi de poids lourds parti de l’aéroport de Manston Kent (sud-est de l’Angleterre) pour se diriger vers le port de Douvres afin d’appréhender l’éventualité d’un embouteillage en cas d’absence d’accord.
O. T. : Nous attendons les mesures d’accompagnement aussi bien sur le plan national qu’européen. En effet, la mise en œuvre du Brexit suppose d’assurer la formation du personnel pour effectuer des opérations de transit, de dédouanement et pour contrôler la conformité documentaire. Les entreprises ont besoin de financement pour pouvoir payer ces formations.
En ce sens, le Clecat (Comité de liaison européen des commissionnaires et auxiliaires de transport du marché commun) a demandé des aides financières à l’UE. Pour le moment, aucune réponse sur ce point n’a été fournie par les autorités européennes. Côté français, un financement pour la formation des nouveaux déclarants en douane a été obtenu le 15 février dernier. Principe de précaution oblige, les entreprises se trouvent dans l’obligation de former des équipes à cette nouvelle donne sans savoir si cela débouchera sur quelque chose. Nous restons dans l’incertitude.