«Nous avons signé le rachat de 100% des actions de la SARL Trans Bretagne le 13 décembre. La cession des parts a été enregistrée auprès du trésor public à Paris le 15 janvier. Le montant de la transaction devait être versé en vingt échéances, à partir de janvier 2001. Le premier versement a été retardé d'un mois parce que nous attendions des éléments comptables demandés depuis plusieurs semaines aux anciens actionnaires. Nous n'avons pas obtenu ces pièces. Nous avons cependant commencé à payer fin février et nous continuons à le faire», indique Fabrice Thirion, directeur de la société luxembourgeoise Munsch Transports. A l'appui de ses dires, celui-ci avance des copies de documents officiels, qui lui permettent de démentir avoir disparu ou encore être poursuivi par la police du Grand Duché.
Il prétend avoir toujours été joignable, y compris après le 8 février, contrairement à ce qu'affirme Léon Guillemer, gérant et ancien actionnaire majoritaire de Trans Bretagne (cf. L'OT 2118). Ce dernier «ne nous paraît pas avoir les qualités de gestionnaire requises pour diriger aujourd'hui une entreprise telle que Trans Bretagne», estime Fabrice Thirion. C'est pourquoi, Munsch Transports avait demandé au gérant, par lettre adressée le 23 février, d'organiser une assemblée générale extraordinaire afin de le révoquer. Léon Guillemer a tardé à répondre, fixant finalement cette réunion au 30 mars. Entre temps, le 27 mars, il a déclaré son entreprise en cessation de paiement, avec jugement de mise en redressement judiciaire prononcé par le tribunal de commerce de Rennes. Une procédure qui vise à protéger l'entreprise.
Face à l'imbroglio opposant le gérant breton et l'actionnaire luxembourgeois, les juges ont choisi de confier une mission de gestion totale à l'administrateur judiciaire, maître Sophie Gautier. Désormais, c'est cette dernière qui est en charge de Trans Bretagne. A son bureau, on avoue ne disposer pour l'instant que de très peu d'éléments sur la situation comptable de la société et sur les conditions de la cession. Pourtant, l'administrateur devra présenter un rapport dans les deux mois suivant la date du jugement. Maître Gautier a d'ores et déjà convoqué pour le 17 avril Melle Lebargie, représentante légale de Munsch Transports. Une demande qui a croisé un courrier du 6 avril par lequel Munsch Transport demandait à être entendu par l'administrateur judiciaire. Dans cette lettre, la société luxembourgeoise fait notamment état du refus de Léon Guillemer de mettre en oeuvre différentes réorientations de gestion et reproche au gérant d'avoir déposé le bilan sans autorisation de son actionnaire majoritaire.
De son côté, Léon Guillemer dit avoir attendu en vain de ce dernier qu'il remette à flot la trésorerie de l'entreprise, à hauteur d'environ trois millions de francs. Trans Bretagne affiche en effet, pour son exercice clos le 31 mars 2000 avec un chiffre d'affaires d'environ 60 millions de francs, un déficit d'exploitation de plus de 2 millions de francs, une perte nette de 1,8 million de francs et des capitaux propres réduits a zéro. Depuis, la situation ne semble pas s'être améliorée. En adhérant au groupement Réseau Europ Volume en novembre, Trans Bretagne pouvait espérer obtenir de nouveaux trafics.
Or, REV a perdu depuis un de ses principaux adhérents, la Savam (rachetée par Norbert Dentressangle). Conformément à ce que prévoient ses statuts, le groupement doit désormais exclure de ses rangs Trans Bretagne suite à sa mise en redressement judiciaire. Pour Munsch Transports, cette affaire constitue également un revers puisque l'entreprise, inscrite comme commissionnaire de transports au Luxembourg, ambitionnait, selon Fabrice Thirion, de «créer un groupe en France en rachetant plusieurs sociétés». Ce dernier estime avoir été trompé... tout comme Léon Guillemer. De part et d'autre, plusieurs procédures judiciaires seraient lancées. Le Breton a demandé l'annulation de la vente (voir L'OT n°2118). Le Luxembourgeois pourrait remettre en cause le jugement de mise en redressement judiciaire, qui lui interdit de profiter de son acquisition.