Des évolutions plus attractives

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« Success story ». Sous cet intitulé, le site Alumn’Isteli présente de brefs portraits d’anciens élèves : leur motivation pour choisir le secteur et ses métiers, leur formation, puis leur évolution depuis l’obtention de leur diplôme de bac + 2, + 3 ou + 5. Une chose est sûre, quarante-trois ans après la création de l’institut, les diplômés des formations supérieures du transport et de la logistique sont fiers de leur parcours, de leur école et de leurs métiers.

Avec raison, assure Rémi Durif, diplômé en 2015 d’un MTLCI (master de Management transport logistique et commerce) à l’Isteli de Paris, président de la start-up Global Transport and Supply, et de l’association des alumni d’Île-de-France : « Notre secteur est dynamisé par l’e-commerce et la digitalisation. Des entreprises se créent, d’autres se digitalisent. Des métiers se transforment, de nouveaux vont émerger… Cela dope les carrières. Quatre ans après notre sortie de master, 90 % d’entre nous ont changé de poste ou d’entreprise, voire ont été recrutés par des chasseurs des tête. »

L’association nationale des 10 000 alumni de l’Isteli (Alumn’Isteli) est née en 2016, lors des 40 ans de l’école, de la collaboration entre l’institut et les anciens. « Ils avaient besoin de créer un réseau, explique Pierre de Surône, directeur exécutif d’Aftral. Mais il s’agissait aussi de renforcer l’attractivité des métiers en modernisant leur image. »

Il reste cependant des progrès à faire, si l’on en croit le premier baromètre de l’attractivité des métiers du transport et de la logistique, réalisé avant l’été pour Heppner. Celui-ci montre que si 71 % des jeunes Français ont « une bonne image du secteur », seuls 44 % ont « envie d’y travailler », les métiers étant jugés « difficiles » par un tiers des sondés, associés à « une image plutôt manuelle », aux « perspectives limitées ».

Un programme chauffeur

Ces clichés ont la vie dure, constate-t-on chez Heppner (3 100 collaborateurs), où l’on assure « que l’encadrement de terrain est issu des métiers de base, tandis que la politique de formation se renforce ». À tous les niveaux : université Heppner en « mode projet » pour les cadres supérieurs internationaux, école de formation continue internationale terrestre (74 commerciaux formés en 2018), école des ventes (15 alternants par an). L’entreprise s’apprête à créer une école d’affrètement et ouvrira, en octobre, un « programme chauffeur » pour former et intégrer des candidats en insertion.

Comme ce groupe, les géants du secteur mènent tous des politiques actives de formation et de développement de carrière, à grande échelle et toujours en direction de divers métiers. Avec plus d’un million d’heures de formation délivrées en 2018, XPO Logistics Europe (plus de 50 000 salariés) orchestre des programmes destinés à ses cadres jeunes diplômés avec XPO Graduate (240 intégrés depuis 2005), ses managers (4 045 formés depuis 2010) commerciaux ou conducteurs. Idem chez STEF (18 000 salariés en Europe) avec, notamment, des programmes pour certains emplois à forts enjeux, tel un « graduate program » destiné aux bac + 5, ou d’autres misant sur l’alternance, pour des profils bac + 2/bac + 3 et pour les conducteurs.

Être Bien, au poste qui leur convient

Quelle que soit la taille de l’entreprise, l’intégration en alternance et la formation continue sont les premiers leviers d’une gestion des emplois et des compétences, dans un secteur en tension pour le recrutement des conducteurs, mais aussi des exploitants ou des commerciaux… « La pénurie nous incite à communiquer davantage sur les métiers, mais aussi à renforcer les professionnels en interne par la formation, remarque Karine Pinson, DRH de Tratel (700 salariés, à Guerville, 78). Nos 650 conducteurs s’appuient sur six formateurs et 15 pilotes. Ils peuvent aussi évoluer d’une de nos activités à une autre. »

La variété des activités est un atout selon Ludovic Brin, associé du groupe Ageneau (420 salariés dont 300 conducteurs, à Cholet, 49) : « Certains conducteurs se lassent de ne faire que de la ligne. Évoluer entre les diverses activités du groupe peut leur apporter une plus-value. » Mais ici, comme dans beaucoup d’entreprises, le nerf de la guerre réside d’abord dans la formation, avec un référent pour 25 salariés, sept formateurs, un centre de formation créé en mars 2018. « Il importe de bien les écouter, d’être attentif aux nouveaux modes de vie, pour qu’ils se sentent bien », ajoute Ludovic Brin.

L’écoute des besoins, comme des attentes d’évolution, est aussi centrale aux Transports Leblanc (56 salariés, 39 conducteurs, à Carentoir, 56), que Céline Rio, P-dg, a rachetés avec deux collègues en 2016 (voir portrait de Mickaël Roux page 25). Cinq anciens manutentionnaires caristes de l’entrepôt ont ainsi été formés pour devenir conducteurs. « On leur a fait confiance et ils sont complètement impliqués, explique-t-elle. Pour nous, PME, c’est une manière d’offrir des perspectives d’évolution, pour que les gens se sentent bien, au poste qui leur convient. »

L’appui d’un groupement ou de l’Opco

La dirigeante mise aussi sur les formations de Tred Union, en particulier au management, suivies par le responsable d’atelier, la RH, l’exploitante ou elle-même. « Nous sortons de notre zone de confort… et revenons nourris, redynamisés. » Reste un défi : attirer les jeunes vers les métiers, « en apprenant à mieux les écouter et les connaître », assure Jérôme Durand, P-dg de SAT Transport (Le Pouzin, 07), dans le même groupement. Jean-Christophe Edy, directeur de Tred Union, ajoute qu’il est moins évident aujourd’hui de « parler d’une évolution de carrière à un jeune. Il sera plus intéressé par un travail où il se fera plaisir, en étant utile, dans des entreprises digitalisées qui se préoccupent des aspects sociaux et environnementaux. Il faut y penser pour capter leur attention. »

Dans ce travail pour doper leur attractivité, le groupement offre un lieu d’échange entre pairs, mais aussi un appui concret pour faire évoluer leurs salariés. Les patrons du groupement Flo réfléchissent à un nouvel outil pour proposer des évolutions de carrières interentreprises. « Il faut s’adapter au turn-over, prône Sébastien Duval, administrateur chargé de l’animation de la Flo Académie. Pour fin 2019, nous élaborons un système où les conducteurs pourront changer de poste, d’employeur, de région, sans quitter le groupement et en maintenant certains avantages sociaux. Notre atout est de mailler toute la France et tous les métiers du poids lourd. » Autre partenaire des entreprises, l’Opco Mobilités (ex-Opca Transports) accompagne les formations des salariés, comme la montée en compétences de leurs patrons. « C’est un gage de meilleure gestion des emplois et des compétences, analyse Karine Coulon, déléguée interrégionale de l’Opco en Auvergne-Rhône-Alpes et Bourgogne-Franche-Comté. Nous proposons notamment des diagnostics et accompagnements des TPE et PME, afin que les dirigeants optimisent leurs profils de manager. Les petites entreprises sont d’autant plus ouvertes à l’innovation organisationnelle que l’on voit arriver une nouvelle génération d’entrepreneurs prêts à changer. »

Logistique et digitalisation

Pour Erwan Poumeroulie, délégué aux affaires juridiques et sociales de la FNTR, « l’évolution de carrière est vraiment à la main des chefs d’entreprise. La branche a deux leviers pour les aider dans cette tâche : la formation et les classifications des métiers, qui peuvent les faire évoluer et les valoriser. La classification actuelle date de 1973, avec certains métiers qui n’existent plus et d’autres, nouveaux, qui ne sont pas inscrits. Or une classification actualisée facilite le travail des entreprises et renforce l’attractivité de leurs activités. »

Les négociations en cours sur la formation ou la classification interviennent dans un contexte mouvant, évolutif. Un exemple ? « Tous les prestataires de transport, et tous les logisticiens doivent désormais intégrer des doubles compétences transport-logistique, relève Didier Aivazoff, directeur de Supply Job. Ces nouveaux profils de responsables “logistique-transport” ou “transport-logistique”, à l’interface des deux activités, vont devenir de plus en plus importants à recruter et à faire évoluer. » Autre grande « affaire » du secteur : la digitalisation des activités, au bureau comme au volant. « La digitalisation va transformer les métiers et les carrières, assure Martin Arnouil, chargé de clientèle de Promotrans à Lyon. La réforme du titre professionnel en 2019 comporte déjà une épreuve sur l’utilisation d’un smartphone. Bientôt, l’autonomisation des véhicules va transformer le métier de conducteur pour intégrer le contrôle intelligence artificielle. » Encore une perspective d’évolution du métier à faire valoir aux futurs candidats, férus de numérique.

Mickaël Roux – Associé A LA P-dg des Transports Leblanc –
Polyvalence en confiance

Qui aurait pu croire qu’à 47 ans, Mickaël Roux serait associé à Céline Rio, P-dg des Transports Leblanc, à Carentoir (56) depuis 2016, mais aussi responsable du parc véhicules et des ateliers éco-conduite ? « Pas moi, assure-t-il. Tout jeune, quand je voyais un camion, je ne pensais pas qu’un jour, je conduirais ce genre d’engin ! Puis, en 1994, j’ai été recruté par les Transports Leblanc, par hasard… » À l’époque, en effet, un accident empêche le jeune homme, titulaire d’un CAP de maintenance, de poursuivre sa carrière dans l’industrie.

Jacques Leblanc, des transports éponymes, le recrute comme mécanicien, puis le fait former avant de le placer derrière un volant dès 1995. Conducteur ? Pas que. Dans l’entreprise, Mickaël a toujours exercé la mécanique et la conduite en parallèle, gérant aussi du tutorat. Sa polyvalence lui offre une connaissance globale de l’entreprise. Et quand en 2016, Céline Rio rachète l’entreprise à Jacques Leblanc, elle lui propose – ainsi qu’à Sophie Paul, qui gère la logistique – de l’accompagner dans l’aventure de direction.

Aujourd’hui, l’associé gère l’entretien et le renouvellement de la flotte, des matériels… Il continue à travailler à l’atelier, assisté deux jours par semaine par un jeune conducteur, également polyvalent. « Je m’occupe aussi du tutorat, ajoute-t-il. Je m’occupe des rendez-vous avec les enseignants pour les stagiaires. Je remets des cahiers des charges aux conducteurs pour accueillir des jeunes, que je vois en cours puis en fin de formation… Et j’assure la formation à l’éco-conduite. » Ce qui fait la différence dans l’accueil et dans la progression des salariés, selon Mickaël Roux, « c’est la confiance et l’ambiance. Je suis à l’écoute des problèmes ou des contraintes des conducteurs… Et eux sont les premiers à se rendre disponibles si nous avons un problème. Cette entraide et cette confiance, c’est ce que j’apprécie le plus. Et je crois que c’est attrayant ! »

François Lougnot Responsable d’exploitation, groupe Mauffrey
Un secteur où « faire la carrière que l’on souhaite »

« J’ai un profil particulier », annonce François Lougnot, responsable d’exploitation du groupe Mauffrey à Strasbourg. Après un bac + 2 scientifique, une quinzaine d’années en tant que commercial, il s’était réorienté vers le transport vers 35 ans, passant en 2013-2015 un master transport logistique commerce international (TLCI) à l’Isteli de Paris.

« Tout jeune, j’avais passé mes permis poids lourd dans l’armée et assuré quelques missions de conduite, complète-t-il. Dans le commerce, même en tant que responsable, il me manquait une dimension de management global que je savais exister dans le transport. » Le transport ? François Lougnot lui trouve maintes qualités. « Point central de l’économie », le secteur connaît « une forte dynamique à l’embauche » et permet « de faire la carrière que l’on souhaite », tant qu’on a « les compétences et l’engagement », confie l’entrepreneur. Et l’élève de l’Isteli, devenu major de sa promo, n’en a pas manqué, en particulier dans le groupe Mauffrey, où il effectue son alternance de 2013 à 2015. La première année, il assure des missions à l’exploitation et en soutien du responsable d’exploitation. En deuxième année, il fonctionne en mode projet, met en place des bonnes pratiques au sein de l’entrepôt et travaille au redéploiement des règles de sécurité, ainsi qu’à l’animation des systèmes d’information. Après le master, il passe deux ans chez Geodis à l’exploitation, mais regrette l’état d’esprit de Mauffrey. Il participe à un projet de start-up sur la mise à disposition de surface de stockage, « très pertinent », dit-il, mais où il retrouvait la fonction de commercial qu’il avait justement quittée.

Revenu chez Mauffrey, François Lougnot pilote une exploitation à Strasbourg, avec une équipe de 11 sédentaires et une centaine de conducteurs, sans compter cinq caristes. En responsabilité, comme il y aspirait. Et ce n’est pas fini. « Le passage nécessaire au poste de responsable d’exploitation, sur une phase de trois à cinq ans, permet d’appréhender le fonctionnement des métiers et les schémas de l’entreprise, explique-t-il. Ensuite on peut envisager une montée en puissance sur des postes de plus grande envergure. Prendre la responsabilité d’un site, d’une agence ou d’un bureau d’études, de fonctions transverses ou de grands comptes. Ici, la culture d’entreprise est basée sur l’évolution des cadres en interne et sur la confiance. »

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