Des changements pour une « relation de confiance »

Article réservé aux abonnés

Des contrôleurs Urssaf qui donnent droit à l’erreur, que l’on peut solliciter pour valider des pratiques, avec lesquels on peut régler des difficultés à l’amiable… Ce n’est pas un rêve, mais « la société de confiance » que cherche à instaurer une loi récente. Reste à voir ce que donnera la pratique.

Les dispositions de la loi pour un État au service d’une société de confiance (Essoc) du 10 août 2018 devraient détendre un peu l’atmosphère qui entoure les contrôles Urssaf. Le texte instaure en effet un droit à l’erreur pour tous les usagers. Celui-ci repose sur un a priori de bonne foi : la charge de la preuve est inversée et il revient à l’administration de démontrer la mauvaise foi avant d’appliquer des sanctions. « La réglementation du recouvrement prévoyait déjà que les Urssaf n’appliquent pas de pénalité, dans certains cas, lors d’une régularisation dans les trente jours de l’erreur déclarative, commente Christine Cambus, directrice adjointe de la réglementation, du recouvrement et du contrôle à l’Acoss (Agence centrale des organismes de sécurité sociale). Mais les cas sont actuellement limités. Aussi, le gouvernement prépare pour cet été un projet de décret qui ira plus loin, de manière à adapter la réglementation au droit à l’erreur. Le dispositif de sanctions va être revisité. »

Pour aider à la prévention des erreurs, le gouvernement a créé le site Internet www.oups.gouv.fr, qui recense les erreurs les plus fréquentes et donne des explications sur la bonne manière de déclarer son taux AT-MP, de s’y retrouver dans les différents taux de cotisation applicables ou les codes types de personnel (CTP), etc. Mais Sabrina Lasfer, manager optimisation sociale chez STS, avoue être sceptique : « L’administration doit démontrer qu’il y a eu mauvaise foi. Qu’est-ce que la mauvaise foi ? Avoir délibérément ignoré une règle ? Mais la réglementation évolue constamment, ainsi que les modalités de calcul, de paramétrage, etc. La réalité c’est que nous restons dépendants de l’appréciation souveraine de l’inspecteur ! »

Des conclusions opposables

La loi Essoc, pourtant, vise à instaurer des relations de confiance et, dans ce but, crée un droit à demander un contrôle. « Je ne suis pas en mesure de dire s’il sera très utilisé, admet Christine Cambus. Il existait déjà, par le passé, une possibilité de demande de visite-conseil, mais peu étaient adressées chaque année. » Ce droit peut paraître étonnant à nombre de dirigeants d’entreprise, traditionnellement inquiets d’être contrôlés… Mais cette démarche permet de sécuriser un rachat d’entreprise ou un changement d’actionnariat, par exemple, puisque les conclusions du contrôle sont ensuite opposables, à la manière d’un rescrit. « Cela présente un intérêt quand on a une vision globale et très claire de ses pratiques, pour faire valider l’une d’elles, précisément. Mais dans le cas contraire, prévient Sabrina Lasfer, c’est le moyen de se faire redresser sans pouvoir se prévaloir du droit à l’erreur en cas de contrôle classique. »

Une autre nouveauté trouve grâce à ses yeux : la généralisation de la médiation à toutes les Urssaf, pour régler certains problèmes à l’amiable et éviter des contentieux. Un cotisant qui a porté réclamation auprès des services de l’Urssaf (y compris via la plateforme téléphonique du 3957) et qui n’est pas satisfait de la réponse ou n’en a pas reçu dans un délai d’un mois, peut saisir gratuitement le médiateur. Il ne doit cependant pas avoir engagé un recours contentieux. S’il préfère cette démarche, il doit, comme avant, passer d’abord par la commission de recours amiable (CRA). Par ailleurs, le délai pour saisir le pôle social du tribunal de grande instance sans avoir eu la réponse de la CRA est passé récemment d’un à deux mois.

Tests de contrôle limités dans le temps

Enfin, deux expérimentations limitant la durée des contrôles ont été lancées cette année. La première est le test, jusqu’en 2021, d’une extension aux PME de moins de 20 salariés de la limitation des contrôles Urssaf à trois mois maximum, qui existait pour les TPE de moins de dix personnes. La seconde est lancée jusqu’en 2022 dans deux Régions (Hauts-de-France et Auvergne-Rhône-Alpes) qui, à elles seules, touchent 20 % des PME françaises. Elle concerne les entreprises de moins de 250 salariés et dont le chiffre d’affaires n’excède pas 50 M€, pour lesquelles elle limite à neuf mois sur trois ans la durée cumulée des contrôles réalisés par toutes les administrations (Urssaf, douanes, Direccte, etc.). Ces limitations de durée et autre droit à l’erreur ne s’appliquent pas en cas d’indices « précis et concordants », précise la loi, de manquement à une obligation légale ou réglementaire. Et là, pas de changement, les sanctions tombent.

Nouvelles implications et sanctions
Prélèvement à la source

Clémence en cas d’erreur… pour l’instant. Depuis la mise en place du prélèvement à la source (PAS), en janvier, les employeurs sont aussi collecteurs d’impôt. Un rôle nouveau, qui peut inquiéter certains, car le Code général des impôts prévoit de les sanctionner, par exemple en cas de taux erroné. Le droit à l’erreur s’applique, explique-t-on à la DGFiP*, à condition que l’employeur distrait s’acquitte de « l’impôt supplémentaire résultant de la correction de l’inexactitude ou de l’omission, auquel s’ajoutera un intérêt de retard qui représente le prix du temps ». Des « conditions » qui s’élèvent à 5 % du taux de PAS qui aurait dû être déclaré, avec un minimum de 250 euros. Les erreurs constatées depuis janvier sont des recours au taux non personnalisé, des retards dans la récupération des taux personnalisés ou encore des erreurs sur la déclaration sociale nominative (DSN), dans l’identification du compte bancaire à prélever. « Par mesure de tempérament, afin que les collecteurs appréhendent correctement la réforme », les erreurs ne font pas l’objet d’amendes en 2019. Pour la suite, la DGFiP se montre confiante en précisant : « La proportion d’erreurs est non significative. Les recettes budgétaires sont conformes à toutes les projections. »

V.V.L.

* Direction générale des finances publiques

Actualités

Grand angle

Boutique
Div qui contient le message d'alerte
Se connecter

Identifiez-vous

Champ obligatoire Mot de passe obligatoire
Mot de passe oublié

Vous êtes abonné, mais vous n'avez pas vos identifiants pour le site ?

Contactez le service client abonnements@info6tm.com - 01.40.05.23.15