Aussi vaste que l’Irlande et quasiment aussi peuplée que la Suisse, Auvergne-Rhône-Alpes est la deuxième Région française et la cinquième en Europe en termes de PIB. Son socle industriel, historique, et son attractivité se renforcent même : 22 sociétés industrielles se sont implantées en 2018 sur la seule agglomération de Lyon (sur 116 implantations, un chiffre en hausse de 12,5 % par rapport à 2017(1).
Parce qu’elle occupe une position géographique stratégique, cette Région voit passer dans l’année, sur ses routes, plus de 24 millions de tonnes de marchandises(2). Elle abrite aussi le premier parc logistique de France (4,5 millions de mètres carrés). Principale plateforme, la plus grande du pays : le Parc international de Chesnes, en Nord-Isère (2,5 millions de mètres carrés sur 1 000 ha), qui a vu construire, en 2018, 28 000 m2 pour STEF, 70 000 m2 pour Intermarché ou encore 46 000 m2 pour Lidl (qui agrandit aussi son site de Pontcharra, toujours en Isère, pour le porter à 56 500 m2). Sans compter le boom logistique qui accompagne l’aéroport Saint-Exupéry, tout proche : Amazon, notamment, doit s’y installer sur… 160 000 m2.
Rien d’étonnant, dans ce contexte, que l’OPTL Auvergne-Rhône-Alpes annonce que le transport a passé, dès 2017, le seuil des 88 800 salariés : « Un record depuis 2009 », précise Cécile Rougeol, déléguée Auvergne de l’AFT, que ne dément pas sa projection sur 2018 (+ 4,1 %). « Toutes les activités du transport ont vu leurs volumes augmenter en 2017 et 2018 », complète Jean-Christian Vialelles, délégué TLF Sud-Est, qui regrette le ralentissement dû au mouvement des Gilets jaunes : « La Région a été moins touchée que d’autres, mais le début 2019 reste un peu moins bon que celui de 2018. »
En matière d’infrastructures, également, les transporteurs auvergnats-rhônalpins oscillent entre satisfecit et récriminations. Satisfecit de l’achèvement, en 2018, de la liaison A89-A6 au nord de Lyon : « Cela nous évite de passer par les engorgements de Saint-Étienne et Saint-Chamond pour aller à Lyon et au-delà », se félicite Nicolas Combemorel, dirigeant de TBS (Clermont-Ferrand) et vice-président Auvergne de l’OTRE régionale.
Des engorgements qui ne sont pas près de disparaître. Si le projet d’A45, demandé depuis des décennies par les acteurs économiques locaux, n’a pas été retenu dans la loi de programmation sur les mobilités, leur collectif ne désarme pas. « Nous avons envoyé à Emmanuel Macron un courrier pour lui demander de proroger la DUP signée [fin prévue : juillet 2020, Ndlr], assure Sylvie Plotton, déléguée FNTR de la Loire, car les résultats d’étude des alternatives ne seront pas connus à brève échéance. »
Les Auvergnats pestent également contre le chantier de mise à 2x3 voies, d’ici à 2021, de l’A75 au sud de Clermont-Ferrand, et se battent contre l’interdiction de traverser Saint-Pourçain-sur-Sioule, pourtant incontournable pour qui veut éviter l’A71, « inabordable », assure Nicolas Combemorel. Côté ex-Rhône-Alpes, les Grenoblois supportent, eux, les travaux d’APRR sur l’A48 et l’A480, car il s’agit, d’ici à 2022, de fluidifier la traversée d’agglomération. Pas de tel Graal en vue pour les transporteurs lyonnais : « Avec le déclassement de l’A7 dans sa partie urbaine et les autres projets, nous sommes rejetés hors de la ville, dénonce Jacques Sorlin, délégué régional FNTR. Or, le maillon essentiel que constituerait l’achèvement du périphérique manque toujours. La Métropole crée une zone à faibles émissions (ZFE), alors qu’il n’y a pas d’itinéraire de substitution. »
Avec quatre ZFE, Auvergne-Rhône-Alpes est la Région de France la plus concernée par ce dispositif. Déjà effectives à Grenoble, les restrictions de circulation qui y sont liées le seront en 2020 à Lyon, Saint-Étienne et Clermont-Ferrand. Par mesure d’accompagnement, la Métropole de Lyon vient de relancer son instance de concertation logistique urbaine et, comme ses homologues, accompagne des projets de création de stations GNV.
D’autres acteurs en profitent aussi pour se positionner, comme la Compagnie nationale du Rhône qui choisit ces jours-ci le groupement chargé de réaliser un hôtel logistique au port Édouard-Herriot de Lyon, ou encore comme le réseau Urby : émanation de La Poste, de la Caisse des dépôts et du fonds d’investissement Demeter, cette holding s’adjoint des partenaires grenoblois, stéphanois ou clermontois pour créer et exploiter un ou deux espaces de logistique urbaine dans chaque agglomération. Des transporteurs locaux en profitent : Urby, prudent, se lance systématiquement en faisant appel à des sous-traitants.
(1) Rapport 2018 Agence de développement de la région lyonnaise
(2) Chiffres clés 2018 CRCI