385 M$ d’indemnisation. C’est ce que devra verser le gouvernement de Djibouti à l’opérateur portuaire de Dubaï, DP World (78 ports dans 40 pays), et indirectement à l’émirat qui en est propriétaire, pour avoir rompu de façon unilatérale le contrat qui les liait depuis 2006 pour l’exploitation pendant 50 ans du terminal à conteneurs de Doraleh. L’exploitant avait été expulsé sans effet le 22 février 2018 conformément à une loi adoptée par le parlement djiboutien en 2017 autorisant le gouvernement à revoir les contrats dits stratégiques de manière unilatérale. Après avoir annulé le contrat de concession, Djibouti, qui détenait deux tiers du terminal, l’a nationalisé en septembre 2018 au nom d’un principe de souveraineté nationale.
La Cour d’arbitrage international de Londres vient de rendre son verdict après 13 mois d’arbitrage, a annoncé Dubaï. Ce sera donc une seconde fois que la juridiction arbitre en faveur de l’Émirati. Car Djibouti avait déjà voulu écarter DP World en 2014, un litige également tranché en faveur du groupe émirati en février 2017.
Mis en service en 2009, le terminal de Doraleh, qui bénéficie d’une position stratégique à l’entrée de la mer Rouge, devait servir de hub de transbordement à l’opérateur émirati ainsi que de porte d’entrée vers le grand pays voisin enclavé, l’Éthiopie, dont le vaste marché intérieur (97 millions d’habitants) dépend pour ses importations de Djibouti.
En arrière-plan se profile en fait une guerre larvée entre les Émirats arabes unis et la Chine qui se disputent l’influence géopolitique en Afrique, Djibouti étant soupçonné de vouloir se débarrasser de son partenaire historique. En 2013, un accord conclu entre l’opérateur portuaire chinois China Merchants (CMHI) et les autorités portuaires avait donné du sens à cette thèse. Il a permis à CMHI d’acquérir 23,5 % du capital de la Société du port de Djibouti, moyennant quelque 185 M$.
Djibouti aurait également été « en pourparlers » avec CMA CGM (du reste lié par quelques participations avec China Merchants) pour y construire à proximité une nouvelle infrastructure. Des négociations dont rien n’est sorti publiquement jusqu’à présent. Pour l’heure, le gouvernement de Djibouti n’a pas réagi.
Les autorités de Dubaï rappellent dans leur communiqué que DP World est engagé dans une autre bataille juridique, au sujet d’une zone de libre-échange de 3,5 Md$ dans la région de Doraleh, exploitée aujourd’hui par China Merchants, et que DP World a créée en vertu d’un accord avec Djibouti.