Un troisième transporteur de CO2 liquéfié pour Northern Lights

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Deuxième LCO2 de Northern Lights en construction

Northern Lights a commandé ses deux premiers LCO2 en 2021, tous deux en construction et à livrer en 2024.

Crédit photo ©Northern Lights
Northern Lights, joint-venture entre Equinor, Shell et TotalEnergies, étoffe sa petite flotte de LCO2 en commandant une troisième unité, également alimentée au GNL avec assistance vélique. Les projets basés sur la technologie du capture et stockage de CO2 se multiplient. Et ils ouvrent la voie au transport maritime de CO2 liquéfié. Point d'étape.

Northern Lights, la coentreprise créée par Equinor, Shell et TotalEnergies (33,3% chacun) en vue de développer en Europe le marché de la capture et stockage de CO2 [CCS], a commandé son troisième transporteur de CO2 liquéfié alimenté au GNL.

Le contrat de construction a été attribué au chantier chinois Dalian Shipbuilding Offshore (DSOC), où les deux premiers navires commandés en 2021 sont actuellement en construction.

Les deux premiers navires LCO2 d’une capacité de 7 500 m3, soit près du double de celle des transporteurs existants (d'environ 3 600 m³), ont ainsi marqué la première phase du développement de ce projet.

Les unités de 130 m de long, immatriculées sous pavillon norvégien et classées par DNV, devraient être livrées durant le premier semestre 2024. Elles seront propulsées au GNL avec une assistance vélique.

En décembre dernier, la compagnie japonaise K Line et Northern Lights JV ont signé des contrats d'affrètement en coque nue et d'affrètement à temps pour les deux premières unités.

5 Mt piégés d'ici 2026

L’année 2024 devrait marquer le début des opérations de ce projet visant à proposer aux industriels européens la possibilité de séquestrer leurs émissions de CO2 en toute sécurité et de manière permanente dans un réservoir géologique situé à 2 600 m sous la mer, au large d’Øygarden, en mer du Nord norvégienne.

Approuvé par l’État norvégien en 2020 et désigné comme un projet d'intérêt commun (PIC) par l’Union Européenne, les installations, en fin de chantier, permettront de stocker jusqu’à 5 Mt d’ici 2026 et 1,5 Mt de CO2 par an au démarrage.

Le premier transport est attendu pour 2026. Une fois livrés, les navires transporteront du CO2 liquéfié depuis les installations de capture du carbone de Norcem Brevik et Hafslund Oslo Celsio, jusqu'au terminal de réception du CO2 de Northern Lights à Øygarden.

En décembre dernier, Northern Lights a reçu les sept premiers des douze réservoirs destinés au stockage temporaire du CO2 à terre.

Deux accords commerciaux

Le premier accord commercial a été signé en août 2022 avec Yara. Le CO2 sera capté sur le site de Sluiskil, son usine d'ammoniac et d'engrais située aux Pays-Bas.

À partir 2025, 800 000 t de CO2 par an seront ainsi captées comprimées et liquéfiées puis acheminées jusqu'au site de Northern Lights.

En mai, un second contrat a été signé avec le groupe énergétique danois Ørsted, qui développe, construit et exploite des parcs éoliens et solaires et des installations de production et de stockage d'énergies. Il a attribué à Northern Lights le marché du transport et du stockage de 430 000 t par an d’émissions de CO2 biogénique.

Le CO2 sera capté sur les deux centrales électriques biomasse d'Asnæs et d'Avedøre au Danemark avant d'être acheminé par la mer jusqu'au terminal de réception d'Øygarden puis par pipeline jusqu’au site d’enfouissement.

Mer du Nord, un foyer

Les projets basés sur le CCS se multiplient. Et ils ouvrent la voie au transport maritime de CO2 liquéfié.

Outre le projet norvégien, deux autres au Danemark – Bifrost, dont TotalEnergies est l’opérateur majoritaire, et Greensand conduit par Ineos et Wintershall DEA – sont en cours de développement. Quelque 13 Mt de CO2 pourraient être ainsi injectés annuellement dans la mer du Nord.

Projet Greensand, à grande échelle

Porté par le géant britannique de la chimie Ineos et l'énergéticien allemand Wintershall DEA,  Greensand est sans doute le plus abouti à cette échelle à se concrétiser dans l’UE.

le carbone sera capté en Belgique (bientôt en Allemagne également), transporté par la route au port d’Anvers où il sera chargé dans des conteneurs-citernes construits sur mesure pour le transport maritime puis acheminé par la mer jusqu'à la plateforme Nini, dans la partie danoise de la mer du Nord, qui loge déjà de nombreux gazoducs et réservoirs géologiques vides après des décennies d'exploitation pétrogazière.

Le CO2 sera transféré sur un jack-up où il sera maintenu à une pression de 20 bars et à une température de 7° C. Il pourra alors être injecté dans un réservoir à 1 800 m de profondeur. Le site aura la possibilité de stocker à horizon 2025/2026 jusqu'à 1,5 Mt de CO2 par an en puis 8 Mt de CO2/an en 2030.

Le projet est en phase de validation du concept. Si elle est concluante, le CO2 sera transporté sur des navires spécialement conçus à cet effet. Les partenaires de Greensand prévoient de prendre une décision finale d’investissement (FID) au premier semestre 2024.

Bifrost, en gestation

À proximité, TotalEnergies a obtenu en février l’autorisation du gouvernement danois pour évaluer le potentiel de stockage de CO2 dans ses eaux territoriales. Ces droits portent sur une surface de 2 118 km2 et recouvrent les champs gaziers de Harald, actuellement opérés par le groupe français.

Le projet Bifrost, dont TotalEnergies sera l’opérateur majoritaire (80 %) aux côtés de l’entreprise publique Nordsøfonden (20 %), est susceptible, à terme, d'assurer le transport et le stockage de plus de 5 Mt de CO2/an d’ici 2030 dans un champ pétrolier et gazier épuisé (3 Mt à partir de 2027).

Le groupe français est impliquée dans quatre projets de ce type, tous en mer du Nord : outre Bifrost et Northern Lights, le NEP au Royaume-Uni et Aramis aux Pays-Bas (qui vise pour 2030 une capacité allant jusqu'à 8 Mt/an).

Mi-août, pour des raisons politiques, le Danemark a reporté l'octroi de licences de capture du carbone en mer, quatre jours seulement avant le début de la deuxième série d'appels d'offres. Les débats portent sur les participations de l'État dans les futures licences. Les trois premières licences avaient été attribuées à Wintershall Dea, Ineos Energy et TotalEnergies.

Technologie de décarbonation pertinente

Les experts climat de l'ONU (Giec) ont estimé, dans leur dernier rapport de référence, que le monde devra compter sur le captage et stockage du CO2 pour contribuer à « abattre » les quelque 40 milliards de tonnes de CO2 émis chaque année au niveau mondial.

Le captage et le stockage du carbone est l'une des quatre voies crédibles vers l'objectif zéro net, considère aussi l'Agence internationale de l'énergie.

La technologie fait pourtant débat. Appréhendé dans son cycle de vie complet, incluant les émissions tout au long du processus, le process émettrait l'équivalent de 21 % du gaz capturé, soutient le think tank australien IEEFA.

Adeline Descamps

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